Affecté par la crise, Terrena mise sur ses marques pour rebondir
La crise n’a pas épargné le groupe coopératif qui affiche un résultat net négatif sur l’exercice 2016. Doux a notamment souffert à l’export. Terrena déploie une stratégie de marques afin de gagner de la valeur ajoutée.
Les premiers mots d’Hubert Garaud, président de Terrena, ont donné le ton de la conférence de presse de présentation des résultats 2016 de la coopérative. « La situation du monde agricole est très très difficile, du fait de la volatilité des matières et des accidents climatiques », a-t-il exposé le 30 mars dernier à Ancenis (44). Ces « éléments exogènes extrêmement violents », évoqués un peu plus tard par Maxime Vandoni, le directeur général du groupe Terrena, ont forcément pesé sur les comptes de la coopérative. Après un excédent de 32 millions d'euros (M€) en 2015, le résultat net est négatif, à -22,4 M€. « L’impact de la crise des céréales sur ce résultat est de 15 millions d'euros », a précisé le directeur général.
Une partie, non communiquée, du résultat déficitaire tient aussi aux difficultés rencontrées par le volailler Doux à l’export. Repris en mars 2016, Doux a souffert sur le marché saoudien des baisses de prix amorcées par les Brésiliens, facilitées par la faiblesse du réal et, dans une moindre mesure, des effets de la grippe aviaire.
Investissements en hausse
Le chiffre d’affaires de Terrena témoigne également de la période difficile vécue par la première coopérative polyvalente française et ses 29 000 adhérents. Il a certes progressé de 5 à 5,2 milliards d’euros (+3 %). Mais cette hausse tient aux évolutions du périmètre, notamment au rachat de Doux, alors que la croissance organique est négative (-5,2 %). Les conditions de marché et les aléas climatiques, qui ont entraîné des baisses de récolte de 40 à 50 %, ont eu des conséquences sur la majorité des filières, en premier lieu celles du pôle amont. À noter que le marché international, qualifié d’« axe majeur de développement » par Maxime Vandoni, représente 12 % du chiffre d'affaires (CA) du groupe, à 640 M€.
L’Ebitda a également reculé, de 110 M€ en 2015, à 101 M€. Mais « il aurait été de 114 millions d'euros à périmètre constant, ce qui démontre une résilience des activités historiques », a observé le directeur administratif et financier, Olivier Miaux. Alors que la consommation de viande bovine recule en France, Elivia a gagné des parts de marché et affiche des résultats positifs depuis trois ans. Gastronome a aussi amélioré sa performance l’an dernier.
Les pôles produits carnés et volaille bénéficient de la politique d’investissement du groupe. À hauteur de 112 M€ l’an dernier, ces investissements vont encore augmenter sur 2017 et les années suivantes. « L’objectif est d’aller chercher plus de performances et se mettre à l’abri des effets exogènes défavorables. Ce qui passe par la différenciation et des outils au meilleur niveau », explique Olivier Miaux. Terrena a poursuivi son plan Ambition Céréales, qui va rénover sur dix ans et pour 130 M€ ses outils de stockage et de collecte. Dans le cadre du plan Quatr’un, la modernisation du site Elivia du Lion d’Angers sera achevée cette année. Il deviendra, pour un investissement proche des 50 M€, « un des plus grands sites de découpe européens », indique Hubert Garaud.
Après la viande bovine, Terrena va « spécialiser les outils, massifier la production et automatiser » de la même façon sur la volaille, dans le cadre du plan triennal Chick, lancé fin 2016. Afin de sécuriser son développement et d’accélérer ces projets, Terrena a fait évoluer son financement l’an dernier, levant 630 M€ via un crédit syndiqué bancaire.
La Nouvelle Agriculture, une marque transversale
Plusieurs réorganisations dans les filières ont marqué l’année 2016, en premier lieu la création de Galliance. Réunissant les activités de Gastronome et de Doux, le nouveau pôle volaille pèse 1,2 milliard d’euros de chiffre d'affaires. Il est leader national en produits élaborés et volaille bio, second en volaille fraîche et en dinde, et numéro trois du marché mondial export. L’apport de Doux permet à Terrena d’être présent sur le poulet congelé et l’élaboré et de s’ouvrir sur l’étranger. La constitution de Galliance apporte de plus une meilleure valorisation matière et des économies, supérieures à 5 M€ sur 2016.
Afin de gagner de la valeur, Galliance va miser sur la prémiumisation, l’innovation produits et une politique de marques. De ce point de vue, l’évolution est globale pour le groupe coopératif. « C’est un moment décisif pour Terrena, nous densifions notre portefeuille de marques », souligne Hubert Garaud. D’abord en faisant de la démarche Nouvelle Agriculture, entreprise en 2008, une marque à part entière. Lancée en ce mois d’avril, cette marque transversale proposera dans un premier temps 50 références en GMS, en lapin, porc, poulet et bœuf. Une gamme de légumes et de vins est annoncée pour 2018. L’ambition n’est pas qu’hexagonale : un poulet La Nouvelle Agriculture, sans antibiotique et nourri aux oméga 3, sera lancé au Moyen-Orient en septembre.
Terrena compte aussi valoriser les marques de Doux, surtout Père Dodu, « une marque patrimoine de l’agroalimentaire français », selon Hubert Garaud. Elivia et Unébio ont enfin créé Sourires de Campagne, une marque bio de viande bovine. En croissance de 15 % chaque année, le bio pèse aujourd’hui 140 M€ de CA chez Terrena. En faisant évoluer ses mix produits et en développant ses marques, Terrena « sort du rôle de faiseur de matières premières agricoles et de produits premiers prix », conclut son président, qui y voit le meilleur moyen de dégager de la valeur.
Un accompagnement des adhérents renforcé
Soumis à de fortes turbulences, les 29 000 adhérents de Terrena ont bénéficié l’an dernier d’un accompagnement soutenu de la coopérative. Elle leur a versé 11,8 M€ d’aides et retours, contre 10,2 M€ en 2015. Auxquels on peut ajouter cinq mesures d’accompagnement conjoncturel à la production pour un montant total de 7,5 M€. En réaction aux crises des céréales et du lait notamment, Terrena a multiplié les « réunions de bassin de vie », organisant plus de 500 rencontres sur le terrain avec les producteurs. La coopérative a formé l’an dernier tous ses technico-commerciaux afin de les aider à mieux réagir et intervenir dans les exploitations en difficulté. Dans la même logique de proximité, a été créé Terrena en ligne, un numéro vert sur lequel les adhérents peuvent trouver écoute et conseil.