Entouré d’éleveurs dans le berceau de la race charolaise là où il vit, Jérôme Saint-André a décroché, au Concours général agricole 2022, avec ses partenaires éleveurs et abatteurs deux médailles : l’or dans la catégorie « charolais label Rouge » et l’argent dans la catégorie « veau sous signe de qualité ».
Comment faites-vous apprécier les viandes de qualité de races à viande à votre clientèle ?
Jérôme Saint-André - Les clients, ça s’éduque. Les jeunes même, je le vois, viennent de plus en plus au rayon traditionnel. Je recommande des morceaux particuliers, j’en fais des connaisseurs. Je partage l’idée de manger moins de viande, mais d’en choisir pour se faire vraiment plaisir. Comme j’achète des bêtes entières, j’arrive à faire passer du pot-au-feu jusqu’au filet. Les pièces à griller sont maturées au minimum 21 jours. Les éleveurs avec qui je travaille viennent à peu près une fois par an au magasin, expliquer leurs façons de faire. Ils sont même prêts à faire faire un tour de leur élevage. J’ai pris le parti du 100 % label Rouge, au rayon traditionnel et au libre-service, en bœuf, en veau, en porc, en agneau, à l’exception de certaines opérations promotionnelles sur le porc. Le label Rouge met en valeur les qualités bouchères des races à viande, leur caractère de terroir.
La race charolaise, qui est votre spécialité en gros bovin, vous semble-t-elle tout à fait adaptée à la consommation ?
J. S.-A. - La race charolaise donne un très bon grain de viande, de la tendreté, de la jutosité, du gras en présence suffisante mais sans excès, la couleur vive de la viande. J’apporte mon travail avec les éleveurs qui ont adapté leur système d’engraissement pour obtenir le juste gras. C’est ce gras qui permet la maturation que je pratique. Je dirais : « il y a charolais et charolais », comme « il y a limousin et limousin ». Mes éleveurs vendent aussi des reproducteurs qui ont une génétique de type bouchère. Ils privilégient la qualité de la viande, pas le poids de la carcasse.
Comment achetez-vous ? Comment vous conformez-vous à la loi Egalim ?
J. S.-A. - J’achète tous mes gros bovins charolais sur pieds, la plupart chez huit éleveurs. Ce sont soit des génisses, soit des jeunes vaches ayant fait un ou deux veaux. Ces éleveurs participent aux concours de bovins de boucherie et, du coup, j’achète un tiers de mes charolaises dans les concours de la région ; il y en a cinq ou six par an rien qu’en Saône-et-Loire. Au concours de Paris en 2022, j’en ai encore acheté deux, présentées par mes éleveurs aussi. Je suis fier de mes éleveurs parce que sur les neuf bêtes sélectionnées cette année au Concours général agricole quatre étaient d’eux.
C’est leur coopérative qui facture, mais je conclus le prix avec eux
Mes huit éleveurs travaillent leur engraissement pour obtenir le juste gras. Je les paie 40 à 45 centimes de plus au kilogramme que la grille label Rouge et ils me réservent les meilleures bêtes. La carcasse est le plus souvent conformée U ou E. C’est leur coopérative qui facture, mais je conclus le prix avec eux. Et j’ai bien entendu revalorisé mes tarifs au 1er mars.
J’achète aussi du veau de race limousine élevé sous la mère label Rouge à une association d’éleveurs de Corrèze (Elvea 19). Je ne peux pas lui rendre visite régulièrement, mais je fais 100 % confiance à l’association et aussi à l’abatteur qui est à Lubersac Veau du Limousin. C’est primordial de pouvoir travailler en toute confiance.
Votre fonctionnement est-il généralisable, au sein de Système U ou ailleurs ?
J. S.-A. - Je pense que je suis un peu précurseur dans la coopérative U. L’associé U qui a mon magasin me soutient dans ma façon de travailler. Et je n’ai pas trop d’inquiétude vis-à-vis de Dominique Schelcher, le président. Il faudrait que ce système d’achat soit développé dans toutes les régions et dans tous les magasins qui ont la possibilité de le faire. C’est payant pour le magasin ; je peux dire que le mien doit sa bonne réputation à ses rayons frais dont la boucherie. C’est une histoire de volonté, d’hommes, aussi bien du côté des magasins que des éleveurs.