témoignage
Œuf : « L’ovosexage m'inquiète plus que de la grippe aviaire », estime le président de Saint Jean
« L’approvisionnement en œuf est problématique depuis février-mars 2022. Cela s’est accéléré fin 2022. À fin mars 2023, les cours étaient encore au plus haut. C’est du jamais vu sur l’œuf. Nous avons pu respirer un peu grâce, notamment, à notre fournisseur Deroux qui met 130 millions d’œufs sur le marché, dont 80 % en œuf coquille et 20 % à la casserie. Nous avions fait l’acquisition de cette entreprise pour éviter de perdre un acteur sur les œufs label Rouge qui nous servent pour nos ravioles IGP. Il a couvert une grande partie de nos besoins. Il a notamment signé de nouveaux contrats pour des bâtiments “plein air” avec des éleveurs partenaires. Il a habituellement une activité de négoce quand les volumes sont importants, mais là, clairement, cela n’a pas été le cas. Il a eu 10 % de volume en moins en 2022 sur notre production. Deroux a privilégié Saint Jean et a dû rompre avec des clients. Même si nous avons gardé deux fournisseurs complémentaires, Samo et Ovoteam, qui n’a pu certaines semaines nous livrer que 3 tonnes sur 10, nous avons donc dû aller voir d’autres acteurs de la filière, Socovo, Atlantic Ovo, Gelin, etc. Nous sommes allés voir un peu tout le monde. On est quand même passés très très près de la correctionnelle. Nos acheteurs travaillaient d’arrache-pied pour faire face à cette situation. Nous avons aussi dû faire des choix en matière de fabrication, en baissant les promotions, en limitant les livraisons pour certains clients, en diminuant nos fabrications de quenelles. Il y a 30 à 35 % d’œufs dans nos quenelles, si les œufs prennent 50 centimes tous les six mois, ce n’est pas gérable, et nos clients n’accepteraient pas. On a dû couper certains clients durant trois mois, parfois six, parfois définitivement même. D’autant plus que nous restons sur notre stratégie d’approvisionnement 100 % origine France, et au sol, plein air ou bio. Revenir aux cages n’aurait aucun sens alors qu’elles vont être interdites en 2025 chez nos clients. Il faut savoir tenir malgré la tempête. Finalement, je suis plus inquiet de l’ovosexage et des distorsions de concurrence qu’il va y avoir avec d’autres pays européens qui ne vont pas l’appliquer que par la grippe aviaire. L’ovosexage va augmenter les coûts de 15 % en France et nos concurrents vont aller s’approvisionner en Espagne ou encore en Pologne. »