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Un renversement de marché en un mois

La chute des productions russe, ukrainienne et kazakhe a brusquement accéléré la tension sur les prix céréaliers et modifié les courants internationaux. La présence réduite des trois grands exportateurs de la zone mer Noire profite surtout à la France et aux États-Unis.
Période du 15 juillet au 30 août.

À la mi-juillet, date de notre dernière chronique hebdomadaire avant les vacances, le marché français avait déjà amorcé depuis quelques semaines un net revirement, avec le rééquilibrage inespéré du bilan blé. Le stock de report estimé encore deux mois auparavant à quelque 4 millions de tonnes (Mt), volume pléthorique, avait été ramené à 2,6 Mt, dans une simple bonne moyenne. La persistance de la sécheresse accroissait par ailleurs les craintes de perte de rendement, provoquant une hausse rapide des prix qu’allaient brutalement accélérer les informations venues de la Russie et de ses voisins, Ukraine et Kazakhstan, sur la chute de leur production. Les prix se mettaient à flamber dans un climat de volatilité comparable à celui de 2007 et que les trois graphiques ci-contre permettront d’apprécier au stade du marché physique français.

Nouvelle répartition du stock mondial de blé

Même en tenant compte de la considérable diminution de la production dans la Communauté des États indépendants, et prévisible dans l’hémisphère sud, le marché mondial du blé n’est pas en état de disette. Le Conseil international des céréales, dans son rapport daté du 26 août, a revu une fois encore en baisse son estimation de production mondiale de blé à 644 Mt. Mais les stocks de fin de campagne écoulée étaient importants et, malgré un niveau de consommation élevé (657 Mt), le report prévu à l’issue de l’actuelle campagne, en recul de 13 Mt sur l’an dernier, atteindrait 184 Mt, le deuxième plus élevé de ces dernières années. C’est donc plus une répartition de ce stock que son volume qui va modifier les courants internationaux du blé. La présence réduite des trois grands exportateurs de la zone mer Noire – la Russie qui a suspendu ses exportations, l’Ukraine et le Kazakhstan qui ne les réalisent que très partiellement – oblige les pays importateurs à diversifier leurs sources d’approvisionnement. Deux pays profitent particulièrement de l’aubaine : les États-Unis qui ont réalisé une belle récolte et la France qui, au sein d’une moisson communautaire contrariée par la météo, s’en tire plutôt bien, se posant même en concurrente des États-Unis sur le plus grand marché d’exportation qu’est l’Égypte. Depuis le début de la campagne, ce pays a acheté 1,3 Mt de blé dont 720 000 d’origine France et seulement 55 000 des États-Unis (qui vendent fort bien par ailleurs). La semaine dernière, Bruxelles a délivré des certificats d’exportation de blé pour un chiffre hebdomadaire record de 850 000 t pour l’ensemble de l’Union européenne ; compte tenu du modique potentiel d’export de nos partenaires cette campagne, les chargements se feront largement en blé français, l’activité en portuaire entretenant déjà des prix très tendus.
Si la tension des prix céréaliers est d’abord le fait du blé, elle n’épargne pas les deux autres grandes céréales, le maïs et l’orge, et en a bousculé la hiérarchie des prix ; nous y reviendrons.

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