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Nutrition & Santé se concentre sur les trois « sans »

C’est l’un des fleurons de l’agroalimentaire français. Situé à Revel, en Haute-Garonne, Nutrition & Santé affiche une santé insolente et a encore de beaux jours devant lui. Le fabricant occitan, spécialisé dans l’alimentation santé, a enregistré un chiffre d’affaires de 460 millions d’euros en 2016, et se dirige maintenant « vers les 500 millions d’euros, grâce à une croissance régulière de 8 % en moyenne tous les ans », selon Didier Suberbielle.

Le président du directoire de l’entreprise, qui s’exprimait récemment lors d’une interview en public, concentre l’expansion de Nutrition & Santé sur « les trois sans : le sans sucre, le sans viande et le sans gluten. Ce sont nos trois moteurs de croissance ». Un trio au cœur de « la transition alimentaire », dans laquelle le dirigeant inscrit l’entreprise, et à laquelle croit son actionnaire (voir encadré).

De manière très simplifiée, il s’agit de manger mieux pour soi et pour l’environnement. Et pour cela, « aller des protéines animales vers les protéines végétales, et d’une alimentation mondialisée vers une alimentation locale », détaille Didier Suberbielle. « Deux transformations qui prendront du temps à se mettre en place, mais dont notre entreprise sera l’un des principaux acteurs », assure-t-il.

Nous doublons notre capacité de burgers végétaux

Nutrition & Santé se tourne clairement vers le végétal. Son patron explique cette évolution stratégique : « Pour assurer la santé par l’alimentation, le concept d’alicament avait été tenté voilà plusieurs années… sans succès, car le consommateur veut de la naturalité. Nous avons donc évolué dans cette direction. Aujourd’hui, nous sommes à nouveau à un tournant. Notre positionnement doit aller vers le végétal, un secteur qui comme la diététique et le bio se développe sur une croissance à deux chiffres ». Le dirigeant entend donner une alternative aux flexitariens qui n’excluent pas la consommation de viande, mais la diminuent fortement. « Dans les décennies à venir, la consommation de viande ira vers du mieux, mais moins, comme aujourd’hui celle du vin », explique-t-il.

De manière générale, en misant sur « les trois sans », Didier Suberbielle veut anticiper de profondes évolutions de marché. Selon lui, les signes précurseurs sont déjà là. « À titre d’exemple, aux États-Unis, l’obésité infantile diminue tout comme les consommations de viande, de produits sucrés, gazéifiés… Nous sommes à un point d’inflexion », précise-t-il.

Croissance interne et externe

Pour mettre en œuvre ces choix stratégiques et assurer sa croissance, Nutrition & Santé adapte son périmètre. En modernisant son appareil de production, tout d’abord. Une nouvelle usine est sortie de terre à Compiègne, voilà quelques mois, pour concentrer la production de toutes les marques sans gluten du groupe. Une implantation d’une soixantaine d’employés, aux ateliers également spécialisés dans le sans lactose et le sans lait. Les technologies du sans viande et sans sucre sont installées à Revel.

« Nous y doublons actuellement notre capacité de burgers végétaux, avec un site de production unique au monde, pour rester parmi les leaders mondiaux sur ce produit. Et pour le sans sucre, une nouvelle ligne vient également d’être lancée… », détaille Didier Suberbielle. Cette activité en plein essor nécessite 50 à 70 nouvelles embauches par an, pour renforcer un effectif de 1 800 personnes à travers le monde, dont 1 000 sur le sol français.

La croissance externe est également de mise. Avec le soutien de son actionnaire, le Français fait tomber dans son escarcelle « une petite société par an, achetée entre 5 et 10 millions », confie son patron. « Plutôt que de mettre la main sur de grosses structures, nous préférons reprendre des petites entreprises que l’on peut développer et brancher sur notre force commerciale », explique-t-il. Grâce au rachat en 2013 de la société Valpiform, Nutrition & Santé a ainsi élargi son offre avec Allergo, Valpiform et Valpibio, et a pris le leadership du sans gluten en GMS en France.

Des relations « déséquilibrées »

En parallèle, son catalogue est enrichi par 300 nouvelles références par an. « C’est énorme, seulement 60 % de ces nouveautés restent en linéaires », concède le Toulousain. Mais « les rayons bios sont vastes et ne cessent de s’élargir en grandes surfaces, car le bio et la diététique sont des secteurs de plus en plus stratégiques pour les enseignes, qui demandent de plus en plus de produits », assure-t-il.

Une nouvelle usine est sortie de terre à Compiègne

Les relations avec les distributeurs n’en sont pas pour autant apaisées. Le Toulousain n’hésite pas à coiffer sa casquette d’administrateur de l’Ania pour pointer du doigt des relations « déséquilibrées ». « À cause des demandes de la grande distribution, le taux de marge de l’agroalimentaire est en chute libre ! La loi LME a complètement dérégulé les relations commerciales, et nous payons la guerre des prix à laquelle se livrent les grandes enseignes. Comment, dans ce contexte, peut-il y avoir une relation équilibrée entre quatre distributeurs, d’un côté, et 13 000 fournisseurs, de l’autre ? » s’interroge-t-il.

Didier Suberbielle dénonce « la spirale négative de destruction de valeur » dans laquelle s’est engagée la grande distribution, et « qui touche toute la chaîne ». Selon lui, le consommateur « doit accepter que l’alimentation a un prix ».

Un actionnaire « loin et riche »

Depuis 2009, le Japonais Otsuka Pharmaceutical est l’unique propriétaire de Nutrition & Santé. Leader de l’alimentation diététique et des boissons santé en Asie et des compléments alimentaires aux États-Unis (avec la marque Nature Made), ce groupe familial peut s’appuyer sur un chiffre d’affaires de plus de 10 milliards de dollars. Un actionnaire parfait : « riche et loin », comme le rappelle Didier Suberbielle, « qui n’a pas pris un euro de dividende depuis huit ans, et à l’inverse, nous a donné les moyens d’acquérir plusieurs sociétés ». Étonnant ? Pas vraiment, pour le président du directoire de Nutrition & Santé, puisque « Otsuka a racheté notre entreprise pour de bonnes raisons. Il est impliqué dans la transition alimentaire, et il croit en notre projet d’entreprise, qui n’a pas changé : assurer la santé du consommateur par l’alimentation. Notre horizon s’est élargi, et nous pouvons travailler sur du long terme ».

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