La Bolivie teste une AOC pour son quinoa
Le deuxième exportateur mondial de quinoa veut généraliser la certification bio de sa production. Un système pilote d’AOC est actuellement testé en vue d’un lancement l’an prochain.
La valeur du quinoa a fortement chuté en deux ans. On s’est mis à cultiver la « graine des Incas » dans le Wisconsin, en Andalousie et même en Anjou, tandis qu’en Bolivie et au Pérou, elle pousse en altitude, mais maintenant aussi dans les vallées. La chute du prix a été abyssale. Les importateurs européens payaient la tonne de quinoa 4 712 euros en moyenne en 2014 contre 2 400 euros cette année, selon Eurostat. L’an dernier, ce prix moyen était déjà descendu à 3 825 euros/t, pour 19 800 tonnes de quinoa achetées auprès de pays tiers par les importateurs de l’UE à 27, soit une valeur totale de près de 76 millions d’euros. Toujours selon Eurostat, de janvier à août 2016, les achats exclusivement français de graines, d’origines péruvienne et bolivienne surtout, ont déclaré des valeurs de 2 200 à 2 600 euros/tonne.
Le Pérou, 1er exportateur mondial
Les volumes importés sont stables après une hausse aussi brusque que continue depuis trois ans. L’Allemagne a importé seize fois plus de quinoa en 2015 qu’en 2012. L’Italie et le Royaume-Uni ont presque décuplé leurs achats sur cette même période, et la France est en tête du mouvement. Sans compter les opérations intra-européennes.
Face au risque d’une certaine dévalorisation du quinoa, les pays exportateurs s’organisent. La Bolivie a perdu il y a peu son rang de premier exportateur mondial au profit du Pérou où les producteurs ont réussi à obtenir de bons rendements dans les vallées. Les exportateurs boliviens font dorénavant tout pour se différencier par la qualité, faire considérer l’aliment à sa juste valeur nutritionnelle, comme une spécialité.
La Chambre bolivienne des exportateurs de spécialités andines pilote depuis cette année un système d’AOC de quinoa de Bolivie avec une dizaine de producteurs. Son lancement officiel est prévu pour 2017, selon la gérante de la Chambre, Paola Mejía. « Actuellement, environ 15 % de nos envois de quinoa vers l’Europe sont certifiés bio. Avec ce projet d’AOC, nous voulons parvenir à un taux proche de 95 % », dit-elle. « Les prix de septembre [que reçoivent les exportateurs] vont de 2 400 à 2 800 dollars », renseigne-t-elle.
Parmi les pays andins qui ont des terres aptes à la culture de quinoa, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. En Argentine, au potentiel énorme, on ignore les volumes récoltés, de l’aveu du ministère de l’Agro-industrie, et on n’exporte rien. Les semences font défaut. Dans le nord-ouest du pays, pas plus de 400 familles en cultivent, et elles obtiennent des rendements proches de 200 kg par hectare. À comparer aux 1 000 kg/ha courants en Bolivie, fait remarquer le technicien de l’INTA (équivalent argentin de l’Inra), Guillermo Aracena. « Les producteurs ne vendent même pas ensemble leur production, regrette-t-il, la seule vente collective considérable de quinoa, qui a eu lieu à Jujuy l’an dernier, fut grâce à un achat exceptionnel de 10 tonnes par le gouvernement local. » Dans tout l’Altiplano, ces jours-ci, on sème le quinoa. La récolte aura lieu en avril et mai. Les prix devraient alors sans doute encore baisser sous le poids de l’offre.