L’avis de la présidente de la commission des Affaires économiques du Sénat
« Nous allons être le juge de paix sur l’amélioration des revenus des producteurs »
Les Marchés Hebdo : Quelles propositions allez-vous formuler après les consultations menées sur le bilan de la loi Alimentation ? Et quand ?
Sophie Primas : À la différence de l’Assemblée nationale, la commission des Affaires économiques du Sénat doit faire un suivi permanent, pendant les deux ans d’expérimentation. Nous devons analyser les effets de la loi durant ces 24 mois. Mais il n’est pas exclu qu’au titre d’une première évaluation, nous faisions des propositions au cours de ce dernier trimestre, pour permettre quelques ajustements de la loi. Nous orienterons ces propositions autour des promotions, des prix abusivement bas, de la réactivité des clauses de renégociation.
LMH : Quel avis avez-vous sur l’autre mesure phare de la loi qu’a été la hausse du seuil de revente à perte (SRP) ? Pensez-vous la modifier ?
S. P. : Je n’ai toujours pas compris comment pouvait fonctionner le ruissellement de ce SRP plus 10 % sur le revenu des agriculteurs. Je ne comprends pas comment cela peut marcher. Mais, on peut dire qu’il n’y a pas eu de réelle augmentation de tarifs des produits de grande consommation, comme pouvait le laisser entendre certains, Michel-Édouard Leclerc notamment. Nous allons continuer à surveiller cela et voir s’il y a des effets économiques pervers à cette situation.
LMH : Quelques mois après l’entrée en application de cette loi, quel regard portez-vous sur ce dispositif législatif ? Pouvez-vous déjà en tirer un premier bilan ?
S. P. : La loi Alimentation a d’abord été voulue par le gouvernement pour améliorer le revenu des agriculteurs, en régulant davantage les relations commerciales. Nous allons voir en premier lieu si cet objectif a obtenu des résultats. Au-delà de ce que l’on entend sur telle ou telle filière mieux organisée, qui aurait obtenu des améliorations, nous allons être le juge de paix pour voir s’il y a une réelle amélioration des revenus des producteurs. Pour l’instant, nous ne voyons rien venir.
LMH : La loi Alimentation a prévu une ordonnance sur le changement de cadre des négociations commerciales. Des députés viennent de proposer de raccourcir le calendrier du 15 septembre au 15 décembre. Qu’en pensez-vous ?
S. P. : C’est un habillage de forme. Le mécanisme est plus compliqué. Aujourd’hui, nous arrivons à la fin septembre sans que les négociations 2019 soient terminées pour certains. Il y a quand même quelque chose qui ne va pas. C’est une situation ubuesque. Il serait bien de commencer une année civile en connaissant les règles du jeu, autant pour les marques nationales que les marques de distributeurs.