Aller au contenu principal

Produits laitiers
Exporter des poudres de lait en Afrique de l’Ouest, des opportunités mais des questions éthiques

Le continent africain voit ses importations de produits laitiers progresser fortement. Toutefois, les opérateurs locaux dénoncent les envois européens de poudres de lait réengraissées aux matières grasses végétales.

L’Afrique représente 17 % de la population mondiale, mais seulement 5,5 % de la ressource mondiale de lait, avec 48 millions de tonnes, soit 38 kg équivalent lait (el) par habitant, bien loin des recommandations de l’OMS. « Ces chiffres cachent de très fortes variations selon les pays », explique Benoît Baron, chef de projet conjoncture laitière de l’Institut de l’élevage (Idele), lors du webinaire consacré au marché mondial du lait. Ainsi, l’Afrique du Nord dispose de 72 kg el/hab, contre 51 en Afrique de l’Est, 12 en Afrique de l’Ouest et 5 en Afrique centrale.

Pour répondre à une partie de ses besoins non couverts localement, l’Afrique importe donc. Et le continent pèse pour 10 % des importations mondiales de produits laitiers en valeur ; cette part monte même jusqu’à 19 % en ce qui concerne les poudres de lait.

Forte hausse des importations

Avec une démographie galopante, l’Afrique de l’Ouest affiche une impressionnante croissance de ses importations de produits laitiers ; elles ont bondi de 132 % entre 2010 et 2020.

La consommation de lait est traditionnelle en Afrique de l’Ouest, où une production locale existe et une tradition agropastorale reste ancrée. Mais les producteurs locaux ne sont pour l’heure pas en mesure de répondre à la demande. Ce marché, prometteur si l’on en croit les prévisions démographiques, attire les entreprises laitières, notamment européennes, « elles ont pris une place sur le marché depuis les années 1990, aux côtés de laiteries de taille plus modeste présentes sur la filière lait local », résume Benoît Baron.

L’essor des FFMP, un fléau pour le lait local

Les FFMP, fat filled milk powder ou poudre de lait réengraissée à l’huile végétale, sont des mélanges qui comprennent environ 30 % d’huile de palme. Elles sont fabriquées en Europe et reconditionnées ou transformées en Afrique de l’Ouest. « On a toutes les chances de consommer ce produit quand on consomme du lait en Afrique de l’Ouest. Le problème, c’est que le consommateur ne le sait pas ! », s’emporte Christian Corniaux, chercheur au Cirad.

Un quart des produits laitiers consommés en Afrique de l’Ouest est issu des MGV, c’est même plus de 50 % dans les villes. Les importations de ces MGV ont progressé depuis 2009, elles proviennent presque exclusivement de l’Union européenne. Le principal exportateur est de loin l’Irlande, suivi par la Pologne, les Pays-Bas et la Belgique.

Ces mélanges sont extrêmement compétitifs au niveau prix en comparaison avec la poudre grasse, « en 2018, il y a un facteur 12 entre le prix du beurre et celui de l’huile de palme ! » s’exclame Christian Corniaux. Ces produits posent de nombreux problèmes. En premier lieu, les pratiques d’étiquetage sont parfois mauvaises et le risque de tromperie du consommateur est grand. L’impact environnemental, mais aussi sanitaire et nutritionnel, est également dénoncé par Christian Corniaux et la filière lait local regrette une concurrence déloyale.

Il pointe aussi l’absurdité de la situation : « D’un côté, l’Union européenne dépense pour aider les filières locales, de l’autre la DG Trade (direction générale du commerce de l'UE, NDLR) encourage les exportations de MGV vers l’Afrique de l’Ouest ! » Une situation qui pourrait changer avec l’évolution des politiques européennes et le «Green Deal».

Les plus lus

Pascal Bénézit, le président de la FNB
« C’est la première fois que les prix des broutards dépassent les coûts de production », Patrick Bénézit de la FNB

La hausse des cours des broutards a permis aux prix de dépasser les coûts de revient, c’est inédit. Patrick Bénézit, le…

Mâles bovins d'un an de race limousine au pâturage.
Broutards et jeunes bovins : les prix de marché dépassent les nouveaux prix de revient

Les prix des vaches, jeunes bovins et broutards continuent de progresser. Pour ces deux dernières catégories, ils dépassent…

un marteau géant aux couleurs du drapeau américain tape sur un conteneur aux couleurs du drapeau européen
Agroalimentaire : quelles filières françaises ont le plus à perdre des droits de douanes de Trump ?

Les États-Unis, s’ils sont les premiers exportateurs de produits agricoles et agroalimentaires dans le monde, n’en sont pas…

graphique de prix
Les prix des œufs américains dépassent 1000 €/100 kg

La grippe aviaire fait des ravages aux États-Unis avec 30 millions de poules perdues en 3 mois. De quoi créer des ruptures d’…

carcasses de bovins en abattoirs
Gros bovins : coup d’arrêt à la baisse des abattages en 2024

Les abattages de gros bovins se stabilisés en 2024, la baisse des abattages de vaches allaitantes étant compensée par la…

Anton van den Brink
Lysine : la mesure européenne anti-dumping pourrait couter de 4 à 5 €/t d’aliments porc et volaille

La lysine étant surtout cruciale pour les monogastriques, la mesure anti-dumping appliquée par l’UE pourrait couter de 4 à 5…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Les Marchés
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez vos publications numériques Les Marchés hebdo, le quotidien Les Marchés, Laiteries Mag’ et Viande Mag’
Recevez toutes les informations du Bio avec la newsletter Les Marchés Bio