Boissons
Kerisac revient à la tradition pour ses 100 ans
La cidrerie de Guenrouët, née en 1920 en Loire-Atlantique, passe 80 % de ses recettes en pur jus. Un saut qualitatif qui valorise le travail de ses trente-huit producteurs partenaires situés en zone IGP Bretagne. Reportage.
Comme chaque année, le ballet des camions apportant des pommes à la cidrerie Kerisac, qui occupe 3 hectares au cœur du bourg de Guenrouët (Loire-Atlantique), a démarré en septembre et s’étirera jusqu’à fin novembre. Trente-huit pomiculteurs situés en zone IGP Bretagne vont apporter entre 5 000 et 6 000 tonnes de fruits qui seront nettoyés, broyés, pressés, soumis à fermentation, assemblés et conditionnés en 10 millions de cols, soit 5,5 millions de litres. Mais, alors que l’année s’annonçait joyeuse dans la célébration des cent ans de la cidrerie, l’heure est à la digestion des effets de la première vague de la Covid-19. « Nous avons un peu trop de stocks de report », confie Laurent Guillet, directeur commercial et arrière-petit-fils du fondateur de l’entreprise Edmond Guillet.
Numéro trois Français du cidre, Kerisac, propriété du groupe coopératif Agrial, a subi de plein fouet, comme ses confrères, la crise sanitaire. Durant le confinement, les ventes en GMS (55 % du CA) affichaient une baisse de 20 %, tandis que celles au réseau CHR (35 % du CA) étaient à l’arrêt. « Le chiffre d’affaires, de 10 millions d’euros en 2019, devrait subir une baisse de 10 % sur l’exercice », indique Laurent Guillet. Seul le bio, qui représente près de 10 % de la production en cidre bouché, a progressé durant la période.
400 000 euros investis
Kerisac, qui prévoyait un lancement en fanfare de sa gamme pur jus pour ses cent ans, a dû opérer dans la discrétion et sans la présence de ses forces commerciales sur le terrain. En passant progressivement 80 % de ses recettes en pur jus, obtenu après un unique pressage, le cidrier a choisi de revenir à la tradition et de valoriser le caractère des douze variétés de pommes, certaines très anciennes, travaillées par ses producteurs. « Dans les années 1950, on consommait dix fois plus de cidre. La matière première n’était pas suffisante. Faire une seconde presse et ajouter de l’eau est devenu une pratique courante », rappelle Laurent Guillet. En cave, la maître de chai Marion Dubarry veille à réaliser les meilleurs assemblages.
Avec les purs jus, on apporte un maximum d’arômes
« Avec les purs jus, on apporte un maximum d’arômes », apprécie-t-elle. Afin de faire évoluer sa gamme, Kerisac a acquis une nouvelle presse à pistons Bucher, au rendement plus élevé. Le taux d’extraction de pur jus passe ainsi de 72 % à plus de 80 %. En y ajoutant sept nouvelles cuves, l’investissement se monte à 400 000 euros. Le prix de vente des bouteilles pur jus a augmenté de 10 à 12 %, une hausse insuffisante aux yeux de Laurent Guillet. « Nous sommes loin de ce qu’on devrait être en valorisation de produit. Le cidre a la plus faible marge opérationnelle des liquides », regrette le dirigeant.
Kerisac revient à des recettes traditionnelles sur d’autres références, comme le Poiré, produit avec des poires à cidre, qui remplace le Cidre et poire, à base d’arômes. La société compte aussi faire du jus de pomme un relais de croissance et passer de 1 % à plus de 5 % du chiffre d’affaires sur ce produit. Dans la dynamique de ces nouveautés, Laurent Guillet espère en 2021 revenir au niveau de 2019 qui avait été une année de croissance.
Une charte RSE finalisée
Après cinq ans de travail, Kerisac a terminé cette année sa charte RSE, élaborée « afin de respecter les hommes et les territoires », décrypte Laurent Guillet. Un cahier des charges amène les pomiculteurs à raisonner leurs interventions dans les vergers grâce à des outils d’observation et à mettre en place des méthodes alternatives respectueuses de l’environnement : introduction d’insectes pollinisateurs dans les vergers, de moutons pour l’entretien des zones enherbées… Le cidrier s’engage lui à accompagner les investissements de ses producteurs. Il met à leur disposition un technicien verger qui aide à la plantation, estime la récolte en amont ou encore accompagne les pomiculteurs vers la conversion au bio.