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« Sachez innover avec un prix inférieur »

Xavier Terlet, codirigeant de Protéines XTC, conseille aux industriels de l’agroalimentaire d’innover rapidement dans une optique de meilleur rapport bénéfice/prix pour le consommateur.

Xavier Terlet, codirigeant de Protéines XTC. © DR
Xavier Terlet, codirigeant de Protéines XTC.
© DR

Les Marchés Hebdo : La période que l’on vient de terminer n’a pas été propice à l’innovation. Les IAA ont-elles intérêt à sortir maintenant les nouveautés qui étaient dans les cartons ?

Xavier Terlet : Si l’innovation permet d’apporter un bénéfice nouveau au consommateur, oui, elles ont intérêt à innover et à se dépêcher. De manière improbable, les familles se sont retrouvées tout à coup à cuisiner deux repas par jour. Cette période a amené de nouveaux comportements qui vont durer. On avait déjà deux France, auparavant, avec 5 millions de foyers gagnant moins de 900 euros par mois. Aujourd’hui, 12 millions de personnes sont au chômage partiel. S’ils perdent 10 % de salaire l’effet perçu est beaucoup plus important. La Banque de France parle d’un recul du PIB de 8 %, quand l’Europe table plutôt sur une baisse de 12 %, c’est colossal. On va rentrer dans une crise très importante où pour le consommateur va se poser de plus en plus la question du rapport bénéfice/prix. Selon Nielsen, aujourd’hui 80 % des consommateurs surveillent leurs dépenses et 46 % pensent que leur situation économique sera dégradée. Ainsi, si on a prévu comme innovation un sirop baie de goji, il faut peut-être attendre un peu. En revanche, il faut sortir plus tôt une innovation sur une offre qui manque vraiment.

LMH : Les forces de vente sont de nouveau de sortie, si elles présentent l’innovation prévue pour ce printemps, risquent-elles le flop ?

X. T. : Oui, elles risquent d’être mal reçues par les acheteurs qui vont mettre une pression sur les prix. Les MDD vont continuer à exploser, car elles présentent un meilleur bénéfice/prix. Les marques nationales et grandes marques nationales devront être très agiles. Ça va être difficile, mais on peut innover avec des prix bas. Sortir des steaks hachés en 80 g au lieu de 100 g pour les petits appétits, et donc moins chers, peut être une bonne idée, alors que le gaspillage est aujourd’hui très mal vécu. À l’inverse, toutes les enseignes ont vendu pendant le confinement des grands conditionnements normalement destinés au food service. Et ça a cartonné!

L’emballage retrouve ses lettres de noblesse

LMH : Quels sont, selon vous, les axes d’innovation à privilégier ?

X. T. : Les Français attendent la simplicité des ingrédients. Et avec la crainte du Covid-19, ce qui a changé, c’est qu’aujourd’hui plus simple ne veut pas forcément dire moins industriel. Un produit industriel est aujourd’hui plutôt rassurant, car contrôlé et mieux emballé. Le consommateur a pris conscience de la dangerosité du produit brut et naturel. On assiste à un changement de paradigme. Autre tendance : le fantasme du zéro emballage est aujourd’hui bien fini. L’emballage retrouve ses lettres de noblesse. Il faut innover avec le juste emballage. Le local plaît en France, alors qu’en Chine, on se méfie des petits producteurs. Attention ce phénomène est en train d’arriver : le local, oui, mais sécurisé et pas cher. Il va falloir expliquer les différences de prix et il ne faut pas exclure le premier prix. Autre leçon de la crise : l’avènement du faire soi-même avec le boom de la consultation des sites comme 750g ou de la recherche de recettes de gâteaux (+400 %). Les Français vont continuer à cuisiner, mais en ayant peu de temps, ils ne vont pas forcément utiliser que des produits bruts. Il est urgent d’innover dans le faire soi-même avec des produits préparés, déjà découpés. Autre élément qui va changer la donne : l’extraordinaire développement du e-commerce avec 2,5 millions de clients en plus pendant le confinement dont 500 000 retraités. Ça oblige les industriels à revoir leurs packagings qui n’ont pas le même rôle en rayon et sur un site marchand.

Le consommateur va avoir besoin de produits réconfort

LMH : Si vous aviez deux conseils à donner aux industriels pour innover dans cette période, que diriez-vous ?

X. T. : Sachez innover avec un prix inférieur, avec un meilleur rapport bénéfice/prix ; aidez le consommateur à faire lui-même facilement et rapidement. Et si je peux rajouter un 3e : on sort d’une période anxiogène, le consommateur va avoir besoin de produits réconfort et de convivialité.

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