[Edito] Vertus et risques de la transparence
La flambée des prix du blé tendre depuis quelques semaines renchérit le coût des aliments pour animaux. Or « les distributeurs réclament une baisse de 4 % des prix alimentaires, alors que les industriels réclament une hausse de 4 % », a alerté Christiane Lambert, présidente de la FNSEA lors de ses vœux à la presse le 5 janvier. Soit « un différentiel de 8 % entre les exigences des divers acteurs, ce qui est énorme », a-t-elle commenté. Après une année 2020 si particulière, où la solidarité a pu s’exprimer tout au long de la chaîne alimentaire pour nourrir une France confinée, les négociations commerciales semblent une nouvelle fois se dérouler dans un climat tendu. Que peut faire l’État pour améliorer les choses ? Changer à nouveau la loi ? Dans une « économie qui n’est pas administrée et où l’entente n’est pas possible », comme le rappelle Julien Denormandie dans l’interview accordée à Réussir-Agra, difficile d’agir dans une négociation où prime le rapport de force, si ce n’est en essayant de changer les états d’esprit. La loi Egalim a déjà contribué à faire évoluer les relations, mais ce n’est pas suffisant, reconnaît le ministre de l’Agriculture qui a missionné l’ex-patron de Système U, Serge Papin, pour trouver des solutions. Ses propositions semblent trouver un écho favorable auprès du ministre : encourager les contrats pluriannuels (ce que prône aussi la commission d’examen des pratiques commerciales pour les MDD) et rendre plus transparente la répartition des marges entre les maillons de la chaîne à l’aide d’un tiers de confiance, chargé en quelque sorte de vérifier que la théorie du ruissellement s’applique. Si la première mesure semble relever du bon sens, la seconde paraît plus difficile à mettre en place. Julien Denormandie voudrait passer de la guerre des prix à la transparence des marges. Une notion qui risque d’en effrayer plus d’un, alors que les industriels et notamment les PME revendiquent le droit de fixer librement leurs tarifs. Cette bonne volonté de transparence ne risque-t-elle pas de renforcer encore le pouvoir des distributeurs sur leurs plus petits fabricants ?