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Agromousquetaires amorce une filière de blé HVE
Le pôle industriel du groupement Les Mousquetaires s’est allié à deux coopératives pour faire progresser la Haute Valeur environnementale dans la culture de blé. Un pari audacieux.
Les distributeurs du groupement Les Mousquetaires ont décidé de soutenir une nouvelle filière : le blé panifiable issu d’exploitations classées Haute Valeur environnementale (HVE). « Tout le monde s’est lancé dans l’agriculture bio tête baissée », a remarqué Yves Audo, distributeur Intermarché et président d’Agromousquetaires – le pôle industriel du groupement –, pendant une présentation à la presse de cette filière dans une ferme de l’Isère à la mi-mai.
La HVE représente pour Les Mousquetaires une enviable « troisième voie » entre l’agriculture bio et conventionnelle ; une démarche « concrète et mesurable » de réduction de l’impact environnemental, reconnue par les pouvoirs publics, conduite et montrée en exemple par des agriculteurs responsables. Une démarche certifiée, au plus haut niveau de la démarche culture raisonnée contrôlée (CRC) pour les producteurs de blé.
Elle est de surcroît plus engagée que l’agriculture biologique dans la préservation de la biodiversité et plus souple techniquement que celle-ci. Voilà, pour Les Mousquetaires, la parfaite équation, et qui colle bien à leur slogan « mieux produire pour mieux manger ».
Le logo « issu d’une exploitation Haute Valeur environnementale » n’est pas étranger aux clients d’Intermarché ; il s’affiche déjà sur neuf références de vins sous la marque Expert Club. Il est apparu début avril sur trois références de la marque de pains de la marque de distributeur La Campanière : une baguette et un pain, tous deux à base de farine sous label Rouge, et un pavé cuit sur sole.
95 centimes d’euro la baguette
Dans 1 400 grandes surfaces et points chauds Intermarché (sur un total de 1 900 implantations), une affiche et les étuis enveloppant ces produits vantent les nouveaux engagements de La Campanière. Le pain est livré sous forme précuite et congelée. Au cours du mois d’avril, les magasins et points chauds ont cuit et écoulé un volume de baguettes au blé HVE (vendue à 0,95 €) égal à la moitié de celui de la baguette conventionnelle de La Campanière (vendue à 0,85 €), appelée Constance, et double de celui de la baguette bio (vendue à 1,10 €).
Christophe Bonno, directeur général d’Agromousquetaires, attribue au pain HVE la brusque croissance d’environ 10 % des ventes de pains La Campanière au titre du mois d’avril. Cette marque, précise-t-il, représente « 55 % du chiffre d’affaires de la boulangerie de l’ensemble du groupement ». Elle sera complètement au blé HVE d’ici à 2025, telle est l’échéance.
La Dauphinoise, partenaire de choix
Cet objectif repose sur les moyens industriels des fournils d’Agromousquetaires et sur la volonté d’accompagnement agricole des « producteurs et commerçants ». La filière s’appuie pour ses débuts sur deux coopératives – La Dauphinoise (Isère) et La Tricherie (Vienne) –, la minoterie Degrange (Savoie) et sur deux fournils d’Agromousquetaires – Le Moulin de la chaume (Ardèche) et Les Moulins de Saint-Preuil (Charente).
« Nous étions plutôt en contact avec des meuniers. Degrange était un fournisseur de blé CRC ; c’est par ce biais que nous avons rencontré et travaillé avec La Dauphinoise », a confié Olivier Dumont, directeur de la boulangerie-pâtisserie, au cours de la présentation sur la ferme de l’agriculteur HVE Guillaume Simon.
Jean-Yves Colomb, président de La Dauphinoise, s’est félicité de tant d’échanges. « Cela a été un plaisir de construire cette filière », a-t-il considéré. La rémunération des agriculteurs, de 200 euros le quintal pour trois ans, est une motivation certaine.
Préparation des semis 2019
Cette filière s’est amorcée au pas de course en surmontant des difficultés de panification. Concrètement, un secteur de La Dauphinoise, situé en zone sensible, a été choisi. La coopérative a pu livrer 2 500 tonnes de blé à la récolte 2018. Cette faible quantité (d’une récolte équivalente par La Tricherie) et les variétés cultivées ont donné du fil à retordre au minotier et aux fournils, plusieurs mois de travail. « Nous avons dû adapter nos process », a relaté Rachel Rossetto, directrice d’usine au Moulin de la chaume, lors de la visite de ce fournil très technologique, complètement reconstruit après un incendie en 2014.
Le choix variétal pour les semis de 2019 se prépare déjà, dès avant la récolte de cet été. Pour La Dauphinoise, qui a une importante activité de production de semences, c’est une affaire de métier et de concertation.
Nous avons dû adapter nos process
Le soutien d’Intermarché est déterminant pour les agriculteurs HVE. Ceux-ci ont des frais d’équipement, comme les interfaces informatiques dans les machines agricoles, servant à l’agriculture de précision. En effet, les parcelles sont précisément cartographiées afin d’optimiser la fertilisation. La coopérative a aussi des frais supplémentaires, notamment de constitution de lots.
Au Moulin de la chaume, les équipes de Rachel Rossetto préparent la sortie de trois autres références HVE d’ici à la fin de l’année : un pain complet précuit, un pain cuit et un pain cru. Les farines HVE sont entreposées en big bag. À l’avenir, espère la directrice du site, elles seront livrées en silo.
La promesse de la certification
Comme indiqué sur le site Internet hve-asso.com, auquel renvoient les étuis des pains HVE d’Intermarché, la certification en Haute Valeur environnementale assure, outre l’emploi des méthodes ayant le moins d’impact possible sur l’environnement, la préservation de la biodiversité. On préserve des zones vierges de toute activité agricole : haies, arbres, petits plans d’eau, fossés, jachères et autres « corridors écologiques » permettant à la nature (faune, flore, insectes) de réinvestir le milieu.