Marché mondial
Grandes manœuvres dans l’industrie de la viande outre-Atlantique
Cette année, le groupe brésilien Marfrig s’est recentré sur la viande bovine, ayant cédé Keystone Foods à l’Américain Tyson Foods. In fine, deux stratégies visant la valeur ajoutée et l’internationalisation. Panorama des récentes opérations du secteur.
En août dernier, l’Américain Tyson Foods, un des géants mondiaux de la viande (avec 38,3 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2017) a conclu un accord définitif avec le groupe brésilien Marfrig afin d’acquérir auprès de ce dernier la société Keystone Foods aux États-Unis et dans le monde, ceci à l’exception d’une usine de hamburgers. Prix de la transaction : 2,16 milliards de dollars. Les usines achetées par Tyson Foods sont situées dans le tiers est des États-Unis ainsi que sur la côte est du continent asiatique et en Australie.
Keystone Foods est avant tout le fournisseur majeur de nuggets de volaille aux chaînes de restauration comme McDonald’s. La société affiche une production de 2 milliards de tonnes de viande de volaille, 300 millions de tonnes de viande bovine et 2,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires. La pépite était recherchée par d’autres opérateurs mondiaux de la viande : Cargill, Cofco, China Invest Corp et George’s étaient sur les rangs en juin dernier. Les motifs de Tyson Foods à cette acquisition sont de plusieurs ordres : fournir la restauration américaine en produits à valeur ajoutée, mais aussi l’expansion en Asie et mieux exporter en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. Cette reprise doit être effective en 2019.
Tyson Foods, un géant polyvalent
Tyson Foods est un géant polyvalent : géant de la viande bovine (130 000 têtes par semaine) et de la volaille (35 millions/sem.), dans une moindre mesure – mais très relativement – du porc (424 000/sem.). Il réalise aussi 20 % de son chiffre d’affaires en produits transformés. Il se présente sur son site Internet comme un chef de file du développement durable. En août dernier, il a lancé la licence « progressive beef » : des bonnes pratiques de bien-être animal et l’usage raisonné des antibiotiques, dont la vérification est faite trois fois l’an par un tiers. La marque de viande de boucherie Open Prairie garantit une alimentation végétale, naturelle et l’absence d’hormone. La marque de poulets Tyson est sans antibiotiques.
Marfrig se recentre
Le cédant de Keystone Foods, Marfrig, se recentre visiblement sur la viande bovine. À noter qu’il conserve dans la cession une grande usine de burgers dans l’Ohio (91 000 tonnes fraîches et surgelées, de source Meat & Poultry et Meatingplace). En juin dernier, Marfrig a acquis 51 % de participation dans la société américaine National Beef, pour 969 millions de dollars. Cette acquisition de National Beef va permettre à Marfrig « d’exporter sur plus de quarante marchés export, dont le Japon où les exportations brésiliennes de viandes bovines sont actuellement interdites », selon un communiqué du groupe. Par ailleurs, Marfrig va construire au Brésil, dans la région du Mato Grosso do Sul, une nouvelle usine de burgers de 20 000 tonnes annuelles.
Le groupe brésilien réalisera potentiellement 10,5 milliards de dollars après la vente de Keystone et l’acquisition de National Beef. Marfrig avait commencé à se désengager de la volaille en 2015, en cédant le groupe irlandais Moy Park, pour 1,5 milliard de dollars, ainsi que sa filiale avicole brésilienne à son compatriote JBS.
Nous nous efforçons de créer de la valeur
En outre, Marfrig entreprend de se diviser structurellement en deux entités : l’Amérique du Nord, avec à sa tête le PDG de National Beef Packers, Tim Klein, et l’Amérique du Sud. Le 3 septembre, il a annoncé la nomination de son nouveau PDG, Eduardo Miron, qui a orchestré la vente de Keystone et l’acquisition de National Beef en tant que directeur financier. « Nous nous efforcerons de créer de la valeur dans toutes les dimensions de l’entreprise, a déclaré Eduardo Miron, nous voulons être reconnus comme une entreprise durable pour notre gestion financière, pour les rendements que nous offrons aux actionnaires et aux investisseurs et pour nos relations avec les producteurs de bétails, les employés, les clients et les consommateurs. »
JBS, toujours actionnaire de Moy Park
En Europe, JBS Friboi est le seul géant brésilien présent, à travers Pilgrim’s Pride, leader américain du poulet. En effet, Pilgrim’s Pride faisant partie de JBS a racheté en 2017 Moy Park au groupe JBS lui-même. JBS, à l’origine spécialiste de la viande bovine, a graduellement progressé dans la volaille, d’abord en reprenant la branche brésilienne de Doux, puis ses branches brésilienne et mexicaine à Tyson Foods, ainsi que Pilgrim’s Pride. Enfin, JBS avait repris en 2015 Moy Park à Marfrig. Moy Park est le grand éleveur et abatteur de poulets britannique. En France, c’est un fournisseur de produits pour la restauration : schématiquement des produits élaborés et PAI de volaille dans les Hauts-de-France et le bœuf dans le Centre (anciennement McKey). Sur ses 51 milliards de chiffre d’affaires (2017), JBS Friboi en réalise 5 % dans l’Union européenne.