La France se dote d'une norme expérimentale pour le halal
Évoquée depuis des années, la démarche est enfin devenue réalité. À compter de ce 15 septembre, les industriels de l’agroalimentaire français peuvent s’appuyer sur une norme expérimentale d’application volontaire pour apporter des garanties de maîtrise de leur production d’aliments transformés halal. Référencée XP V06-001, elle suit les principes de l’HACCP.
L’Afnor prévient d’entrée de jeu : « ce document exclut les pratiques d’abattage et ne livre aucune définition nouvelle d’ordre religieux ». « L’abattage n’est pas traité, car il n’y a pas de consensus sur le sujet », explique Nadine Normand, responsable département des secteurs agroalimentaire, santé et action sociale à l’Afnor, organisme chargé de la coordination du projet. « Certains pays acceptent l’électronarcose, d’autres pas », complète Eldjida Makhloufi, présidente de la commission de normalisation et responsable export et veille réglementaire à la Fict.
Pour autant, une norme aidant les industriels à éviter les contaminations croisées et à respecter le caractère halal des produits, en vérifiant le respect des interdits majeurs religieux définis dans les directives halal du Codex Alimentarius, devrait intéresser au départ au minimum 30 à 40 entreprises, estime-t-elle.
On veut passer à l’offensive
« Les ambassades sont sollicitées régulièrement pour savoir ce que fait la France sur le halal. En France, le marché est difficile l’idée était un peu de se reposer sur un cadre, on veut passer à l’offensive », poursuit Eldjida Makhloufi. Et ce, au moment où « chaque pays cherche à valoriser son positionnement et que l’on note une forme de protectionnisme », ajoute Nadine Normand. La Malaisie promeut ainsi à grand renfort de communication sa certification halal Jakim. Le Maroc dispose de sa propre norme nationale.
La norme française va aider l’industriel à identifier les étapes critiques qui pourraient remettre en cause le caractère halal d’une production puis lui délivrer les moyens de les délivrer : sélection des intrants, des ingrédients et des fournisseurs, information du consommateur, formation du personnel et organisation opérationnelle de la production. La norme rappelle par exemple que certains ingrédients sont par définition halal (lait, miel et œufs), recommande de prendre en compte les auxiliaires technologiques dans les discussions avec le client, indique au fabricant comme veiller à de bonnes pratiques de fabrication (via un atelier dédié, une ligne dédiée ou une fabrication alternée avec nettoyage adapté et traçabilité dédiée).
Comme toutes les normes expérimentales, ce document évoluera à la demande des utilisateurs en 2020. Il sera confirmé, mis à jour ou retiré, selon les retours d’expérience.
La genèse de la norme
L’idée d’une norme remonte à novembre 2009, date à laquelle l’Autriche voulut faire reconnaître sa norme halal au niveau européen. Une étude de faisabilité est décidée, trois pays s’opposent au champ « trop large » de la norme autrichienne (comprenant l’abattage) : la France, le Royaume-Uni et l’Espagne. En septembre 2012, la Turquie met en place un comité technique au niveau européen pour réfléchir à une norme européenne. Une commission d’harmonisation nationale est installée en France pour préparer la position française. En janvier 2016, le comité européen est dissolu faute de consensus. La France décide de poursuivre en solo sur les points de consensus et crée une commission de normalisation nationale.