STRATÉGIE
Le sucrier Tereos s’oriente vers la valorisation de la ressource végétale
La nouvelle gouvernance du groupe coopératif Tereos entreprend de se départir d’une stratégie du volume pour mieux cultiver la marge. Sans remettre en cause la diversification, au contraire.
En s’installant aux commandes de Tereos en début d’année 2021, la nouvelle gouvernance du groupe sucrier, alcoolier et amidonnier avait promis de présenter sa feuille de route au printemps. Elle l’a fait le 2 juin devant la presse avant d’entamer un grand tour des différents secteurs agricoles à la rencontre de 12 000 coopérateurs.
Gérard Clay, le nouveau président du conseil de surveillance de Tereos, a réitéré l’intention de la nouvelle gouvernance, qui est de réaffirmer le rôle coopératif du groupe, en particulier par la meilleure valorisation possible des produits de grande culture des adhérents – betterave sucrière, blé, pomme de terre, pois, etc., et d’assurer la transparence des décisions. « Nous devons nous adapter à la fin des quotas, trouver de nouveaux repères », a-t-il considéré au regard des défis sociétaux et climatiques posés aux activités du groupe.
Aucune fermeture à l’ordre du jour
Philippe de Raynal, nouveau président du directoire de Tereos, a annoncé un changement stratégique : « passer des volumes aux marges ». « Cela passe par une meilleure valorisation des produits et la répercussion des hausses des matières premières », a-t-il expliqué. Sur le plan industriel, les synergies entre métiers seront mises en œuvre. « Les investissements seront davantage sélectionnés et surveillés », a-t-il indiqué, en précisant que ceux-ci porteraient sur les activités sucre et énergies renouvelables en Europe et au Brésil, sur les activités amidonnières et sur celles des produits sucrants et renouvelables en Europe. Il a affirmé qu’aucune fermeture n’était à l’ordre du jour. Et en effet, « toutes nos usines ont tourné à plein », a-t-il assuré, en dépit d’une moindre récolte betteravière à la fin 2020. « Nous avons l’ambition d’atteindre la neutralité carbone », a aussi déclaré Philippe de Raynal, promettant de continuer à remplacer les énergies fossiles.
Le levier lié à l’endettement reste trop élevé pour nos métiers
La priorité pour 2021 et 2022 est le désendettement. Gwenaël Eliès, nouveau directeur financier de Tereos, a présenté un objectif : rabaisser le niveau de l’endettement en dessous de trois fois l’Ebitda récurrent (sans éléments exceptionnels), alors qu’il est encore à 5,5. « Le levier lié à l’endettement reste trop élevé pour nos métiers ; il faut l’abaisser pour pouvoir franchir les bas de cycles », a-t-il déterminé, après avoir déploré l’insuffisance du flux de trésorerie disponible (65 millions d’euros) et estimé que la rentabilité opérationnelle récurrente (hors éléments exceptionnels) devrait atteindre au moins 5 % dans trois ans (la marge d’Ebit est de 2 % pour 2020-2021).
La dette de Tereos, dénoncée ces dernières années par Gérard Clay et les producteurs qui l’ont soutenu, est en très légère baisse et s’élève encore à 2,5 milliards d’euros. Selon le directeur financier, elle doit redescendre à court terme en dessous de 2 milliards d’euros.
Mieux vendre les produits amylacés et sucrants
Aussi, le plan stratégique à horizon 2024 vise à améliorer la rentabilité des activités et à diminuer l’endettement. Sur la base des audits commerciaux, industriels et financiers déclenchés début 2021, la nouvelle gouvernance a identifié trois axes de création de valeur : l’excellence commerciale, l’excellence de l’organisation, l’excellence industrielle. Le programme d’excellence débutera par le commerce et l’organisation. « Les audits ont montré que les équipes de Tereos étaient compétentes », a rassuré Philippe de Raynal, soulignant que la meilleure performance viendrait de la qualité d’exécution et du pilotage.
Sur le marché des amidons, présenté comme mature en Europe, Tereos prévoit d’améliorer la valeur ajoutée. Les travaux s’engagent dès maintenant. Le groupe travaille aussi sur les protéines végétales (aujourd’hui, 6 % du chiffre d’affaires), se considérant déjà en « acteur majeur sur le marché en expansion du gluten de blé ».
Les raisons d'une perte nette
L’exercice 2020-2021 s’est clos en mars 2021 sur un Ebitda en légère progression, mais sur un résultat net négatif de 133 millions d’euros pour 4,3 milliards d’euros. Les éléments positifs ont été la hausse des prix du sucre mondial et européen, ainsi que de l’alcool et de l’éthanol (des bénéfices records au Brésil), la hausse des volumes de produits amylacés et la baisse du coût de l’énergie en Europe. Enfin, des progrès opérationnels ont été réalisés dans l’ensemble des divisions.
Les éléments négatifs ont été la dépréciation de 37 % du réal brésilien face à l’euro, la baisse des volumes de sucre vendus au 4e trimestre du fait de la mauvaise campagne betteravière en Europe, le ralentissement des marchés du sucre et de l’éthanol pour cause de pandémie de coronavirus et la dégradation des marges sur les produits amylacés. Le groupe a aussi supporté 40 millions d’euros de charges exceptionnelles telles que des surcoûts de gestion de la pandémie.
Le résultat opérationnel récurrent (Ebit) consolidé s’est élevé à 86 millions d’euros, contre 27 millions l’an passé. Et si son résultat net consolidé est une perte de 133 millions d’euros pour 2020-2021 (contre un profit de 24 millions pour 2019-2020), c’est en partie en raison de 76 millions d’euros de dépréciations d’actifs.
Le point sur la RSE
Sur le plan de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), Tereos déclare pour l’exercice 2020-2021 trois niveaux de performance : 62 % des matières premières sont évaluées ou certifiées durables ; -55 % de l’énergie consommée dans les usines (au niveau mondial) est d’origine renouvelable (+5 points par rapport à l’exercice 2019-2020) ; 86 % des sites industriels de Tereos sont certifiés ISO/FSSC 22000 ou ISO 9001. En parallèle, le groupe annonce avoir « continué à mettre en place de nombreux programmes de développement auprès des communautés dans ses territoires d’implantation ». La coopérative entend développer les productions certifiées Haute Valeur environnementale, tout en favorisant l’économie circulaire et le développement territorial. Le groupe prévoit d’annoncer d’ici à la fin de l’année de nouveaux objectifs à plus long terme en matière de RSE.