Le consommateur, cible mouvante
Signe d'un repli sur soi ? De la peur de l'inconnu ? D'une méfiance généralisée ? Un Français sur deux a l'impression « de ne plus trop savoir ce qu'il mange » et voit dans les aliments produits localement un moyen de se rassurer, selon une étude Ipsos publiée le 12 février pour le réseau de vente agricole directe Bienvenue à la ferme(1). À la veille de l'ouverture du 51e salon de l'agriculture, quatre Français sur dix déclarent acheter souvent des produits locaux et 81 % des sondés disent privilégier les aliments fabriqués en France. Une affirmation à vérifier au rayon boucherie dans quelques mois avec le déploiement du logo « Viandes de France ». Mais ce qui rassure le plus, c'est d'acheter le produit directement vendu par le producteur, déclarent les sondés. « Acheter durable » signifie pour eux « aider le petit agriculteur qui est à côté de chez soi », même s'ils reconnaissent que le prix et le manque de points de vente peuvent être un frein. S'agit-il d'un désaveu de la grande distribution ? Les longues allées impersonnelles des supermarchés, qui ont pourtant permis par la massification de faire baisser les prix de détail, ne font plus rêver. De plus en plus de consommateurs s'essaient au drive, de sorte qu'ils ne franchissent même plus les portes du magasin. Carrefour réagit en mettant de nouveau l'accent sur ses filières qualité – quitte à froisser l'Inao avec son offre rebaptisée « Origine & Qualité ». « Origine locale des produits, relation directe avec 20000 producteurs, extrême fraîcheur des produits », le distributeur essaie, grâce à un vocabulaire choisi, de gommer les intermédiaires entre son client et l'origine du produit. Les coopératives, longtemps frileuses, osent désormais ouvrir des magasins et distribuer leurs propres produits. Bref retour en arrière ou tendance durable ? Choix, prix bas, produits locaux, service… Comment le consommateur va-t-il arbitrer à l'avenir entre ces différents critères ? La réponse semble loin d'être évidente. Une chose est sûre, les consommateurs s'avèrent des cibles de plus en plus mouvantes.
(1) réalisée du 22 au 27 janvier sur un échantillon représentatif de 1 008 personnes.