Rares instants de vérité
« Le consommateur nous a délégué son alimentation. Il en a perdu le fil et aujourd'hui il se pose des questions. Les sujets sont là. Est-il anormal que le consommateur veuille savoir d'où viennent les produits ? Je dis non ! Qu'il veuille savoir pourquoi il y a une telle liste d'additifs ? Je dis non ! Nous, industriels, allons devoir aller au-delà de ce que l'on faisait avant pour ce sujet d'intérêt général. » Régis Lebrun, directeur général de Fleury Michon, s'est ainsi exprimé aux assises de l'alimentation organisées par l'Ania le 10 mai à Paris. Un discours simple, mais jusque-là encore très rare dans une assemblée professionnelle. Rare aussi, l'initiative menée par l'Ania : à savoir se confronter directement aux consommateurs en les interrogeant dans la rue, sans filtre, au lieu de passer par les traditionnels sondages d'opinion aux formulations de questions parfois biaisées. Sur cinq mois, les impressions récoltées auprès de plus de 8800 consommateurs ont permis de bien souligner les attentes des Français et l'image qu'ils ont des produits industriels français. « Trop industriels »! Pas assez naturels, pas assez transparents. Voilà les reproches qui ressortent le plus. Plus de local, de produits de saison, d'ingrédients de qualité, sont les principales attentes. Souvent l'image perçue est pire que la réalité, ont constaté les industriels présents le 10 mai, « nous ne méritons pas d'être autant malmenés », commente Jean-Philippe Girard, président de l'Ania, faisant référence aux émissions à charge. Pour autant, chacun reconnaît ses erreurs, mettant en avant un manque de transparence. Dans son nouveau pacte alimentaire, l'Ania prône l'ouverture des usines, et une plus grande communication sur les recettes et les savoir-faire. En contrepartie, « il faut casser cette idée que demain on mangera encore moins cher, que l'alimentation est la variable d'ajustement », prévient Régis Lebrun. Opinion partagée par Jérôme Bédier, directeur général délégué de Carrefour : « il faut changer de logiciel sur la communication, pour nous la guerre des prix n'amène qu'à des désillusions ». En attendant que les actes suivent la parole...