Il va falloir trancher
Emmanuel Macron le sait : le dossier des prix agricoles et alimentaires est éminemment politique. Et comme ses prédécesseurs, il devra procéder à des arbitrages sur le sujet, prendre position entre la défense aveugle du pouvoir d’achat et un renforcement du pouvoir de l’amont (ou du moins une protection de l’amont) pour une meilleure valorisation des prix agricoles. Était-ce couru d’avance ? Les états généraux de l’alimentation ne mèneront pas à un large consensus. Il fallait s’y attendre, Michel-Édouard Leclerc a joué son rôle de défenseur du pouvoir d’achat et « de lutte contre les rentes en tout genre », dès que l’Ania, la FNSEA et l’Ilec, avec l’accord de plusieurs distributeurs) ont émis l’idée de relever le seuil de revente à perte (SRP). Révélant devant les médias un soi-disant accord secret conclu en catimini entre les acteurs des états généraux, le trublion a brandi la menace d’un retour à la loi Galland évoquant l’obligation d’une marge minimale sur tous les produits de consommation courante (y compris les shampoings et la lessive) de 15 à 17 %. Une hypothèse à laquelle s’oppose aussitôt l’UFC-Que Choisir pour qui un relèvement de 15 % du SRP se traduirait dès 2018 par une hausse des prix de 1,4 milliard d’euros, soit +2,4 % sur les rayons concernés. Et de douter : « obliger les distributeurs à vendre plus cher ne garantit en rien qu’ils achèteront plus cher à leurs fournisseurs ». Michel-Édouard Leclerc affirme préférer participer à un fonds interprofessionnel pour aider la filière œuf à se convertir à l’alternatif ou pour accompagner le bio, alors que l’État s’en désengage. Et de se déclarer ouvert aux accords tripartites. Soutenir ces démarches coûtera peu à l’État. Si le relèvement du SRP risque d’être une décision dure à prendre en parallèle d’une hausse de la CSG sur les retraites, le gouvernement devrait favoriser les nouvelles formes de contractualisation. Encouragera-t-il l’idée de contrats partant du prix payé à l’agriculteur, avec des indicateurs de prix portés par FranceAgriMer, comme le propose l’atelier 5 ? Sachant que Michel-Édouard Leclerc ne s’est pas encore prononcé sur le sujet. Affaire à suivre.