Production
Pénurie alimentaire : lait et produits laitiers seront-ils les prochains concernés ?
Collecte de lait de vache en repli, sécheresse en vue, les industriels s’inquiètent pour leurs approvisionnements cet été. Le manque est palpable en matière grasse, les cours s'envolent.
Collecte de lait de vache en repli, sécheresse en vue, les industriels s’inquiètent pour leurs approvisionnements cet été. Le manque est palpable en matière grasse, les cours s'envolent.
Les industriels laitiers s’en sont inquiétés lors de la conférence de presse de Syndilait le 10 mai dernier, les disponibilités à venir semblent insuffisantes. Depuis septembre dernier, la collecte laitière est constamment sous son niveau d’un an plus tôt. Au premier trimestre 2022, ce sont 5,98 milliards de litres de lait qui ont été collectés dans l’Hexagone, selon les données de FranceAgriMer. C’est 1,2 % de moins que lors du premier trimestre 2021. Tous les bassins de production reculent, hormis le Grand Ouest (+0,4 %) qui bénéficie de la bonne dynamique des Pays de la Loire (+1,8 %). Les deux premières régions productrices que sont la Bretagne et la Normandie reculent respectivement de 0,8 % et 0,5%.
Depuis mars, la situation ne s’est pas améliorée, avec une collecte toujours en retrait. En semaine 16 elle se situait ainsi encore 1,6 % sous son niveau de l’an dernier. On distinguait encore Centre-Val de Loire (+1,9 %) et Pays-de-la-Loire (+3,1 %), seules zones dynamiques.
Manque de matière grasse
Alors que les volumes baissent, le manque de matière grasse est accentué par des taux décevants : 42,5 gramme/litre en moyenne au premier trimestre, c’est 0,35 % de moins que l’an dernier.
Les fabrications de crèmes ont néanmoins progressé de 5,4 % sur cette période, les prix étant très incitatifs, aux dépends de celles de beurre en baisse de 0,3 %. De quoi expliquer la tenue de prix très élevés pour le beurre, d’autant plus que les troubles sur le marché des huiles végétales à la suite de la guerre en Ukraine compliquent les stratégies de substitution que certains industriels pourraient être tentés de mettre en œuvre.
Pour les acheteurs, la situation est tendue. Certains ne s’étaient pas couverts espérant une détente des prix avec la reprise saisonnière de la collecte, ils font face dorénavant à des prix records et doivent à leur tout obtenir des hausses auprès de leurs clients.
Des prix du lait en forte hausse
Les prix réels payés au producteur ont pourtant nettement progressé, avec une hausse de 20,3 % entre mars 2021 et mars 2022 pour le lait conventionnel, pour l’amener à 420,5 €/1000 litres, selon les données de FranceAgriMer. C'est un record historique. De quoi couvrir la flambée des coûts de production en mars, selon les calculs d’Agreste. C’est d’ailleurs ce qui pousse les laiteries à appeler urgemment les GMS à revaloriser le lait liquide. Car à cette hausse des prix à la production s’ajoute, pour les industriels, celle des emballages, du transport et de l’énergie. A noter néanmoins que tous les producteurs ne bénéficient pas de hausses de la même ampleur. Ceux payés en fonction de la valorisation beurre/poudre sont gagnants des prix mondiaux élevés. Au contraire, ceux travaillant avec des laiteries fabricant davantage de produits de grande consommation sont perdants, les GMS tardant à revaloriser les prix des produits laitiers.
Pas de retour de l’offre en vue
Malgré cette hausse des prix à la production, qui incite les éleveurs à produire, comme l'illustre la baisse des réformes des vaches, la collecte n’est pas attendue dynamique cette année. Tout d’abord le cheptel laitier continue de reculer. Mais aussi la sécheresse menace la France, selon les prévisions des experts. Alors que les prix de l’aliment sont très élevés, les éleveurs seraient alors contraints de réformer et la production s’en ressentirait fortement.