Volaille
Le poulet ECC est-il économiquement et techniquement viable en France ?
L’émergence du European Chicken Commitment à la suite de l’évolution des besoins sociétaux, va-t-il trouver sa place dans le paysage français ?
L’émergence du European Chicken Commitment à la suite de l’évolution des besoins sociétaux, va-t-il trouver sa place dans le paysage français ?
L’élevage, et notamment celui du poulet de chair élevé en claustration, est de plus en plus critiqué par les mouvements citoyens. Le cahier des charges European Chicken Commitment (ECC) est d’ailleurs né d’une coalition de vingt-huit ONG européennes, pour faire respecter de nouvelles normes plus exigeantes en matière de milieu de vie, densité ou encore de génétique utilisée. Pour François Cadudal, économiste à l’Itavi, la construction de cette segmentation du marché du poulet implique un changement de paradigme qui s’opère à la fois sur le type de produit, l’échelle géographique et les acteurs concernés.
Dans le cadre du projet Cocorico, l’économiste a présenté un travail sur les freins et leviers du ECC lors de la conférence sur les évolutions des modes de production de poulets en France pour répondre aux besoins des consommateurs et aux enjeux des citoyens, le mercredi 15 septembre au Space. Si, historiquement, les segments du marché de la volaille sont portés sur les produits frais pour les rayons des GMS et uniquement sur le marché national, la démarche ECC concernera, elle, tous les débouchés (frais, produits transformés et RHD), à l’échelle européenne.
L’ECC bien plus coûteux que le standard
Toutefois, des normes plus exigeantes sont aussi synonymes de surcoûts et de contraintes pour les acteurs. Actuellement, 80 % de la consommation française est portée par les segments entrée de gamme. Or, l’écart de prix est très important entre le premier prix ECC et le standard. Par ailleurs, la transition vers une souche à croissance intermédiaire réduit la productivité annuelle de 35 à 40 %. « Pour produire la même quantité de viande à l’échelle d’une filière, il faut un poulet standard transformé en ECC pour 35 à 40 % de surface supplémentaire alors que le rythme de croissance maximum du parc de bâtiment classique est compris entre 0,1 et 2 % par an », analyse François Cadudal.
Les coûts sont aussi plus importants pour la chaîne de transformation : l’écart de rendement matière entre une souche à croissance rapide et une intermédiaire accentue le différentiel de compétitivité économique. « L’ECC reste inadapté techniquement et économiquement sur le segment des premiers prix en GMS et des matières premières pour la transformation. Une prise en compte plus globale autour du bien-être animal en incluant l’environnement, la nutrition et l’origine serait sans doute une solution plus concrète », affirme l’économiste.
L’ECC face au label
En France, les modes d’élevage de poulets sont plus diversifiés que dans d’autres pays européens. La consommation aujourd’hui de poulet certifié label Rouge et bio (avec accès au parcours) représente près de 15 % de la consommation française, ce qui est énorme à l’échelle européenne. Au vu du contexte économique, l’ECC pourrait alors se substituer au poulet certifié dans l’Hexagone, ce qui, en matière de bien-être animal ne paraît pas être un progrès. Mais cette nouvelle certification nécessite des bâtiments neufs, donc de lourds investissements, qui devraient décourager l’amont, et ce, d’autant plus que l’incertitude sur la répartition de la valeur jusqu’au consommateur reste de mise.