Chronique
Encadrement des promotions : rappel du cadre
La loi Egalim a introduit une expérimentation de deux ans visant à encadrer la promotion des produits alimentaires et à relever leur seuil de revente à perte. Rappel des grandes lignes des mesures mises en œuvre.
Pendant une période test de 2 ans à compter de début 2019, les produits alimentaires (et les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie) font l’objet de deux mesures « structurantes », en application de la loi Egalim du 30 octobre 2018 (loi destinée notamment à une meilleure répartition de valeur entre fournisseurs et distributeurs) et de l’ordonnance rendue le 12 décembre 2018 en application de cette loi. D’une part, le seuil de revente à perte concernant ces produits est relevé de 10 % et, d’autre part, les promotions portant sur ces produits sont limitées, à la fois en valeur et en volume.
Concernant le relèvement du seuil de revente à perte, il avait été dit lors des états généraux de l’alimentation de 2017, que certains produits alimentaires étaient revendus à des prix inférieurs à leur coût total par des enseignes de la grande distribution qui n’incluaient pas les coûts de distribution dans leur calcul de ce seuil. D’où cette mesure. Mais elle risque évidemment d’avoir un effet inflationniste important sur le consommateur (que l’Autorité de la concurrence a chiffré entre 0,6 et 4,5 milliards d’euros sur 2 ans, soit 10 à 78 euros par an et par ménage).
Quoi qu’il en soit, c’est surtout le second sujet de l’encadrement des promotions qui mérite l’attention. Désormais, tous les avantages promotionnels « immédiats ou différés ayant pour effet de réduire le prix de vente au consommateur » sont limités. Tout d’abord « en valeur » : il est maintenant interdit d’accorder une réduction supérieure à 34 % du prix de vente du produit au consommateur, ainsi que de vendre au même prix une quantité du produit augmentée de plus de 34 % (ce seuil de 34 % a été prévu pour que les opérations qui consistent à offrir un troisième produit pour deux produits payants soient toujours autorisées ; en revanche, il est désormais interdit de proposer un produit offert pour un produit payant).
Guide d’interprétation de la DGCCRF
Comme ce premier encadrement n’aurait pas permis à lui seul d’empêcher la multiplication des opérations promotionnelles, un second encadrement dit « en volume » a été ajouté. Le texte prévoit ici que les avantages promotionnels, qu’ils soient accordés par le fournisseur ou par le distributeur, ne pourront pas excéder 25 % « du chiffre d’affaires prévisionnel fixé par la convention prévue à l’article L.441-7 du Code de commerce », c’est-à-dire la convention « unique » conclue entre le fournisseur et le distributeur (qui peut désormais avoir une durée comprise entre 1 et 3 ans).
Ces mesures sont censées améliorer les relations entre les fournisseurs et les distributeurs, en mettant un terme à la « surenchère promotionnelle » à laquelle les distributeurs sont aujourd’hui soumis, qui les oblige à vendre à prix bas, et donc à acheter à prix bas auprès de leurs fournisseurs (s’ils entendent conserver des marges équivalentes).
Amendes potentiellement lourdes
Si l’intention est louable, les premières difficultés d’application apparaissent déjà, notamment parce que les opérateurs n’interprètent pas tous de la même façon le texte (il existe par exemple un débat sur la question de savoir si certaines techniques de cagnottage entrent ou non dans le périmètre des opérations promotionnelles encadrées par le texte). La DGCCRF vient toutefois de publier, en date du 5 février, le guide d’interprétation qu’elle avait annoncé et qui devrait permettre de clarifier les choses, même si les opérateurs sont déjà très avancés dans leurs négociations 2019.
S’agissant de mesures expérimentales, un bilan de leurs effets concrets devra être dressé et remis au Parlement avant le 1er octobre 2020. Il faut cependant savoir que le non-respect du dispositif peut d’ores et déjà être sanctionné par des amendes administratives potentiellement lourdes, d’un montant de 375 000 euros.
Le cabinet Racine
Racine est un cabinet d’avocats indépendant spécialisé en droit des affaires, qui regroupe plus de 200 professionnels du droit dans sept bureaux (Paris, Bordeaux, Lyon, Marseille, Nantes, Strasbourg et Bruxelles), dont 30 associés et 70 collaborateurs à Paris. Valérie Ledoux, associée et co-managing partner du cabinet, y traite des questions relatives à la concurrence, la distribution, aux contrats et à la propriété intellectuelle et industrielle, auprès de grandes entreprises, notamment dans les secteurs de l’agroalimentaire, de la distribution, du luxe, du e-commerce et des médias. Avocate au barreau de Paris et de Bruxelles, elle est membre de l’Association française d’étude de la concurrence et membre de l’Association des avocats pratiquant le droit de la concurrence.
Racine - 40, rue de Courcelles - 75008 Paris - www.racine.eu