Nitrites : pourquoi la justice relaxe Yuka contre les saucissons Auvernou ?
Le jugement de septembre 2021 condamnant Yuka a été infirmé par la cour d’appel de Limoges. L’application avait été accusée par les saucissons Auvernou de pratiques commerciales déloyales et trompeuses, ainsi que dénigrement.
Le jugement de septembre 2021 condamnant Yuka a été infirmé par la cour d’appel de Limoges. L’application avait été accusée par les saucissons Auvernou de pratiques commerciales déloyales et trompeuses, ainsi que dénigrement.
La cour d’appel de Limoges est revenue le 13 avril 2023 sur la condamnation de l’application nutritionnelle Yuka du 24 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Brive pour des pratiques commerciales déloyales et trompeuses et dénigrement dans la diffusion d’informations à l’encontre de la société Mont de la Coste. Celle-ci commercialise des saucissons secs sous la marque Auvernou qui portaient la mention « Risque élevé » sur Yuka à cause de la présence de nitrites de sodium (E250) et nitrites de potassium (E252). L’application devait verser 20 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral à Mont de la Coste.
La cour a rejeté la demande d’annulation dudit jugement de septembre 2021 tout en l’infirmant et condamne Mont de la Coste à verser à Yuka une indemnité de 20 000 euros. L’application demandait initialement 80 000 euros d’indemnités à Mont de la Coste dans ses écritures du 17 janvier 2023.
Le fabricant de charcuteries estimait par ailleurs que le terme de « pratiques commerciales trompeuses et déloyales » ne lui était pas applicable. Cette demande a été rejetée par la cour car son activité consiste à fournir « des éléments d’information sur des produits mis en vente, en relation directe avec leur acquisition », détaille la cour. Yuka se comporte ainsi « comme n’importe quelle entreprise commerciale qui vend des informations aux consommateurs pour la promotion de son application. Elle est donc soumise à la prohibition des pratiques commerciales déloyales ».
Cependant, la cour indique qu’il « ne peut être efficacement reproché » à Yuka « d’avoir commis une pratique commerciale déloyale », infirmant le jugement de septembre 2021. En effet, l’application explique son système de notation dans chaque fiche produit, dans les conditions générales d’utilisation et dans le contrat de licence utilisateur final. « Chaque utilisateur est en mesure de connaître le détail des caractéristiques des produits évalués ainsi que le choix de la pondération des notes », souligne la cour. Celle-ci ajoute que pour évoquer le risque que représente la consommation de produits nitrés, Yuka s’appuie sur des « données d’ordre scientifiques, suffisamment nombreuses et émanant d’autorités reconnues ».
Pas de dénigration, selon la cour
Mont de la Coste appelait à ce qu’il soit jugé que Yuka ait commis une faute au préjudice de ses produits de charcuterie en appelant au boycott via sa pétition demandant l’interdiction des nitrites, menée avec la ligue contre le cander et Foodwatch. La cour a estimé que cette opération relevait du droit à la liberté d’expression de Yuka et qu’elle ne constitue pas un appel au boycott exclusivement des produits vendus par Mont de la Coste.
La cour de Limoges ajoute également que l’utilisation des termes « mauvais » et « risque élevé » dans l’évaluation des saucissons secs Auvernou ne relève pas d’un dénigrement de la société qui les produit, mais comme de l’évaluation des produits que Mont de la Coste offre à la vente. L’application « alerte l’utilisateur sur les risques associés à la consommation de ce produit et participe au débat de santé publique ». Les articles scientifiques reproduits par Yuka sur son site « sont issus d’un travail de recherches sérieuses, nombreuses et constituent une base factuelle suffisante pour diffuser une évaluation de la présence des additifs nitrés dans la composition des produits alimentaires », complète la cour.