La filière œuf appelle le soutien de ses clients
La filière française souhaite un engagement financier de tous ses partenaires pour accélérer sa transition vers plus d’élevages alternatifs et penser à demain.
Une poule pondeuse sur deux en élevage alternatif d’ici à 2022 tout en conservant son potentiel de production ; tel est l’objectif affiché par la filière œuf française depuis la fin 2016 via son contrat sociétal d’avenir. Un engagement qui implique le passage de 10 millions de poules vers des systèmes bios, plein air ou sol, pour un coût estimé à 500 millions d’euros (M€). Une somme à mobiliser tout juste cinq ans après des investissements estimés à près de 1 milliard d’euros après l’application de la directive bien-être européenne. Ce qui laisse très peu de marge de manœuvre à la filière, d’autant que les banques sont très réticentes, aux dires du secteur. « Les taux d’endettement sont très élevés, précise Philippe Juven, président du Comité national pour la promotion de l’œuf (CNPO), on a besoin d’être accompagné, d’avoir un coup de pouce. »
« Nous ne demandons pas d’aides spécifiques de l’État »
Malgré tout, les producteurs comptent prendre en charge ces nouveaux investissements à hauteur de 400 M€. Pour les 100 M€ restants, « nous ne demandons pas d’aides spécifiques de l’État, avance-t-on au CNPO, nous souhaitons plutôt travailler en étroite collaboration avec tous nos partenaires ».
En multipliant les annonces d’arrêt de commercialisation d’œufs de poules en cage d’ici trois à cinq ans, enseignes de la distribution et entreprises de la restauration vont toutefois plus loin que la filière et ne tiennent compte « ni des contraintes de temps ni des problématiques techniques et encore moins de l’impact économique de ce chantier », regrette-t-on au CNPO. Un contexte qui incite le secteur à demander aux enseignes de la distribution d’« aller jusqu’au bout de la logique de réponse aux attentes de leurs clients » et « d’assumer leur part de responsabilité dans cette évolution de la filière ».
L’interprofession trouve du soutien dans les résultats d’une enquête CSA menée début 2017, selon laquelle une grande majorité des Français approuve le contrat sociétal d’avenir et estime que la distribution doit laisser aux éleveurs un délai pour s’adapter et les soutenir financièrement. Ils sont aussi nombreux à se dire prêts à payer 10 centimes d’euro de plus par boîte de 6 œufs pour accompagner cette évolution de la production. En outre, l’attachement à l’origine France reste fort et doit dissuader l’aval à recourir à l’import.
Bien penser l’avenir
À cet objectif d’évolution de la production s’ajoute la volonté d’accompagner les éleveurs dans leur démarche, avec l’aide de l’Itavi. Est aussi souhaité le renforcement de la charte « pondus en France » (obligation de se conformer à la charte sanitaire, assurer une alimentation durable). Quant à l’avenir des poules encore en cage dans cinq ans, une concertation va se mettre place avec des associations de consommateurs et de défenseurs du bien-être animal (CIWF, Welfarm) pour tenter d’anticiper le parc bâtiment de demain. « On ne veut pas faire évoluer les 50 % restants sans les consommateurs, pour ne pas reproduire les erreurs de 2012. On n’a plus le droit à l’erreur », déclare Philippe Juven.