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Start-up
Poulehouse adopte la technologie de sexage in ovo

La start-up Poulehouse s’est associée à l’allemand Seleggt pour sa technologie de sexage in ovo, se renforçant dans le bien-être animal avicole. Procédant à un prélèvement non invasif, Seleggt peut sexer 3 000 œufs par heure. Reportage.

Poulehouse, spécialisé dans le bien-être des poules pondeuses, s’est associé à l’entreprise allemande Seleggt, afin d’identifier le sexe des poussins directement dans l’œuf grâce à la technique du sexage in ovo, évitant de tuer les poussins mâles.

La start-up, fondée en 2017 par Fabien Sauleman, Élodie Pellegrain et Sébastien Neusch, pousse d’autant plus loin sa démarche de bien-être animal qu’elle souhaite se passer de l’abattage des animaux de la filière œuf. Elle récupère ainsi des poules réformées (âgées d’un an et demi) de trois éleveurs en bio partenaires, en plus des animaux de sa ferme pilote dans le Limousin. « Les poules d’élevage vivent jusqu’à 5 ou 6 ans et meurent naturellement. Les taux de ponte sont très variables, allant de 50 à 90 % par rapport à une jeune poule », affirme Fabien Sauleman. Les œufs récoltés sont vendus en enseigne bio au prix de 6 euros la boîte de 6 œufs (contre environ 3 euros la boîte de 6 œufs des autres références bios).

Un prélèvement de l’œuf non invasif

Son nouveau partenaire allemand est une coentreprise, fondée en mars 2017, entre le distributeur alimentaire outre-Rhin Rewe et Hatchtech, spécialiste hollandais des technologies de couvage. « Après s’être posé les bonnes questions, le gouvernement allemand a subventionné à hauteur de 5 millions d’euros la recherche fondamentale sur le sexage des poussins. En 2014, le système était prêt et avait besoin d’être inclus dans un système industriel viable », explique Ludger Breloh, président de Seleggt.

Entre le 4e et le 9e jour après la ponte, l’œuf est prélevé de la couveuse pour être testé. S’il a bien été fécondé, un trou de 0,2 à 0,3 mm de diamètre est creusé par un laser qui perfore la membrane coquillière. Puis, une pression d’air est appliquée sur l’œuf, à l’opposé du trou, ce qui provoque la sortie d’une goutte de liquide allantoïdien. « On ne pénètre pas dans l’œuf, cette technique est non invasive », précise Ludger Breloh. Le liquide est ensuite mis en contact avec un biomarqueur développé par l’université de Leipzig, qui indique la présence de sulfate d’estrone par un changement de couleur.

Notre capacité de sexage in ovo est de 3 000 œufs par heure

Si le liquide contient cette hormone, le poussin à naître sera de sexe féminin ; l’œuf est alors remis en couveuse. S’il n’en contient pas, le poussin à naître sera un mâle, auquel cas l’œuf est intégré à des préparations d’aliments pour animaux, ce qui permet sa valorisation économique en contribuant à nourrir des animaux d’élevage. « Après avoir été percée, la membrane coquillière se referme naturellement au bout de 30 minutes. Le prélèvement de la goutte de liquide allantoïdien se fait en une seconde, et la réaction chimique avec le biomarqueur, en 20 minutes. Au total, nous avons une capacité de traitement de 3 000 œufs par heure », ajoute Ludger Breloh.

Des difficultés à répondre à la demande

Les œufs pondus par les poules issues du sexage connaissent un réel succès outre-Rhin, où ils sont en vente actuellement dans 380 magasins de l’enseigne de distribution Rewe Group, et y seront dans 5 500 d’ici à la fin de l’année 2019. « Nous avons du mal à répondre aux demandes du marché. Certains industriels nous ont manifesté leur intérêt, mais ils traitent plus de 100 000 œufs par jour, un rythme beaucoup trop soutenu pour nous », affirme Ludger Breloh.

Une prestation à 0,02 € par œuf

Seleggt intervient auprès des accouveurs en tant que prestataire, fournit le matériel nécessaire et garantit en plus de la naissance de poussins, exclusivement femelles, un procédé de traçabilité de la ponte jusqu’à la vente. La licence d’exploitation est payée par l’enseigne de distribution dans laquelle les œufs sont vendus, au prix de 0,02 euro par œuf. « L’intérêt de ce procédé de paiement, c’est que ça ne coûte rien pour les accouveurs, pour ne pas qu’ils aient peur d’un prix trop élevé. Nous espérons ainsi que beaucoup d’établissements se doteront d’une telle technologie », explique Ludger Breloh.

Nous sommes en train de créer un nouveau segment sur le marché de l’œuf

Avec ce partenariat, Poulehouse espère faire développer le sexage in ovo en France. « Nous sommes désireux de faire venir cette technologie ici, pas de faire venir des poussins sexés d’Allemagne ou des Pays-Bas. Son déploiement international n’est plus qu’une question de temps », assure Fabien Sauleman. La start-up a accueilli ses 1 000 premiers poussins sexés qui seront capables de pondre cet automne. « Le sexage de nos œufs n’entraînera pas de surcoûts pour le consommateur », ajoute-t-il.

Pour son second exercice, en 2018, Poulehouse a réalisé entre 3 et 4 millions d’euros de chiffre d’affaires, et ambitionne de le multiplier par 3 ou 4 d’ici à 2020. « S’occuper de poules plus âgées entraîne un surcoût que nous sommes capables d’absorber grâce à notre belle croissance. Nous avons vendu plus de 2 millions d’œufs depuis notre création, et ambitionnons d’être distribués dans plus de 3 000 magasins d’ici à la fin de l’année. Nous sommes en train de créer un nouveau segment sur le marché de l’œuf », affirme Fabien Sauleman.

Le sexage in ovo vers d’autres filières ?

Aujourd’hui centrée uniquement sur les œufs de poule, la technologie du sexage in ovo attire les curiosités d’autres filières. « Certains producteurs de dindes nous ont approchés, pour savoir s’il était possible d’appliquer cette technologie à cette filière. Les dindes sont engraissées différemment selon les sexes. La distinction mâle femelle se fait manuellement, avec chaque poussin, une activité globalement peu appréciée des salariés et des animaux aussi ! Des producteurs français de foie gras nous ont sollicités aussi, car seuls les mâles sont engraissés, et 35 millions de poussins femelles sont tués par an à leur naissance », rappelle Ludger Breloh.

En France, une solution de sexage in ovo pour fin 2019

Le projet Soo, piloté par l’entreprise française vendéenne Tronico qui s’assure des recherches de sexage in ovo, poursuit sa phase de recherche, mais « devrait trouver une solution sûre d’ici la fin de l’année 2019 », assure Patrick Collet, directeur général de Tronico. Soutenu financièrement par l’État à hauteur de 4,3 millions d’euros, la société réfléchit à un système adapté à l’ensemble de la production avicole, contrairement à son homologue allemand, et à moindre coût. « Je ne vois pas pourquoi les poussins bios seraient les seuls à éviter le broyage », affirme-t-il. Tronico s’est orienté vers une technique biologique pour le sexage, et joue actuellement sur la sensibilité de ses biocapteurs pour atteindre un résultat de 100 % de sexage correct. « Notre force de frappe en termes de matériel, marketing, commerciale, est déjà toute prête. On attend le feu vert », indique Patrick Collet. En parallèle, la société cherche aussi à développer une technique optique pour le sexage, mais connaît plus de difficultés. « Nous n’abandonnons pas pour autant la méthode optique, mais ce n’est pas celle qui sortira en premier », conclut-il.

 

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