Œufs bio : du surplus à la pénurie ?
Le marché de l’œuf bio, fragilisé par la crise des produits biologiques, semble changer de ton depuis l’été. L’offre n’est plus suffisante pour satisfaire la demande.
Le marché de l’œuf bio, fragilisé par la crise des produits biologiques, semble changer de ton depuis l’été. L’offre n’est plus suffisante pour satisfaire la demande.
Erratum : l'évolution de la réglementation est espérée mais incertaine, le dernier paragraphe a été corrigé en ce sens
Manque-t-on vraiment d’œufs bio ? Plusieurs opérateurs jugent le marché très tendu depuis plusieurs semaines, et rapportent des difficultés à répondre à la demande des centres de conditionnement comme des industriels.
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La production d’œufs bio en chute libre
Le marché de l’œuf bio a été le premier indicateur de la crise du bio, avec un marché déséquilibré dès le printemps 2021. L’offre progressait beaucoup plus vite que la consommation. Depuis, sous l’effet de l’inflation notamment, les achats des ménages ont reculé. Les producteurs se sont adaptés et la France est passée de 9,19 millions de poules pondeuses bio en 2022 à 8,21 millions en 2023, selon l’Agence Bio.
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Baisse du nombre d’élevages de poules bio
Alors que la France comptait 2 678 élevages de poules pondeuses bio ou en conversion en 2022, ils étaient 47 de moins en 2023. Un recul qui paraît certes léger (-1,8 %) mais qui est le premier jamais enregistré dans la filière. Le nombre de conversion a continué de chuter en 2023, comme en 2022.
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Baisse de la production au sein des élevages bio
A cela s’ajoute un recul de la productivité des poules pondeuses bio. Tout a commencé avec le nouveau règlement bio, entré en vigueur en janvier 2022, qui obligeait à passer de 95 % à 100 % d’aliment bio. Selon les choix des fabricants, les poules entraient en ponte plus tardivement, le calibre des œufs s’amenuisait, avec moins d’œufs conditionnables (M ou L).
« On a un empilement de contraintes en ce moment »
Les ajustements ont été complexes, et le sont toujours aux dires des opérateurs. « On a aussi de nouvelles contraintes puisque les poulettes que nous avons actuellement sortent alors que ce n’était pas le cas auparavant à cause de la grippe aviaire », explique un opérateur, estimant que c’est une des causes de la baisse de production actuelle. « On a un empilement de contraintes en ce moment, avec aussi des problèmes de qualité de l’aliment bio », nous précise un autre, expliquant avoir dû anticiper des réformes. A noter aussi quelques cas de salmonelles dans des élevages bio. Dans ce contexte complexe, l’offre d’œufs bio recule, et qui plus est de manière imprévue.
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La baisse de la demande en bio ralentit
Les volumes d’œufs bio achetés par les ménages en GMS ont sérieusement décroché depuis deux ans. Ainsi, en cumul annuel mobile (CAM) à fin août 2024, les achats étaient 2,2 % sous leur niveau du CAM aout 2023 et 6,7 % sous leur niveau de CAM août 2022, selon le baromètre exclusif Circana pour les Marchés publié dans votre quotidien du 11 septembre. Pour autant on peut noter que sur le seul mois d’août, les ventes d’œufs bio progressaient de 0,7 % sur un an. C’est plus que l’ensemble du rayon œuf (+0,4 %). De plus ces données Circana ne portent que sur les ventes en hypers et supers. Or les magasins bio refont surface cette année après une période difficile. D'après Biolineaires « les magasins bio enregistrent une hausse de 9,1% du chiffre d’affaires en août 2024, portant le Cumul à Date (CAD – 01/01 au 31=08/24) à +7,42% ». Les ventes d’œufs bio en circuits spécialisés ont ainsi repris aussi une certaine dynamique.
A l’industrie, dans l’ensemble, le marché se tient
Le marché des œufs bio à destination des casseries reste assez anecdotique sur l’ensemble des volumes. La plupart des industriels ont des besoins limités et sporadiques et ne rapportent pas de difficultés majeures. Chez les plus gros faiseurs, en revanche, on rapporte effectivement une complexification des approvisionnements.
Vers un nouvel équilibre du marché de l’œuf bio ?
« Ça prend du temps de reconvertir, il faut anticiper avant la naissance des poulettes, mais nous avons entamé la démarche », confie un acteur breton, qui compte repasser en bio la production qui avait été déclassée vers le plein-air. Néanmoins, alors que le marché du plein-air est tout autant serré, ces reconversions vont probablement nécessiter la mise en place de nouveaux élevages plein-air, sous peine de déplacer la tension d’un code à l’autre.