Rapport de l’observatoire de la formation des prix et des marges
Pourquoi les prix des produits alimentaires augmentent plus vite en sortie d’industrie qu’à la consommation ?
En 2021, les prix des produits alimentaires ont connu une hausse de +2,2 % en sortie d’industrie et de +0,6 % à la consommation, compressant les marges des industriels et des distributeurs.
En 2021, les prix des produits alimentaires ont connu une hausse de +2,2 % en sortie d’industrie et de +0,6 % à la consommation, compressant les marges des industriels et des distributeurs.
L’observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires a publié son rapport 2022 – son onzième – dans lequel il est mentionné que les prix des produits en sortie d’industries alimentaires ont augmenté en 2021 de +2,2 %. En revanche, les prix à la consommation des produits alimentaires en hypermarché et supermarché ont enregistré une hausse en 2021 de +0,6 %, inférieure au +1,9 % de 2020.
« Les augmentations des prix agricoles sont digérées par les industries et la distribution », note Philippe Chalmin, président de l’observatoire, à l’occasion d’une présentation à la presse le 29 juin 2022. La hausse des prix à la consommation des produits alimentaires est inférieure à l’inflation observée au travers de l’évolution des prix de l’ensemble des produits de grande consommation (+1,6 % en 2021).
La hausse des prix en sortie d’industries concerne surtout les pâtes alimentaires (+6,3 %), les viandes bovines (+3 %) ainsi que les volailles (+1,7 %). « La flambée des coûts de production des pâtes alimentaires est due à la sécheresse au Canada qui a touché les cultures de blé dur et de colza », souligne Philippe Chalmin. En 2022, les difficultés se sont accentuées avec la guerre en Ukraine qui a entraîné une hausse du prix du blé de 50 dollars la tonne. « La nature des marchés agricoles aujourd’hui, c’est leur profonde instabilité, à laquelle s’ajoute celle liée au rapport dollar-euro », précise Philippe Chalmin.
La filière porcine en difficulté
Deux filières voient néanmoins leurs prix diminuer : la farine boulangère destinée aux utilisations artisanales (-0,7 %) mais surtout la viande porcine (-4,5 %). Cette chute des prix est liée aux diminutions des importations de la Chine qui a entraîné un alourdissement du marché européen.
« Depuis, les prix du porc en entrée d’abattoir sont remontés à 1,88 € le kg, contre 1,50 € à fin 2021 », ajoute Philippe Chalmin. La filière porcine a vécu une année 2021 très difficile. « Un éleveur de porc n’a rien dégagé pour se rémunérer, et ce malgré les subventions ». Le constat est similaire pour le maillon industriel, dont le résultat courant moyen par kg de carcasse traité est passé à 0,04 € sur les 9 premiers mois de 2021, contre 0,08 € sur la même période de 2020.
Jamais eu de couverture des coûts de production en bovin viande depuis 11 ans
La filière viande bovine a fait face en 2021 à une forte hausse des cours des gros bovins, en lien avec un manque d’offre. Le coût d’achat entrée abattoir de l’échantillon augmente de 0,21 € par kg de carcasse, tandis que les produits sont en augmentation de 0,23 € le kg de carcasse, d’où une marge brute qui croît de près de 0,03 € le kg de carcasse.
« Il est intéressant de noter qu’un éleveur bovin allaitant gagne difficilement entre un et deux smic. En se basant sur l’objectif deux smic par UTH, dont nous sommes aujourd’hui très loin, il n’y a jamais eu de couverture des coûts de production pour les bovins viande depuis la naissance de l’observatoire, commente Philippe Chalmin. Sans les subventions, éleveurs bovins et ovins seraient dans le négatif ».
Le prix à la consommation du steak haché 15 % de matière grasse augmente sensiblement, passant de 10,50 € le kg en 2020 à 16,69 € le kg, dans un contexte où la baisse structurelle de la consommation a repris son cours après le bond de la crise sanitaire.
Le prix du lait UHT demi-écrémé affiche une stabilité quasi-totale sur ces quatre dernières années malgré les énormes volatilités des prix. « Les tensions sur la filière sont très fortes à cause de la demande chinoise. Les prix ont néanmoins augmenté début 2022, surtout pour le beurre et la poudre de lait », indique Philippe Chalmin. Le beurre est notamment passé de 4000 € la tonne en décembre 2021 à 6500 euros la tonne en juin 2022.
Les produits de la pêche et de l’aquaculture font quant à eux toujours face à l’augmentation des importations pour compenser la diminution continue des débarquements français. Le mareyage français a connu en 2020 une baisse d’activité mais voit son résultat courant avant impôt en légère croissance, passant de 1,2 % à 1,8 % du chiffre d’affaires.
2,3 % de marge nette avant impôt sur les rayons alimentaires pour les distributeurs
Du côté de la grande distribution, plusieurs rayons affichent des marges nettes avant impôt sur les sociétés (IS) négatives : boucherie (-0,4 % du CA du rayon), marée (-3 % du CA du rayon) et boulangerie-viennoiserie pâtisserie (-4,7 % du CA). Tous rayons alimentaires étudiés, les hypermarchés et supermarchés réalisent 2,3 % de marge nette avant IS de leur chiffre d’affaire alimentaire. Celle-ci est positive car rattrapée par le rayon charcuterie (marge nette avant IS de 6,9 % du CA), les volailles (9,2 % du CA) et les fruits et légumes (4,5 % du CA).
Le rayon produits laitiers affiche quant à lui une marge nette avant IS de 1,4 % du CA. « Alors que toute l’Europe est confrontée à l’instabilité des prix agricoles, le consommateur est in fine gagnant car bénéficie d’une grande stabilité des prix des produits de base », conclut Philippe Chalmin.