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Filière
Le foie gras a résisté à la Covid-19 et affronte l’influenza aviaire

De mal en pis, ou comme Ulysse de Charybde en Scylla, la filière foie gras est tombée en 2020 de la Covid-19 à l’influenza aviaire. Encore une occasion de rassembler ses forces, selon les dirigeants de l'interprofession.

La restauration, qui représente une bonne part des lieux de consommation du foie gras, souffre comme jamais de la crise sanitaire liée à la Covid-19 depuis un an. Mais alors que les ventes se sont redressées in extremis à la fin de 2020, l’élevage de palmipèdes à foie gras affronte depuis l’automne une influenza aviaire hautement pathogène (IAHP), plus contagieuse encore que celles de 2016 et 2017. La filière du foie gras et du magret, à travers le Cifog, son interprofession, tire les leçons de l’année commerciale 2020 si particulière et revoit la copie du pacte de sécurisation sanitaire des élevages de palmipèdes en vigueur depuis 2017.

« La restauration a été solidaire », a remercié Marie-Pierre Pé, directrice générale du Cifog à la visioconférence du 5 mars, en qualifiant d’« excellente » la fréquentation des restaurants cet été en France. Néanmoins, les ventes de foie gras ont chuté de 36 % en 2020 et 21 %, de source Fiac. Les consommateurs eux-mêmes ont été très demandeurs de produits festifs et en particulier de foie gras. Si le taux de ménages acheteurs a été en recul jusqu’au premier confinement, il a commencé à se rattraper dès le mois de mai, très timidement. Le taux de pénétration est tombé à zéro en octobre, puis il a explosé en décembre, avec l’annonce gouvernementale de la possibilité de festoyer pour la fin d’année, atteignant un exceptionnel 30,3 %.

De source Kantar, 42,7 % de foyers ont été acheteurs, un record après celui de 40,6 % de 2018. « Le foie gras a recruté de nouveaux acheteurs », triomphe le Cifog. Le magret, de son côté, « a été redécouvert grâce à nos idées recettes », se félicite Marie-Pierre Pé. Le « bilan inespéré » de la saison festive, selon Marie-Pierre Pé, vient de ce que « les ventes se sont activées au dernier moment ».

Il y a eu deux autres « effets covid » en 2020. Le plus remarquable est le succès des ventes directes qui ont bondi de 58,7 % en volume, d’après Kantar. L’autre est le recul de fréquentation des ventes en hypermarchés pendant la saison (-4,4 points par rapport à 2019), au profit surtout des supermarchés (+1,2 point/2019), du e-commerce (+1,5 %) et des enseignes à dominante de marque propre (+1,4 %). Le Cifog estime que les hypermarchés ont trop joué de prudence en réduisant leur gamme de foies gras plus que toute autre gamme de produits festifs. En conséquence visible, ils ont connu « de fortes ruptures ».

1 million d’euros d’échanges au profit de la France

Du côté de la balance commerciale, la fermeture des restaurants à l’étranger a fait chuter les exportations de foies gras crus surgelés de 24 % en volume en 2020. Les exportations de foies gras préparés ont reculé de 15 %. Au total, en valeur, elles ont reculé de 19 %. La balance commerciale est restée positive à plus de 1 million d’euros grâce à la diminution de 36 % des importations.

Le transport joue un rôle infiniment plus faible dans la transmission

L’arrivée de l’influenza aviaire a douché l’optimisme des opérateurs du Sud-Ouest, où se concentre la maladie. C’est une mise à l’épreuve particulièrement violente et localisée du pacte de sécurité sanitaire de l’aviculture établi en 2017. Deux points ont fait leurs preuves : le transport et la base de données avicoles. « Le transport joue un rôle infiniment plus faible dans la transmission », a affirmé Jean-Luc Guérin, professeur en aviculture et médecine aviaire, intervenant à la conférence. En particulier grâce aux camions et cages dédiés à l’élevage ou à l’abattage, aux lavages et désinfections et tests viraux systématiques.

Quant à la base de données, elle a fait gagner un temps précieux (un mois et demi, estime le Cifog) par rapport à la précédente épizootie et permettra aussi de redémarrer la production plus tôt qu’en 2017. Cette base a permis de prévenir les élevages en danger autour d’un foyer… sans empêcher toutefois la propagation en tache d’huile de la maladie. En effet, la course contre la montre est rendue difficile par une particularité du virus de cette année : il se transmet plusieurs jours avant l’apparition des symptômes, comme l’a souligné Jean-Luc Guérin.

Les abris pas encore généralisés

Un aspect du dispositif de sécurité à discuter est la dérogation à l’obligation de disposer d’un abri pour les palmipèdes qui sont en plein air avant le gavage. Cette dérogation concerne les élevages de taille réduite et en circuits courts, et la question devait être abordée dans le cadre d’un groupe de travail le 11 mars. Le dispositif d’euthanasie sera aussi amélioré. Il a été engorgé, soumettant des éleveurs à une attente insoutenable.

Une production équivalente à 2017

Quand les éleveurs seront-ils autorisés à repeupler dans les zones où elle est à l’arrêt ? Le Cifog escompte une reprise en mai qui engendrera celle des fabrications en août. Une hypothèse qui mène à une estimation de production annuelle 2021 de 11 519 tonnes de foies gras de canard contre 14 398 tonnes pour 2020 et 16 550 tonnes en 2019. C’est une production voisine de celle de 2017, affectée par une épizootie. Cependant, cette année devrait encore voir une consommation réduite en restauration, et des exportations en dessous de leur potentiel. Aucun risque donc, selon le Cifog, que les consommateurs de France manquent de foies gras et de magrets.

Promotions : bénéfice de la dérogation à Egalim

La saison 2020 a mis en avant « le rôle clé de la mise en avant du foie gras dans les prospectus », selon le Cifog, grâce à la dérogation individuelle des fabricants sur la loi Egalim. D’après les données Iri du 9 novembre 2020 au 3 janvier 2021, le foie gras en conserve mis en avant dans les prospectus a vu son chiffre d’affaires net de tout avantage promotionnel (net de NIP) progresser de 38 % en hypermarchés et de 150,8 % en supermarchés. Il en va de même pour le foie gras mi-cuit : les produits ayant bénéficié d’une mise en avant dans les prospectus ont gagné 21,6 % de chiffre d’affaires net de NIP en hypermarchés et 18,1 % dans les supermarchés.

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