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Bien-être animal
Fin de la castration à vif : de nouveaux équilibres à trouver dans la filière porcine

Au 1er janvier 2022, un an après l’Allemagne, la France interdira de castrer des porcelets sans les anesthésier. C’est un chamboulement pour tous les maillons de la chaîne de production et la distribution de viande de porc.

Fin de la castration à vif : de nouveaux équilibres à trouver dans la filière porcine
© agnormark - stock.adobe.com

« Qui paie ?» Les éleveurs et abatteurs de porcs se posent la question depuis la parution, début 2020, de l’arrêté ministériel fixant la castration à vif (sans anesthésie) des porcelets mâles au 1er janvier 2022. Les syndicats FRSEA-JA Bretagne/Pays de la Loire ont encore adressé la question au ministre de l’Agriculture dans un communiqué du 20 septembre 2021, Julien de Normandie n’ayant répondu clairement au Space. À trois mois de l’échéance, éleveurs et abatteurs ne savent s’ils vont miser sur les porcs castrés ou entiers.

Au Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand, la filière auvergnate s’interrogeait le 5 octobre à travers le débat : « Quelle place pour le mâle entier dans la filière porcine régionale ? » L’interprofession Interporc Auvergne-Limousin et Rhône-Alpes et l’Institut du porc (Ifip) avaient invité le groupement de producteurs Cirhyo et le grossiste J. Carrel. Problématique du côté éleveurs : pratiquer l’anesthésie locale et l’analgésie post-opératoire, cela demande un temps non négligeable (évalué par l’Ifip) et coûte en fournitures. Quant à l’anesthésie générale, elle demande un équipement et l’intervention d’un vétérinaire.

Laisser, au contraire, les porcs entiers présente bien des avantages : une meilleure efficacité alimentaire et des carcasses mieux rémunérées, sous condition d’un régime suffisamment protéiné.

Un double différentiel de prix entre le porc castré et entier

Problématique pour l’abatteur : en premier lieu, devoir détecter les carcasses odorantes et les écarter du circuit des viandes fraîches (ou les fumer ou retirer le gras odorant), car les odeurs de verrat sont émises à la première cuisson, ce qui peut dégoûter le consommateur. En second lieu, l’abatteur vendra des viandes mâles ayant moins de gras intramusculaire (alors que les viandes de porcs castrés sont plus grasses que des viandes femelles), le gras étant, par ailleurs, plus mou.

Certains fabricants de charcuteries cuites ou de plats cuisinés se satisferont d’une viande plus sèche (retenant moins bien l’eau) ; d’autres, en salaisons sèches, y verront des inconvénients. En effet, les fabricants de jambons secs ont besoin de gras intramusculaire et de couverture pour un bon affinage. Les fabricants de saucissons devront modifier leurs recettes. Cirhyo comme J.Carrel attendent de connaître les modalités contractuelles pour les porcs castrés chirurgicalement.

Les industriels de la charcuterie sont prêts à payer pour la viande de porcs castrés

Du côté des industriels de la charcuterie, la Fict considère un double différentiel de prix entre le porc castré et entier : d’une part, 2 à 3 euros par porc pour traiter la douleur ; d’autre part, un différentiel « zootechnique » tenant au fait qu’un porc castré valorise moins bien l’aliment, de 2 à 3 euros également. « Les industriels de la charcuterie sont prêts à payer pour la viande de porc castré », affirme Bernard Vallat, président de la Fict.

Le représentant des charcutiers industriels souhaite qu’un accord interprofessionnel soit trouvé dans le cadre d’Inaporc. Bernard Vallat, qui est vétérinaire et a présidé l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), encourage la levée des réticences à l’encontre du vaccin anti-odeur – techniquement l’immuno-castration. « C’est un vaccin, pas un traitement chimique, insiste-t-il. Il permet d’éviter une mutilation et les ONG de protection animale sont pour. »

En effet, Welfarm explique cette solution dans son dossier technique sur la castration des porcelets. CIWF France, de son côté, « promeut les alternatives à la castration chirurgicale, à savoir, soit l’élevage de mâles entiers (avec détection des carcasses odorantes à l’abattoir), soit l’immuno-castration », confirme Laetitia Dinault, responsable communication et médias, que nous avons interrogée. Cette dernière apporte une précision supplémentaire : « Nous appelons le ministère et l’interpro (Inaporc, NDLR) à soutenir les alternatives à la castration chirurgicale. Notre chargée des affaires publiques a envoyé un courrier en janvier à ce sujet. »

Gérer la traçabilité à hautes cadences

Comment évoluera le prix de la carcasse de mâle entier ? La Cooperl, qui produit une carcasse de porc sur quatre en France, et en grande majorité de mâles entiers, couvre une large partie du marché actuel. Le coût de production dépendra aussi de celui d’une alimentation spécifique (l’Ifip met à la disposition des éleveurs et de leurs organisations de producteurs l’outil d’aide à la décision SIM’Alter).

Les abatteurs, de leur côté, doivent mettre en place un dispositif de détection. Le recours au nez humain est le plus répandu, mais Patrick Chevillon, spécialiste de la question au pôle viandes et charcuteries à l’Ifip, affirme que la méthode chimique, demandant une vingtaine de minutes de préparation d’échantillons, est « très fiable ». Il voit deux adaptations nécessaires : installer un labo à l’abattoir et gérer la traçabilité même à hautes cadences.

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