Libre-échange UE-MERCOSUR : la filière inquiète
Pour la première fois en 2003, l’Union européenne est importatrice nette de viande bovine. Cette situation inédite s’explique par une baisse continue de la production (-3 % en 2003, selon les données de l’Institut de l’Elevage), liée à la diminution du cheptel, ainsi qu’à une légère progression de la consommation, qui retrouve les niveaux d’avant crise.
Libre-échange avec le Mercosur : mise en garde
Face à ce déséquilibre, la Communauté a donc largement importé (+8%, soit 515 000 téc) et n’a effectué qu’une pression minime sur le marché mondial (477 000 téc exportées) en 2003.
Cette nouvelle donne n’est pas sans inquiéter les représentants de la FNB, réunis la semaine dernière à Metz, à l’occasion de leur assemblée générale. Les négociations sur le projet de libre-échange entre l’UE et le Mercosur sont en effet relancées, et un accord devrait être trouvé avant la fin 2004.
À ce sujet, Pierre Chevalier, président la FNB a alerté Hervé Gaymard, ministre de l’Agriculture, sur les dangers d’un principe de zone de libre-échange pour le domaine agricole, et plus particulièrement pour le secteur de la production bovine. Les structures et les coûts de production de ces pays leur confèrent une compétitivité sans rapport avec celle de l’Union.
Les chiffres brésiliens sont à ce titre sans équivoque. Un cheptel de 168 millions de têtes en 2002 (source : Institut de l’Elevage), une forte progression de la production (7,15 millions de tonnes abattues en 2002, contre 5,2 millions il y a 6 ans) mais surtout un coût de revient de l’ordre de 7 euros/kg du filet (soit 11 à 12 euros/kg «rendu UE», contre un prix de gros européen de l’ordre de 16 euros/kg) : de tels résultats expliquent facilement la croissance exponentielle des exportations (1 million de tonnes en 2002 contre 400 000 tonnes il y a 6 ans). La compétitivité du pays a été de plus renforcée par la dévaluation de réal et la revalorisation de l’euro.
Plus généralement, les exportations du Mercosur, zone commerciale regroupant le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay, ont pu, face à la moindre compétitivité européenne, gagner des parts sur le marché mondial.
En premier lieu, les envois vers l’Union européenne ont progressé de 4 %, principalement à cause de la forte augmentation des exportations brésiliennes (+22 %), au détriment de l’Argentine et du Paraguay. Mais d’autres marchés, perdus à la suite de l’ESB, ont également été conquis : le marché russe, vers lequel les exportations ont été doublées, ainsi que les marchés du Proche et Moyen-Orient.
A côté du Brésil, d’autres pays émergent au sein du Mercosur. L’Uruguay, après deux années de fermeture suite à la fièvre aphteuse, a pu en 2003 reconquérir deux marchés rémunérateurs : les Etats-Unis et le Canada.
Un marché mondial amené à évoluer
Toutefois, la zone pacifique risque fort d’être perturbée par l’ESB découverte dans ces deux pays, et les mesures d’embargo prises par le Japon, la Corée du Sud et 30 autres pays clients des Etats-Unis sont de nature à changer la donne du marché mondial.
Autre point à considérer pour établir des prévisions pour 2004 : au sein de l’UE, l’arrivée des PECO ainsi que le probable arrêt du programme britannique d’élimination de la consommation humaine d’animaux de plus de 30 mois.