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Lactalis : « On est la cible de beaucoup d’attaques en tant qu’entreprise qui réussit », déplore Emmanuel Besnier

Le président-directeur général du Groupe Lactalis a répondu pendant 2h00 aux questions des députés lors d’une audition à charge et souvent laborieuse sur les pratiques de Lactalis en matière de prix du lait, l’image du groupe, son respect d’Egalim et la guerre du camembert.

Emmanuel Besnier, PDG de Lactalis, devant trois députés de la commission d'enquête sur la perte de souveraineté alimentaire, le 6 juin 2024
Emmanuel Besnier, PDG de Lactalis, devant trois députés de la commission d'enquête sur la perte de souveraineté alimentaire, le 6 juin 2024
© Assemblée Nationale

Emmanuel Besnier, président-directeur général du groupe Lactalis était convoqué ce jeudi 6 juin par la commission d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté alimentaire de la France. Dans un préambule, il a pu expliquer aux trois députés présents les enjeux auxquels est confrontée son entreprise dans le cadre d’Egalim et répondre à leurs questions. 

Les MDD dans l’angle mort d’Egalim

A l’instar de Jean-Paul Bigard la semaine dernière, mais avec un peu moins de panache, il a interpellé les députés sur les MDD (marques de distributeurs), « la notion de marche en avant doit être renforcée pour les MDD », avant de se déclarer assez satisfait de la loi Egalim, prévenant « les propositions de réforme vers un Egalim 4 sont portées par la grande distribution qui souhaite renforcer son pouvoir face aux industriels ». 

Lire aussi : Produits laitiers : « Il n’y avait jamais eu de mouvement aussi majeur vers les MDD »

Une loi de compétitivité plutôt qu’une autre version d’Egalim

Rappelant qu’un litre sur deux produits en France est destiné à l’export, et que le marché mondial est bataillé, Emmanuel Besnier a proposé « Compte tenu de la situation préoccupante de la filière laitière française, nous estimons qu’une loi compétitivité alimentaire 1 serait plus pertinente et plus constructive qu’une loi EGalim 4 pour améliorer la souveraineté alimentaire de la France ». 

« Une loi compétitivité alimentaire 1 serait plus pertinente et plus constructive qu’une loi EGalim 4  ».

Il a insisté sur la compétitivité des entreprises mais aussi des exploitations agricoles, rappelant que « la souveraineté laitière française passe nécessairement par la capacité à valoriser nos excédents sur les marchés mondiaux », alors que, depuis deux ans, notre solde commercial se dégrade.

Lire aussi : Quelle est la part des importations à Rungis en viande, volailles, produits laitiers et fruits et légumes ?

Lactalis respecte-elle Egalim ?

Une grande partie de l’audition d’Emmanuel Besnier a constitué à convaincre le député RN Grégoire de Fournas, rapporteur de la commission d’enquête, que la formule de calcul du prix du lait appliquée par Lactalis était bien dans le cadre d’Egalim. Le député semblait croire que seuls les coûts de production pouvaient être pris en compte dans ce calcul, contestant l’intégration du couple beurre-poudre. 

Lire aussi : Pourquoi les prix du beurre pourraient rester fermes

Emmanuel Besnier, toujours très calme, a expliqué à maintes reprises le cadre légal, la complexité du prix du lait, qui varie selon les saisons et c’est son directeur des affaires publiques Jérôme Breysse qui a finit par lire le texte original du code rural. Attaqué de nouveau sur les prix du lait, Emmanuel Besnier a tenté de faire comprendre qu’on ne pouvait pas comparer prix standard 38/32 et prix réel payé au producteur.

Un contrat engage sur un prix, mais aussi des volumes

« La loi Egalim (…) ça marche ! »

Finalement après ces longs échanges laborieux, le PDG a essayé de trancher, toujours sans s’emporter, « on ne peut pas imposer un prix minimum avec une obligation de volumes. Si vous souhaitez mettre un prix plancher, soit il faut qu’il soit très bas ce qui ne sert à rien, soit il faudra libérer aux entreprises la possibilité de ne pas acheter le lait ! » avant de conclure « La loi Egalim permet de tenir compte d’un certains nombres d’indicateurs, ça marche ! ». 

Lire aussi : Lactalis veut réduire sa collecte de lait en France

Lactalis, « un enfer sur terre » ?

« Ça n’a l’air de vous poser aucun problème que Lactalis soit devenu un nom qui renvoie à un enfer sur terre » assène le député RN Jean-Philippe Tanguy. « On est la cible de beaucoup d’attaques en tant que leader, en tant qu’entreprise qui réussit. Comme nous ne sommes pas une coopérative, les syndicats agricoles mettent en avant Lactalis », justifie le PDG, épaulé par Jérôme Breysse « On se fait attaquer par plein de gens qui ne nous connaissent pas ». 

« On se fait attaquer par plein de gens qui ne nous connaissent pas »

Les deux hommes argumentent, rappelant les 15 000 emplois dans la ruralité, estimant qu’ils ont bonne image dans ces territoires et expliquant que pas un éleveur travaillant avec eux n’était présent lors de l’invasion du siège il y a quelques mois. « On est un symbole, on devrait être fier d’être une entreprise qui réussit, pas se faire taper dessus en permanence » déplore Emmanuel Besnier. 

« On devrait être fier d’être une entreprise qui réussit, pas se faire taper dessus en permanence »

Lire aussi : Fabrications de produits laitiers : vers quoi vont se tourner les industriels en 2024 ?

La position de Lactalis sur la guerre du camembert de Normandie

Spécifiquement interrogé sur le sujet de l’appellation camembert de Normandie, Emmanuel Besnier estime qu’elle est due à « un acteur, qui veut absolument que la Normandie ne figure plus sur les emballages, il veut s’approprier la totalité de ce lien au terroir », or , continue-t-il « moi j’estime que tous les camemberts qui sont issus de ce terroir peuvent revendiquer l’appartenance de ce terroir ». 

Lire aussi : Camembert : un jugement du Conseil d’Etat en faveur de Lactalis et Richesmonts

Il met en avant l’écart de prix entre le camembert pasteurisé et le camembert de Normandie AOP, jugeant qu’il y en a pour deux publics, que ce ne sont « pas les mêmes produits, pas les mêmes attentes ». Avant de conclure l’audition par « On est attaché à ce que le camembert reste en Normandie, si on enlève Normandie, le camembert se fera ailleurs ».

Lire aussi : Comment le camembert a reconquis les Français

Que pèse le groupe Lactalis dans la filière laitière française ?

Selon les chiffres délivrés par son président-directeur général, le groupe Lactalis, c’est le premier groupe agroalimentaire français. Il emploie 85 000 collaborateurs dont 15 000 en France. Lactalis transforme du lait dans 50 pays et commercialise des produits laitiers dans 200 pays. Le groupe détient 67 laiteries et fromageries en France et 270 dans le monde. Lactalis a collecté 23 milliards de litres de lait en 2023 dont 5 milliards en France, auprès de 10 000 exploitations laitières dans 63 départements. Emmanuel Besnier a communiqué un chiffre d’affaires de 29,5 milliards d’euros et un résultat net de 1,45 %, ses trois principaux marchés sont, dans l’ordre, la France, les États-Unis et le Canada. Le fromage représente 40 % du chiffre d’affaires, devant le lait de consommation (19 %), le yaourt (15 %), le beurre et la crème (8 %) et les ingrédients (« environ 8 % »). 

Pour voir l’audition de M. Besnier en intégralité

 

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