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Chronique
« Clean label » et ingrédients technologiques : un sujet sensible

Afin de répondre à la demande des consommateurs en quête de denrées toujours plus saines, et moins transformées, nombre d’opérateurs cèdent à la tendance du « clean label ». Celle-ci n’est pas définie juridiquement, mais n’en reste pas moins encadrée par la réglementation.

L’étiquetage d’une denrée dite « propre » repose – a minima - sur l’utilisation d’un nombre réduit d’ingrédients, selon des recettes et procédés simples et, souvent, sur l’absence d’additifs et d’ingrédients synthétiques ou artificiels. Mais, en tant qu’initiative purement volontaire, cette notion de « clean label » varie d’un industriel à l’autre, rendant une définition unique difficilement envisageable.

Extrait végétal ou additif ?

Les autorités belges en ont, d’ailleurs, récemment fait l’expérience, ayant un temps envisagé (avant d’abandonner le projet), de définir ce concept par une circulaire (1), encadrant l’utilisation des ingrédients fonctionnels utilisés pour leurs propriétés technologiques, et réduisant de ce fait le « clean label » à « une étiquette qui ne reprend pas ou peu de numéros E ou de dénominations légales d’additifs alimentaires ». Ce point est particulièrement sensible, car il fait écho à la déclaration du Scopaff de septembre 2018, selon laquelle un extrait végétal atteignant un niveau de constituants ou de précurseurs capables de remplir une fonction technologique dans les aliments auxquels il est ajouté, est présumé être un additif. Or, bien que mentionnés dans la liste des ingrédients et donc portés à la connaissance des consommateurs, la Commission européenne a considéré que l’utilisation de tels ingrédients était trompeuse, car exempte des règles d’étiquetage spécifiques applicables aux additifs. Ce débat – sensible – est toujours en cours.

Gare à l’étiquetage abusif

En toute hypothèse, un étiquetage « clean label » abusif, pourrait toujours être sanctionné au regard de l’article 7 du règlement Inco (2) qui exige que les informations sur les denrées alimentaires soient précises, claires et aisément compréhensibles par les consommateurs et qu’elles n’induisent pas en erreur, notamment : « sur les caractéristiques de la denrée » ou encore « en suggérant que la denrée possède des caractéristiques particulières, alors que toutes les denrées alimentaires similaires possèdent ces mêmes caractéristiques, notamment en insistant particulièrement sur la présence ou l’absence de certains ingrédients ». Par exemple, un jus de fruit ne peut se revendiquer « sans colorants » et/ou « sans conservateurs », ces additifs n’étant pas autorisés dans ces produits. En France, les pratiques contraires à ces principes généraux constituent des pratiques commerciales trompeuses (3), et sont passibles d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros (4).

Aussi, contrairement à son homologue belge, la DGCCRF ne s’est pas encore risquée à essayer de définir le « clean label », dans la mesure où le corpus de règles applicables à l’information loyale et sincère du consommateur semble, pour le moment, suffisant pour encadrer le « clean label », quelles que soient les formes qu’il revêt. Cette position est partagée par la Commission européenne qui a annoncé ne pas avoir l’intention d’adopter des règles plus spécifiques concernant l’utilisation d’allégations volontaires « clean label » (5).

(1) Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire, circulaire relative aux ingrédients « clean label », 13 novembre 2019.

(2) Règlement (UE) no 1169/2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires.

(3) Article L 121-1 du Code de la consommation.

(4) Article L 132-1 du Code de la consommation.

(5) Réponse de la Commission européenne à la question parlementaire E-002600-19 (21 octobre 2019).

Cabinet Keller & Heckman

Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaires, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avocate associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est chargée de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux, auprès des industries de l’agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l’Union européenne. Caroline Commandeur, avocate collaboratrice, collabore avec l’équipe de Katia Merten-Lentz.

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