Viande
Le veau de boucherie résiste dans la tempête
La filière veau de boucherie a fait preuve de résilience pendant la pandémie et la fermeture de la RHD. Elle doit maintenant faire face à la flambée des coûts de production.
La filière veau de boucherie a fait preuve de résilience pendant la pandémie et la fermeture de la RHD. Elle doit maintenant faire face à la flambée des coûts de production.
La Pentecôte 2021 a donné lieu à une opération inédite de la part de la filière veau de boucherie. En partenariat avec la Cniel, Interbev a lancé une campagne de communication de sept semaines, une durée record. Quel bilan peut-on en faire ? « La vraie question, c’est : Que se serait-il passé si on n’avait rien fait ? Une catastrophe ! » s’exclame Gilles Gauthier, président de la section veau d’Interbev. Et il est certain que l’été 2021 n’a pas été synonyme de catastrophe pour la filière.
Contrairement aux années précédentes, pas d’effondrement de la cotation du veau cet été. En moyenne, sur juillet et août, la cotation nationale du veau rosé clair O s’affichait à 5,39 €/kg. C’est 15 % de plus que lors du très mauvais été 2020 et 10 % de plus qu’en 2019. « Le bilan est positif, et nous partions de très loin ! Certes, le mois de juillet pluvieux nous a aidés, car la consommation de viande de veau est météo sensible, mais ça ne fait pas tout ! » tempête le bouillonnant responsable.
En cumul sur les huit premiers mois de l’année, les achats des ménages de viande de veau sont restés stables par rapport à leur bon niveau de 2020, selon les données de Kantar, rapportées par FranceAgriMer. En mai, mois du début de la campagne, ils progressaient même de 3,6 % sur un an. La baisse de la consommation post-Pentecôte a été nettement moins marquée que d’habitude, rapporte Interbev. De quoi permettre aux opérateurs d’arriver en automne sur des bases saines, « il n’y a aucun stock dans les étables ni dans les congélateurs », confie Gilles Gauthier.
Le classique Festival du veau débute dans la sérénité. « Le transfert des pièces à griller sur de la basse et la poitrine a commencé, c’est beaucoup mieux pour l’équilibre carcasse », explique le président.
Travailler à deux filières
« Le soutien du Cniel était primordial pour la campagne, et nous espérons renouveler le partenariat », a indiqué Gilles Gauthier. La filière laitière est en effet très concernée. Ce sont 60 % des veaux issus du troupeau laitiers qui partent dans la filière veaux de boucherie pour être abattus avant l’âge de huit mois.
60 % des veaux laitiers deviennent des veaux de boucherie
« Le pic des vêlages a lieu à l’automne, ce qui correspond à des sorties en fin de printemps, moment où la consommation tend à se tasser. D’où l’importance de mener des grandes actions à cette période, pour que les intégrateurs mettent davantage de veaux en place à l’automne et soutenir ainsi les cours des petits veaux », décrypte Gilles Gauthier. Une nécessité, alors que le marché des petits veaux enchaîne les mauvaises années.
Les intégrateurs français ont su garder le cap, avec des abattages en hausse de 0,8 % sur les 40 premières semaines de l’année, selon les données Normabev, alors même qu’ils reculaient au premier trimestre, les mises en place ayant été en retrait face à la fermeture de la RHD. Néanmoins, Gilles Gauthier confie son inquiétude : « Nous espérons que les intégrateurs continuent les mises en place, malgré la flambée des coûts de production. »
Pas de solution technique à la hausse des coûts de production
Une flambée des coûts de production qu’observe de très près Olivier Van Ingelgem, secrétaire général du Syndicat de la vitellerie française (SDVF) : « Il n’y a pas de solution technique à cette hausse des coûts. Les changements de formulation n’ont qu’un effet à la marge, les formules sont déjà optimisées ! » Les cours de la poudre de lait ont bondi de près de 30 % sur un an et se rapprochent de leurs records historiques de 2013. Elle est en partie substituable par celle de lactosérum, qui a gagné 38 % sur un an d’après les cotations établies par nos confrères de La Dépêche-Le Petit Meunier.
« Quant aux fibres, certains opérateurs sont déjà au maximum de ce qu’ils peuvent incorporer dans les rations, et elles aussi augmentent », alerte Olivier Van Ingelgem. Les prix des veaux gras ont bien progressé. Ainsi, la cotation nationale du veau rosé clair O dépassait de 9,5 % son niveau de l’an dernier en semaine 40. Mais « ce n’est pas assez ! Si l’on se base sur un modèle, pour un veau standard, il nous manque 1,20 €/kg pour compenser la hausse des coûts de production », calcule le secrétaire général.
La seule solution est donc de répercuter en aval. La filière veau, intégrée, n'entre pas dans le cadre de la contractualisation imposée par la loi Egalim 2 entre l'amont et le premier transformateur, selon le SDVF. Sans indicateurs de coût de production reconnus par la filière, la revalorisation doit passer par une négociation avec la GMS.
« Pour les produits transformés, comme les paupiettes ou le haché, les négociations sont annuelles, mais pour la viande, les prix s’établissent chaque semaine », explique Olivier Van Ingelgem. Pour l’heure, « la distribution n’a pas concédé de hausses suffisantes », rapporte-t-il.