[VIDEO] Les Maîtres laitiers du Cotentin se diversifient à l’export
En seulement dix-huit mois, l'usine de la coopérative Maîtres laitiers du Cotentin est sortie de terre à Méautis, dans la Manche. Elle est opérationnelle depuis avril dernier. Sur le site de 20 hectares, des bâtiments de 35 000 m2 ont été aménagés. Un projet d’envergure pour le groupe bas-normand, puisqu’il a coûté 116 millions d’euros. 55 millions d'euros ont été prêtés par la Banque européenne d’investissement. « C’est d’ailleurs ce qui a motivé les autres banques à suivre », estime Jean-François Fortin, directeur général du groupe des Maîtres laitiers du Cotentin (MLC). Et 10 millions d’euros proviennent de la Banque publique d’investissement.
La Chine, déclencheur de l’investissement
40 % de l’usine est dédiée à la fabrication de briquettes de lait dans le cadre d’un contrat passé avec le groupe chinois Synutra. Si celui-ci fabrique déjà du lait infantile en poudre, il était à la recherche de lait liquide pour adultes et de lait de croissance liquide conditionné. MLC s’est engagé à fabriquer 690 millions de briquettes de 20 centilitres par an, à charge à Synutra France, distributeur commercial, de les écouler en Chine, sous peine de pénalités. Le contrat court sur dix ans : « c’est la durée d’amortissement des machines de conditionnement », justifie le directeur.
Le groupe a fait appel à SPX Corporation pour les outils de réception et prétraitement du lait. Le conditionnement des briquettes, qui représente à lui seul un investissement de 30 millions d’euros a été conçu par Tetra Pak, et la palettisation et le suremballage automatisé ont été achetés auprès du groupe Alvey.
Des débuts contrariés
Si l’usine a été livrée en avril, elle n’a démarré qu’en juillet. La Chine s’est en effet montrée récalcitrante pour délivrer les agréments pour l’exportation de lait. Michel Mounier, le directeur de la coopérative, détaille « pour l’heure, seul l’agrément “lait blanc”, le lait entier, a été délivré. Nous espérons une visite de la commission qui délivre les agréments pour le lait infantile en octobre ».
Des difficultés d’accès qui sont coutumières aux entreprises qui cherchent à s’implanter sur le marché chinois, d’autant plus que la Chine développe une stratégie de reconquête de son marché intérieur grâce à la reprise de sa production laitière – tout en restant largement dépendante des importations.
L’objectif initial de 2017, 350 millions de briquettes, ne sera pas atteint
L’objectif initial de 2017, 350 millions de briquettes, ne sera pas atteint du fait des trois mois d’inactivité. La montée en puissance est progressive. Le groupe annonce être passé d’une quinzaine de conteneurs par semaine en juillet, à une soixantaine en septembre. À terme, il faudrait en expédier 110 à 115 par semaine pour respecter le contrat passé avec Synutra. Un rythme que le MLC espère atteindre début 2018, 200 personnes seront alors employées sur le site. Si les six lignes de conditionnement sont fonctionnelles, et peuvent délivrer chacune 24 000 briquettes par heure, seules quatre sont actuellement en activité.
Modernisation de la fabrication du beurre
Un tiers de l’usine sera en parallèle consacré à la fabrication de beurre et de crème sous l’AOC Isigny. Les chaînes de production des ateliers de Tribehou, à une dizaine de kilomètres, qui fabriquaient ces produits, y sont actuellement transférées. Des nouvelles baratteuse et butyreuse ont été installées, ce qui permet de fabriquer deux types de beurre AOC, « de baratte » ou non.
La production sera pleinement opérationnelle fin septembre, quand la trentaine de salariés aura rejoint ses nouveaux postes. Jean-Marie Eustache, directeur industriel, explique « la mécanisation du suremballage du beurre AOC a pris du retard, pour raisons financières liées au problème lors de la délivrance de l’agrément chinois ». Pour Jacques Klimczak, directeur marketing du groupe, ces nouveaux outils sont la promesse d’innovation, « grâce à ces technologies, nous pourrons développer les beurres à inclusions ».
Près d’un quart de l’usine est vide à l’heure actuelle
Près d’un quart de l’usine est vide à l’heure actuelle. Et 7 hectares du site sont encore constructibles. MLC souhaite pouvoir saisir d’autres opportunités. « Avec le marché chinois, on apprend le temps long ! » lâche Jean-François Fortin. Le transport par bateau peut durer près de 2 mois et demi jusqu’à Shanghai, et les produits peuvent être exposés à des températures de 50 °C. Les conteneurs sont ensuite stockés, « à l’heure actuelle, le produit n’est pas distribué en Chine, car Synutra n’a pas encore les quantités nécessaires à un lancement national », d’où l’importance du travail sur la DLC, de 12 mois.
Prêt pour de nouveaux marchés
Fort de ses nouvelles compétences, MLC pourrait répondre aux attentes qui se développent dans d’autres pays en proposant ces briquettes en Afrique, en Amérique du Sud ou en Inde par exemple, une fois le contrat avec Synutra fini. Deux nouvelles lignes de production de briquettes peuvent encore être installées dans le bâtiment. « Je ne peux pas vous dire ce qu’il y aura dans quelques années dans le reste de l’usine, sûrement de l’ultrafrais, des produits qui n’existent pas encore », sourit Jean-François Fortin.
La visite de l'usine en vidéo
Des volumes collectés en hausse
À 347,13 €/1 000 litres toutes qualités confondues, le prix moyen du lait payé par les Maîtres laitiers du Cotentin de la dernière campagne s’affichait environ 30 € au-dessus du prix moyen national. La coopérative a investi 10 millions d’euros dans ce soutien aux producteurs pour limiter la baisse des cours. Contrairement à la tendance nationale, « les volumes collectés par MLC ont progressé de 3 à 4 %, entre autres, car nous n’avons pas eu de sécheresse », selon Christophe Levavasseur, président de la coopérative les Maîtres laitiers, maison mère du groupe MLC. Avec la fin des quotas, « nous proposons aux éleveurs qui le souhaitent d’augmenter de 20 % leur production », précise-t-il. 690 millions de briquettes représentent, selon les formules, 80 à 100 millions de litres de lait.