Ressources humaines
Maintenir la confiance des salariés, malgré le coronavirus
La continuité de l’activité agroalimentaire repose en grande partie sur la mise en confiance et le moral des salariés présents sur les sites de production. Sans ces critères, difficile de s’adapter au jour le jour pour les entreprises.
La continuité de l’activité agroalimentaire repose en grande partie sur la mise en confiance et le moral des salariés présents sur les sites de production. Sans ces critères, difficile de s’adapter au jour le jour pour les entreprises.
L’imprévisibilité, la méfiance des salariés et la désorganisation sont trois grands défis qu’impose la maladie Covid-19 aux industriels de l’agroalimentaire. L’imprévisibilité est d’abord celle de cette maladie : contagieuse dès les premiers symptômes et même en l’absence de symptôme. L’incubation, d’environ 5 jours, peut s’étendre à 14 jours, voire plus. La guérison totale, en moins de 20 jours le plus souvent, peut se prolonger. La méfiance des salariés peut se comprendre face au risque d’être très malade ou de contaminer ses proches, à l’injonction de rester chez soi et à la multiplication des victimes. À cette méfiance s’ajoute éventuellement le malaise de s’exposer quand des collègues sont à l’abri chez eux.
Dans la raviole, la charcuterie, la volaille
Dans la Drôme, un département relativement épargné par le coronavirus, l’industriel Saint Jean, producteur de ravioles, relève ces différents défis. « Nous faisons tout pour convaincre nos salariés : il n’y a pas d’endroit où vous êtes plus en sécurité que chez nous », expose le directeur général, Guillaume Blanloeil. Outre les consignes d’hygiène renforcées, les équipes ont été scindées en groupes restreints qui arrivent au poste avec un décalage d’un quart d’heure ; dans chaque atelier, une personne ne s’occupe que de nettoyage et désinfection (des poignées de chariot, tirettes d’ouverture des portes…) ; on n’est pas plus de dix en salles de pause, il y a des marquages au sol devant la machine à café, etc.
La prise de conscience a été précoce à Saint Jean. « Déjà trois semaines avant l’injonction de confinement, nous avions arrêté de nous serrer la main », souligne Guillaume Blanloeil. L’entreprise appelle à la responsabilité de chacun. Chaque chef d’équipe fait un point très régulier sur le fait que la sécurité de tous est l’affaire de chacun. Il rappelle qu’il ne faut pas hésiter à rester chez soi dans le doute. Et les mesures exceptionnelles sont rappelées par des vidéos en salles de pause.
Afin que les salariés en production se sentent soutenus par les personnels du siège, majoritairement en télétravail, les rencontres physiques sont maintenues. « L’encadrement passe beaucoup de temps à discuter avec les équipes. Nous sommes une entreprise encore plus à l’écoute de nos salariés », affirme le directeur général qui lui-même passe son temps entre les sites de l’entreprise. Il signale aussi que « par solidarité » des personnels de bureau volontaires viennent prêter main-forte à l’usine, en faisant par exemple des remplacements pendant les pauses. En outre, la prime défiscalisée de 1 000 euros sera versée aux présents sur les sites. Enfin, comme la période n’est pas évidente à vivre, l’entreprise a ouvert une ligne téléphonique permanente avec sa psychologue du travail.
Prise de température, dans les règles
Dans l’industrie charcutière, une part de la production doit être réorientée des produits destinés à la restauration et aux rayons découpe des GMS vers le frais emballé. Certains industriels ne le peuvent pas. « On est obligés de faire des formations rapides sur le tas. Ça demande une énergie énorme », admire Bernard Vallat, président de la Fict. Il sait que beaucoup d’entreprises charcutières prennent la température des salariés à leur arrivée sur site. Cette prise de température ne va pas de soi. Elle demande un accord d’entreprise, des salariés. Elle pose aussi « un problème légal et réglementaire », il est question de secret médical. Ce problème serait en cours de résolution, selon lui. S’agissant des tests de dépistage, Bernard Vallat considère que les offres actuelles sur le marché ne sont pas sérieuses.
Favorable à la prime défiscalisée de 1 000 euros, il partage avec les syndicats « qu’elle ne doit être versée que si toutes les mesures sont prises pour limiter les risques ».
Guide de bonnes pratiques
Dans l’abattage et la transformation de volailles, les salariés ont été sensibles aux encouragements de l’interprofession, l’Anvol. Isabelle Guillotel, déléguée générale du Comité national des abattoirs et ateliers de découpe de volailles, lapins, chevreaux (Cnadev), affirme que les salariés sont rassurés et présents (en dehors des absences contraintes). « Ils voient que les entreprises mettent tous les moyens en œuvre pour leur sécurité », explique-t-elle.
Le guide paritaire des bonnes pratiques pour le plan de continuité de l’activité (PCA), que viennent de publier l’Ania, La Coopération agricole et quatre organisations syndicales de salariés *, consacre un chapitre important à la communication et au dialogue. Le caractère exceptionnel des mesures doit être compris, et l’ensemble du personnel doit être tenu au courant des évolutions. L’entreprise doit mettre à jour son document unique d’évaluation des risques (DUER) et mettre en place une équipe d’urgence sur chaque site.