L’aquaculture française doit consolider son succès
La raréfaction de la ressource halieutique stimule le marché mondial du poisson d’élevage, qui connaît des progressions record ces dernières années et représente aujourd’hui 76,6 millions de tonnes, dont 60 % sont fournies par la Chine. En France aussi, le dynamisme gagne la filière. « Nous sommes sur des tendances de consommation en progression, à la fois en volume et en valeur. Par exemple, pour la truite, première production française avec 38 000 tonnes, on comptait 15 % de consommateurs de truites fraîches en 2012, et 20 % en 2016. Et pour la truite fumée, c’était 20 % de consommateurs en 2012 et 33 % en 2016 », se réjouit Marine Levadoux, directrice du Comité interprofessionnel des produits de l’aquaculture (Cipa).
Afin de soutenir cette demande, l’interprofession mène des actions régulières auprès de la grande distribution. « Nous donnons de l’information sur les différentes espèces, les méthodes d’élevage et les garanties apportées par l’aquaculture française, et notamment grâce à la charte de qualité commune à toutes les espèces, “aquaculture de nos Régions”, mise en place en 2010 », poursuit-elle. La France, qui produit un peu plus de 52 000 t de poissons d’élevage par an, mise sur son savoir-faire et sur des marchés de niche qualitatifs.
Leader européen de la truite bio
« En moins de dix ans, la France est devenue le leader européen de la truite bio, avec une production de 2 500 tonnes, note Marine Levadoux, et nous sommes no 3 mondial du caviar, avec 27 tonnes annuelles, après la Chine et l’Italie. Ceci grâce à une jeune filière installée en Aquitaine, qui vient d’ailleurs de déposer un dossier pour obtenir une IGP. »
Les aquaculteurs français produisent également des espèces marines à hauteur d’environ 4 800 tonnes – bar, daurade, turbot, saumon, sole et maigre, y compris une petite production de bars et de daurades bios. « Pour le bar et la daurade, les volumes produits sur nos côtes ne sont plus suffisants pour combler la demande », reprend la directrice du Cipa. Ainsi, 60 % de la consommation française est satisfaite par des produits d’import, en provenance du bassin méditerranéen. C’est le principal danger qui guette l’aquaculture française aujourd’hui. Sans développement, sans volumes suffisants, les consommateurs risquent de se reporter sur d’autres produits.
« Jusqu’à maintenant, le développement s’est fait sur des sites de production existants. Aujourd’hui, il faut envisager la création de nouvelles piscicultures », martèle Marine Levadoux. Mais là se dresse une montagne de difficultés : contraintes réglementaires, durée des démarches administratives, exigences environnementales, installations coûteuses, métier difficile, risques liés aux aléas climatiques… « Le Cipa a engagé un chantier, en concertation avec l’administration, pour poser précisément le cadre dans lequel de nouvelles exploitations pourraient voir le jour », relève-t-elle. Le processus est long et les professionnels s’impatientent. « Il y a pas mal de gens qui cherchent à s’installer, mais la contrainte administrative et les démarches afférentes, qui peuvent facilement prendre jusqu’à cinq ans, en découragent plus d’un », prévient Marine Levadoux.