Fortes appréhensions autour des négociations 2017
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Les négociations commerciales annuelles commencent à peine. Les CGV des fournisseurs peuvent être communiquées jusqu’au 30 novembre, mais déjà l’appréhension est palpable. Les fédérations de professionnels craignent des discussions difficiles.
Le congrès organisé par le magazine LSA début octobre marque traditionnellement le début des négociations commerciales et donne une idée de l’ambiance qui régnera dans les box. À l’opposé du congrès tonitruant de l’an dernier, très peu d’éléments ont filtré cette année. 500 opérateurs de la filière agroalimentaire avaient fait le déplacement pour écouter Michel-Édouard Leclerc (E.Leclerc), Serge Papin (Système U), Thierry Cotillard (Intermarché), Denis Knoops (Delhaize) et Jérôme Bédier (Carrefour). « Nous retenons de cette journée un certain nombre de mots clés comme création de valeur, différenciation, innovation, proximité et régionalisation », note Pascal Viné, délégué général de Coop de France, partenaire de l’évènement.
L’Ania absente
Mais si Jacques Creyssel, délégué général de la FCD (Fédération du commerce et de la distribution), a présenté en tribune les recommandations de bonnes pratiques émanant de l’accord passé il y a un an entre Coop de France et son organisation, Michel Prugue, président de Coop de France, a clairement indiqué qu’il serait très attentif à la manière dont les négociations commerciales allaient se dérouler en 2017. « Malgré ces bonnes intentions, le bilan des négociations commerciales 2016 est mauvais, et une certaine appréhension des acteurs économiques se ressent pour l’année 2017 », souligne Pascal Viné. « Un bilan sera fait au Salon international de l’agriculture en mars 2017 par Coop de France », poursuit-il.
L’Association nationale des industries alimentaires (Ania) était la grande absente de l’évènement qui a plutôt mis les projecteurs sur les PME. Ainsi, le directeur général de Charles & Alice a déploré que le financement de la guerre des prix se fasse par les industriels, et ce, au détriment des investissements, exprimant ainsi une vérité qui touche nombre d’industriels du secteur agroalimentaire. Un message qui, si l’on en croit le spécialiste de la distribution, Olivier Dauvers, devrait malheureusement une nouvelle fois ne pas être entendu : « 2017, plus encore que 2016, promet sang, sueur et larmes. Tous les ingrédients sont en effet factuellement réunis… », écrit-il sur son blog. Et de citer notamment « la baisse des rendements commerciaux qui impose (aux distributeurs, ndlr) l’agressivité comme stratégie ». Pour preuve à fin août, selon A3 Distrib, l’effort promotionnel des enseignes progressait de 9 % en cumul annuel.
L’offensive de Lidl
D’autres facteurs renforcent la pression concurrentielle dans la GMS : comme l’offensive de Lidl, ou les nouveaux comparateurs de prix de E.Leclerc en temps réel dans les rayons en magasins. Sans parler de nouvelles menaces sur la grande distribution classique comme l’arrivée d’Amazon. Tout cela devrait peser dans les box, craint l’Ania.
D’un autre côté, les distributeurs sont de plus en plus sensibilisés à la pression juridique, indique l’Ania. Pour rappel, la cour d’appel de Paris a condamné en juillet 2015 E.Leclerc à restituer via le Trésor public la somme de 61,2 M€ à 46 fournisseurs pour cause de déséquilibre significatif. La même cour d’appel a confirmé le 29 juin dernier un jugement condamnant Système U à rembourser près de 77 M€ à quatre fournisseurs (Nestlé, Danone, Yoplait et Lavazza). Les deux distributeurs se sont pourvus en cassation. Par ailleurs, la retentissante opération de perquisition contre Carrefour menée en février dernier par la DGCCRF au cours des négociations commerciales a marqué les esprits.
Un phénomène qui devrait profiter aux entreprises ayant bien ficelé leurs conditions générales de vente, comme le souligne chaque année le consultant Philippe Duvocelle. « On voit apparaître de nouvelles stratégies de contournement et d’évitement de la loi, voire d’expérimentation de délocalisation des achats », indique-t-on toutefois du côté de l’Ania, et de citer Eurelec, la structure commune d’achat entre E.Leclerc et le groupe allemand Rewe.
Application tardive de la loi Sapin 2
Par ailleurs, ces négociations 2017 vont être perturbées par l’entrée en application tardive de la loi Sapin 2, dont l’étape prochaine est une nouvelle lecture début novembre au Sénat pour une sortie définitive probable mi-décembre. « Ce texte suscite beaucoup de questions d’application et d’incertitudes alors même qu’il était censé, pour une large partie, s’appliquer aux négociations commerciales 2017 », déplore un représentant de l’Ania. L’association s’inquiète « d’un risque important de complexification d’un droit des relations commerciales déjà complexe », alors que la réforme du droit général des obligations (Code civil) vient d’entrer en application au 1er octobre.