L’avis de l'interprofession comté
« Nous avons lancé une étude stratégique pour réfléchir à l’avenir » de l’AOP comté
Les Marchés Hebdo : La filière comté est souvent citée en exemple pour sa réussite. Pourquoi ?
Claude Vermot-Desroches : La filière comté réussit, c’est vrai. Nous gagnons 12 tonnes par an sur les dix dernières années. Alors que les prix en grande distribution sont plutôt baissiers, nous arrivons à passer des hausses. Alors, pourquoi ? Les raisons sont multifactorielles. Notre premier point fort est tout simplement le fait d’être une appellation d’origine protégée avec un cahier des charges strict. Notre second point fort est le plan de régulation de l’offre mis en place chez nous depuis 1992. Troisième point fort, l’aspect artisanal de nos coopératives. 75 % des fruitières sont des coopératives. Nous avons aujourd’hui 150 fruitières contre 200 il y a trente ans, mais ce n’est pas important. Notre richesse est dans cette manière de faire. Enfin, notre mode de gouvernance est spécifique. Un producteur privé ou coopératif qui fait 100 tonnes de comtés par an n’a pas plus de poids dans la prise de décision qu’un acteur qui fait 3 000 tonnes comme Lactalis ou plus comme Sodiaal.
LMH : Pourtant, vous êtes sur le point de terminer un long travail pour modifier votre cahier des charges. Pourquoi ?
C. V.-D. : Oui, nous avons lancé une étude stratégique pour réfléchir ensemble à l’avenir, en lien avec ce qu’il se passe autour de nous, avec l’arrivée de copie par exemple, avec le développement d’acteurs sur le lait à l’herbe, sur le bien-être animal, etc. Il faut que l’on réfléchisse à notre différenciation dans ce contexte pour conserver cette valeur ajoutée dans le temps. Nous voulons conserver une longueur d’avance. Nous allons donc renforcer notre cahier des charges, autour des épandages, du nombre de litres de production à l’hectare, sur les techniques industrielles comme l’interdiction des automatisations des cuves, etc. Nous travaillons depuis 2016 sur le sujet. Au niveau des produits finis, je souhaite personnellement que l’on puisse codifier la présence du mot « comté » sur les emballages. Mais pour le moment, ce n’est pas totalement partagé.
LMH : Quand pensez-vous finir ce travail ?
C. V.-D. : Nous pensons pouvoir présenter une proposition de changement de cahier des charges en assemblée générale du CIGC au printemps prochain. Après, les étapes seront longues avec les procédures à l’Inao puis au niveau européen. Mais c’est un travail important que nous devons mener au bout. Car même si cela va bien – nous valorisons le lait aux producteurs aux alentours des 530-540 euros les 1 000 litres –, il faut bien avancer pour que cette réussite perdure.