Quels enseignements tirer du rejet du Ceta ?
Les sénateurs ont rejeté hier, au cours d’une journée de débats intenses et houleux, l’accord commercial entre l’Union européenne et le Canada.
Les sénateurs ont rejeté hier, au cours d’une journée de débats intenses et houleux, l’accord commercial entre l’Union européenne et le Canada.
Faisant le bilan des sept ans d’application provisoire du CETA, le ministre délégué chargé du commerce extérieur Franck Riester a argumenté « Ce que nous importons, ce sont des biens stratégiques, pas de la viande aux hormones ». Oui, certes le Canada n’exporte pas actuellement de viande vers l’UE. D’une part car il avait fort à faire sur les marchés américains et chinois. De l’autre, car les opérateurs n’allaient pas investir pour se mettre aux normes européennes alors que le Ceta n’était que provisoire. Mais le risque est là, et la filière bovine a su se faire entendre des Sénateurs. D’autant plus qu’on notait une certaine mauvaise foi dans les rangs de la majorité présidentielle, prompte à dénoncer des « fake news » mais prête à qualifier le traité de « positif pour les éleveurs bovins » (Emmanuel Capus).
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Une des leçons à tirer de cet échec pour le gouvernement est donc, comme le dit Pascal Allizard, rapporteur de la commission des affaires étrangères, qu’un accord sans clause miroir est « un accord anachronique ».
L’agriculture doit être considérée avec un soin particulier, des deux côtés
Un des arguments de Franck Riester pour défendre le Ceta, c’est que la filière laitière en bénéficie, « la preuve, les éleveurs laitiers canadiens en souffrent ». L’Union européenne ; qui voit la colère de ses agriculteurs, peut-elle moralement signer des traités qui mettent à mal des filières étrangères ? Ne faudrait-il pas que dans les prochains traités, la protection des filières agricoles européennes soit la priorité, mais aussi que l’on considère l’agriculture de l’autre parti ? On pense tout de suite au traité avec le Japon, qui bénéficie à notre agriculture, aux filières viande, vins, produits laitiers, sans pour autant mettre en péril la production locale.
Les clauses et mesures miroir, la clé d’un commerce international apaisé ?
Alors que les exportateurs de vins et spiritueux sont sonnés par ce rejet du Ceta, le Canada étant un partenaire de plus en plus important pour une filière elle aussi en crise, on ne peut que regretter les termes initiaux de l’accord.
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Ne faudrait-il pas reprendre les négociations, et insérer, des deux côtés de l’Atlantique, des mesures miroirs ? De manière à ne pas pouvoir importer d’aloyau aux hormones, de lentilles traitées au Sencoral, un perturbateur endocrinien interdit dans l’UE.
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Finalement, c’est la question agricole qui a fait achopper le Ceta alors que ce n’était qu’un des aspects du traité, qui doit permettre à l’UE de diversifier ses approvisionnements stratégiques, notamment en métaux et pétrole. Preuve s’il en est de la vigilance à avoir pour cette question dans les prochaines négociations.