Contractualiser dans un contexte baissier
Sous le régime des quotas betteraviers, les prix du sucre en Europe ont pu s’élever fortement, comme de 2010 à 2013. Ils étaient à l’abri des soubresauts du marché mondial et retenus de baisser en dessous du prix de référence. Ils sont désormais connectés au marché mondial. Comme l’Union européenne devient structurellement exportatrice, ils vont dépendre de la capacité des producteurs à valoriser « la dernière tonne produite », comme disent les économistes. Une plus forte volatilité ne fait pas de doute dès la campagne 2017-2018 qui s’engage.
Chez Cristalco (Cristal Union), principal fournisseur des industriels français de l’agroalimentaire, les contrats de vente pour cette première campagne hors quotas se diversifient. Selon le directeur général de Cristalco, Stanislas Bouchard, ceux-ci doivent intégrer de nouveaux paramètres, comme la parité import et la parité export.
Pas une « commodité »
« Les marchés à terme du sucre coté à New York (sucre brut, ndlr) et Londres (sucre blanc, ndlr) permettent à chaque partie du contrat de fixer indépendamment leur prix de base, selon ses anticipations sur les marchés », considère-t-il. Certains clients de Cristalco choisissent la visibilité, d’autres de la volatilité. « On conclut donc à prix fixe ou indexé, ou on fixe un prix sur le marché à terme, à 3 mois, à 1 an, à 2 ans… », témoigne Stanislas Bouchard. Mais il insiste sur un point : « les utilisateurs de sucre n’achètent pas une “commodité”, mais des solutions techniques ainsi que des services. Certains ont des besoins spécifiques par site de production et même par ligne de produit ».
Cristalco répond ainsi à des centaines de cahiers des charges produits, à autant de cahiers des charges logistiques ou autres, et à toutes les demandes particulières. Le sucrier résistera à la concurrence accrue, française et allemande, par sa relation aux clients, son respect des engagements et sa logistique, sa responsabilité sociale et environnementale et bien sûr, son efficience en termes de prix, considère-t-il.
Reconstituer les stocks européens, au plus bas depuis six ans
Le marché de la campagne qui s’amorce est fondamentalement baissier. Les cours mondiaux dégringolent depuis le début de l’année. Leur chute s’amortit maintenant que les Brésiliens ont décidé de produire davantage d’éthanol. Ils ont aussi été freinés par le passage du cyclone Irma en Amérique centrale. Mais le marché reste baissier à moyen et long termes. Le sucre blanc à Londres affichait le 22 septembre 368 $/t (309 euros/t). La production européenne s’annonce exceptionnellement élevée : 20,4 Mt. L’importation de sucre roux à raffiner est découragée par une très faible « prime de blanc ».
En tablant sur une consommation ordinaire et une production d’éthanol en légère croissance, l’excédent européen serait de 2 à 3 Mt, anticipe la CGB (planteurs de betterave). L’excédent pourrait atteindre 1,1 Mt en France. Timothé Masson, chargé d’affaires économiques à la CGB, fait référence à l’observateur britannique Platts, selon qui le prix moyen au départ de l’usine pourrait être de 400 euros/t. Reconstituer des stocks européens serait utile « parce qu’ils sont au plus bas depuis six ans », relève-t-il.