Viande bovine bio : « On est moins nombreux à se partager le gâteau »
Les volumes de viande bovine bio vendus en GMS ont plongé en deux ans, d’autres circuits prennent néanmoins en partie le relai, et pour les éleveurs le contexte porteur du conventionnel a limité la casse. Mais la décapitalisation en conventionnel créée un appel d’air qui complique les approvisionnements en bio, d'autant plus que l'abattage découpe est en pleine restructuration.
Les volumes de viande bovine bio vendus en GMS ont plongé en deux ans, d’autres circuits prennent néanmoins en partie le relai, et pour les éleveurs le contexte porteur du conventionnel a limité la casse. Mais la décapitalisation en conventionnel créée un appel d’air qui complique les approvisionnements en bio, d'autant plus que l'abattage découpe est en pleine restructuration.
« Il faut produire ce que le consommateur demande » tranche Philippe Sellier, éleveur bovin et président de la commission bio d'Interbev, évoquant les 80 % de viande bovine bio consommée sous la forme hachée, « sur ce type de segment le bio a été précurseur, on s’est adapté à cet essor du haché et des élaborés ».
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Le bœuf bio dynamique en restauration collective
Pour redynamiser la consommation de viande bio, la restauration collective est privilégiée par la filière d'autant plus que la loi Climat et Résilience demande que 60 % de la viande servie en restauration collective soit durable, 100 % même pour la restauration collective gérée par l’état.
« Il faut faire un vrai travail auprès des élus »
« Il faut faire un vrai travail auprès des élus pour qu’ils pensent au bio, bio et local ne sont pas antagonistes dans la viande puisque nous n’importons pas de viande bio », continue le président. Un travail qui porte ses fruits. « Nous avons vu paraître plusieurs nouveaux appels d’offre sur du bœuf bio en restauration collective, bourguignons, sautés ; nous avons d’ailleurs investi dans notre outil de découpe de Maulévrier sur une deuxième machine à steak haché » confie Aurélie Mauget, directrice fonctions support de la coopérative Unebio.
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Des acteurs sortis du marché des bovins bio
Si elle se réjouit de l’ajout au menu de viande bio chez des clients de la restauration collective ; l’opératrice reste prudente « notre pôle de commercialisation de Montluçon a récupéré par exemple des clients de la Sicaba dans le Centre, on a le même phénomène au Sud-Ouest avec l’arrêt de Faget près de Tarbes, un autre acteur historique de la viande bio ». Ce que résume Jean-Marie Roy, éleveur laitier et allaitant, et président de la coopérative Unebio « on est moins nombreux à se partager le gâteau », ajoutant tout de même « le marché reste fragile, si les magasins spécialisés se reprennent, c’est surtout sur les fruits et légumes, la viande est stable ».
« Il n’y a pas de crise du bio, il y a plutôt un réajustement »
« Il n’y a pas de crise du bio, il y a plutôt un réajustement après des années de croissance à deux chiffres, en 2024, ça repart » juge pour sa part Louis Frack, confondateur et dirigeant de l’enseigne Bioburger.
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Les prix de la viande bovine bio se redressent
Louis Frack fait état de tensions dans les approvisionnements de viande hachée bio, il se fournit auprès d’Elivia en viande issue d’élevages adhérents à Unebio. « Les prix remontent actuellement mais ils avaient chuté auparavant. On a un lien très étroit avec notre fournisseur car on est très dépendant du bœuf sur nos produits, on anticipe donc les volumes et sécurise les approvisionnements » explique l’entrepreneur. « Cette année, les stocks sont vides en haché bio, y compris les congélateurs », confirme Jean-Marie Roy.
« Cette année, les stocks sont vides en haché bio, y compris les congélateurs »,
Concurrence entre bio et conventionnel
Il explique, « le problème, c’est que le marché conventionnel est parfois mieux disant. Un quart des animaux élevés en AB sont vendus au plus offrant, donc partent en conventionnel ou label si la carcasse convient ».
« Le marché conventionnel est parfois mieux disant »
La coopérative Unebio, qui fête ses 20 ans cet automne, travaille à créer des filières 100 % sur cinq espèces (bœuf, porc, veau, agneau, volaille). « Alors que les coûts de production, pour une vache élevée à l’herbe, sont les mêmes en bio et en label, si le marché est mieux disant à côté, c’est difficile pour certains de jouer le jeu de la filière » soupire Jean-Marie Roy. Le phénomène est d'ailleurs le même en élevage d'ovins allaitants.
«Être naisseur engraisseur nous a permis de passer la crise du lait bio »
Faut-il continuer à payer la certification dans ce contexte ? Pour Jean-Marie Roy, oui. «Être naisseur engraisseur nous a permis de passer la crise du lait bio », se réjouit celui dont l’atelier allaitant produit « pile le bon profil d’animaux, des croisés R- ou R= et des bœufs laitiers O= ou O+, qu’on a aucune difficulté à valoriser ».
Faire évoluer la production de bovins bio
Pour s’adapter davantage à la demande et gagner en précocité, Unebio travaille avec la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou sur des croisements Angus x Limousins. Certains éleveurs produisent des animaux Limousins x Aubrac. La coopérative a mis en place des contrats bœufs pour valoriser les mâles. « On ne peut pas changer les pratiques du jour au lendemain mais on a besoin de produire pour un marché et il faut responsabiliser nos éleveurs » tranche Aurélie Mauget.