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Performance économique et internationalisation vont de pair

À l’occasion du colloque AgroFinance, organisé par nos confrères d’Agra Alimentation le 22 novembre dernier, les industriels présents – Lincet, Vandemoortele, Barilla, Solina – ont témoigné de leur stratégie à l’étranger. Compte rendu.

Il existe une corrélation entre le taux d’exportation d’une entreprise et sa performance économique, selon Laurent Bennet, directeur de l’agriculture, de l’agroalimentaire et des marchés spécialisés du Crédit agricole. « La corrélation est importante. La stratégie internationale s’avère payante et est un vrai relais de croissance », note-t-il. Selon lui, il y a trois facteurs de réussite : définir une stratégie, mobiliser les moyens financiers et se doter de moyens humains. « Les PME peuvent y arriver, tandis que les grands groupes sont ceux qui exportent le plus. Ce sont finalement les ETI qui ont le plus de difficultés à s’internationaliser », décrit-il, du fait des pressions qu’elles connaissent sur leur marché domestique.

Toutefois, pour certaines, l’international est salutaire. Didier Lincet, PDG de la fromagerie du même nom est venu le 22 novembre au congrès AgroFinance témoigner de l’importance qu’il accorde à son internationalisation. « Nos marges en France sont insuffisantes. Si nous étions restés Franco-Français, je ne serais peut-être pas là. Nos ventes à l’export me permettent de financer mes investissements, mon activité », indique-t-il.

Regrouper les forces

Alors que l’entreprise exportait aux États-Unis depuis trente ans, elle voulait aller plus loin. « À l’époque, nous manquions de vision sur la destination finale de nos produits, car nous passions par des distributeurs et des importateurs. Nous avons alors créé un GIE en 2007 (French Cheese Club, ndlr) avec cinq autres entreprises de fromages. Nous sommes sur le même secteur, mais pas concurrentes puisque nous apportons des spécialités différentes », note Didier Lincet. Elles ont ainsi financé le recrutement d’un ou deux commerciaux sur place. « Cet investissement partagé nous a permis d’avoir une action plus forte auprès de nos clients finaux et de monter des opérations commerciales communes. Depuis sa création, nos ventes ont augmenté de 50 % », indique-t-il.

Selon lui, il serait difficile de dupliquer cette méthode sur d’autres zones, notamment asiatiques, du fait de la complexité logistique à mettre en œuvre. « On a déjà réfléchi à faire la même chose sur d’autres zones. Les États-Unis ont bien fonctionné, car le marché est bien structuré. Le marché doit être mature, il me semble, pour construire quelque chose », précise-t-il. À moyen terme, l’objectif de la Fromagerie Lincet est de réaliser 40 % de son chiffre d’affaires à l’export, contre près de 30 % à l’heure actuelle.

Connaître le marché

Tous ont souligné l’importance de connaître le marché et d’y aller pas à pas. « On entre d’abord dans un pays par l’exportation grâce à notre équipe export installée en Belgique », explique Jean Vandemoortele, président du groupe belge du même nom, « si cela se développe bien, on passe à la phase supérieure en installant une équipe sur place afin d’étudier le marché en profondeur. Si nous considérons avoir des atouts par rapport à nos concurrents, on ira encore plus loin ». En Pologne par exemple, le groupe a acheté une petite entreprise en 2007 pour construire une position sur le marché. Il vient de mettre en service une nouvelle usine à Kutno il y a deux mois pour un investissement de 50 millions d’euros.

Aux États-Unis, le groupe a également ouvert un bureau commercial. « D’abord, nous investissons dans les personnes. Si les choses se passent bien, il n’est pas exclu que nous réalisions un investissement sur place ou une acquisition », confie-t-il. Le groupe italien Barilla considère également important de bien connaître les spécificités du marché pour s’y lancer et adhère à l’idée d’investir dans les moyens humains. « Il est important d’avoir quelqu’un qui connaisse très bien le marché. Si vous voulez aller au Brésil, il faut un Brésilien. Nous considérons que nos salariés sont les ambassadeurs de la marque pour parler du produit », estime Giangaddo Prati, directeur financier de Barilla. La connaissance des marchés cible permet d’adapter son offre aux attentes des consommateurs locaux.

Adapter l’offre

L’adaptation semble être un prérequis. Le directeur financier de Barilla a notamment pris comme exemple le non-intérêt des Brésiliens pour les pâtes au blé dur. « Le Brésil est un important marché pour les pâtes, mais le blé dur ne représente que 3 % du marché. Si on avait suivi cette stratégie, cela n’aurait pas marché. Vous devez adapter l’offre aux habitudes des consommateurs et considérer ce qu’ils aiment. On est également en train de se lancer dans le secteur de la boulangerie. C’est un combat à venir », confie-t-il.

En Russie, le groupe italien avait commencé à développer son activité de boulangerie dans les années 2000, « mais on a découvert que le marché des pâtes était plus intéressant. Nous avons donc changé de stratégie. Il faut être résilient et apprendre de ses échecs », ajoute Giangaddo Prati. La Russie a également été un marché difficile pour le groupe Solina. « L’international est parfois plus dur. Nous avons tout essayé en Russie. Nous adoptons maintenant une autre stratégie en installant une équipe locale et en construisant un site de production sur place », explique Laurent Weber, président-directeur général de Solina. Le groupe, qui a bénéficié d’un cinquième LBO (leveraged buy out) avec la société d’investissement Ardian France en 2015, va ainsi construire une usine de production à Moscou à partir de la mi-2017.

Et l’Afrique, intéresse-t-elle ?

L’Afrique pourrait-elle être la prochaine Asie ? Pour Barilla, ce continent est sa seconde priorité après l’Amérique du Nord et l’Amérique latine. « Nous sommes présents en Égypte, en Algérie, au Maroc, en Libye. Il y a des marchés possibles. C’est notre seconde priorité », précise le directeur financier de Barilla. La Côte d’Ivoire pourrait être un pays également à surveiller. Ce pays a enregistré « une croissance forte en 2015 pour la sixième année consécutive. Carrefour a ouvert son premier magasin récemment. Il y a des opportunités pour demain ou après-demain », indique de son côté Christophe Monnier, chef du département Agrotech de Business France.

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