Bien-être : il aime ses truies, l’éleveur Schweitzer
L’expérience hors du commun d’un éleveur de porc alsacien a fait forte impression, mercredi devant l’Association française de zootechnie (AFZ). Thierry Schweitzer est venu témoigner sur « la relation homme animal et le bien-être des animaux d’élevage», thème d’un colloque organisé à Paris. Il a expliqué son travail avec des associations de consommateurs et de protection des animaux, présenté sa marque de viande et de charcuterie. « Ma motivation au départ n’était pas de veiller au bien-être animal» a-t-il indiqué d’emblée. « L’idée est utopique. Si un élevage est mal mis en œuvre, le bien-être animal n’existe pas. »
Avant de s’installer en 1998, il réfléchit au moyen de faire accepter socialement son métier. Qu’est-ce qui est le mieux : élever 1 000 truies en bâtiment fermé avec des capitaux extérieurs ou pratiquer un élevage sur paille en bâtiment ouvert ? La deuxième solution lui semble préférable. Son « choix éthique » génère des surcoûts de production, d’environ 0,15 à 0,23 e par kg.
Il décide alors de trouver un mode de vente particulier. L’éleveur prend une double casquette : patron d’une entreprise de commercialisation de viande et de produits de charcuterie. Trouver des appuis constitue une autre étape pour s’en sortir. Il se tourne vers des associations de consommateurs et de protection des animaux. L’idée lui est venue en apprenant à la télé qu’une pétition circulait en Alsace pour dénoncer l’élevage industriel.
Un cahier des charges est élaboré en partenariat avec ces associations locales. Deux lignes directrices sont adoptées. L’une a trait au bien-être (« le terme me gêne », a-t-il avoué, refusant certainement de passer pour un idéaliste). L’autre concerne l’alimentation.
L’élevage est réalisé dans des bâtiments ouverts, sur paille, avec des surfaces importantes. Les 250 truies sont libres de leurs mouvements pour la mise bas. La queue des porcelets n’est pas coupée et leurs dents ne sont pas limées systématiquement. Concernant l’alimentation, les matières premières utilisées proviennent de filières tracées non OGM. Les farines animales, y compris celles de poisson, sont proscrites dès 1998. Nourrir les porcelets sans soja, sans farines de poisson, ne va d’ailleurs pas sans poser des problèmes techniques. Aucune supplémentation n’est pratiquée, à tous les stades de l’élevage.
Thierry Schweitzer est aujourd’hui propriétaire d’une marque à son nom. Six autres éleveurs le suivent dans sa démarche. Les fermiers de l’Est, société basée à Schleithal (Bas-Rhin), effectuent la vente des produits en grandes surfaces. Des dépliants sont distribués, dans lesquels les méthodes d’élevage sont décrites, avec la caution de la SPA. « Aujourd’hui, je remercie les associations », a-t-il déclaré. « Je me sens très à l’aise dans mon élevage. Sans elles, je n’aurai jamais osé élever des truies libres en maternité. L’investissement de 610 000 euro représentait un risque économique important. »