"Je produis du soja toasté et broyé pour mes brebis laitières"
Pierre Couillet du Gaec Etcheberria dans les Pyrénées-Atlantiques donne du soja produit sur son exploitation à ses brebis laitières. Ses cinq hectares fournissent la moitié des besoins en protéines de la ration.
Pierre Couillet du Gaec Etcheberria dans les Pyrénées-Atlantiques donne du soja produit sur son exploitation à ses brebis laitières. Ses cinq hectares fournissent la moitié des besoins en protéines de la ration.
Pierre Couillet est installé en Gaec avec sa mère au cœur des Pyrénées-Atlantiques, dans un village portant le doux nom d’Aroue-Ithorots-Olhaïby. Ils élèvent 30 vaches allaitantes blondes d’Aquitaine et 330 brebis manech tête rousse et cultivent cinq hectares de soja pour réduire ses dépenses en compléments azotés. Les 74 hectares de SAU se composent aussi de 15 hectares de maïs et de 45 de prairies.
Du soja à 35 de MAT
« Je fais du soja depuis la dernière réforme de la PAC en fait », explique Pierre Couillet. La culture du soja a permis de faire des rotations mais aussi d’améliorer l’autonomie protéique de l’exploitation. « Les premières années, on a fait des analyses. Notre soja est autour de 35-36 MAT », raconte l’éleveur. Il est moins riche en protéine que le tourteau de soja du commerce mais il est intéressant sur l’apport d’énergie et de gras. « Depuis qu’on leur donne du soja, le taux de matière grasse du lait des brebis a augmenté », se réjouit Pierre Couillet.
« Je sème vers le 10 mai, il faut que la terre soit assez chaude. Ça se prépare comme un maïs mais je fais semer par un entrepreneur car le soja a un écartement de 60 centimètres alors que le maïs est à 80 », souligne l’éleveur pyrénéen. Il fait un désherbage chimique le lendemain du semis et quinze jours après. Ensuite, il n’y a plus aucune intervention jusqu’à la récolte.
Le toastage augmente la digestibilité du soja
La récolte du soja se fait en général début octobre. Un hectare produit environ 35 quintaux de soja. Pierre Couillet trie ensuite les grains avec une trieuse de la Cuma pour enlever les graines d’adventices. « Les graines de mauvaises herbes sont plus humides et ça peut faire pourrir une partie de la récolte dans le silo », explique l’éleveur. Le soja est ensuite toasté début novembre quand la machine passe dans la région. Le toasteur appartient à une Cuma et il tourne dans les Pyrénées-Atlantiques et les Landes. La machine passe deux fois par an, à l’automne et au printemps.
Les grains de soja passent dans le toasteur. « On les met sur un tapis roulant qui passe dans un four à 200 °C », détaille Pierre Couillet. Le toastage brûle une partie des graisses du soja et le rend plus digestible. Le temps de toastage dépend de l’humidité des grains à l’entrée et de l’air car le toasteur est réglé pour sortir le soja à un certain taux d’humidité. « Dans de bonnes conditions, on fait deux tonnes à l’heure ». Le soja est ensuite ventilé pendant six heures pour le refroidir avant de le remettre en silo. En tout, le soja toasté revient à 50 euros la tonne. « Économiquement, c’est vraiment très intéressant », se réjouit-il.
Avant de le distribuer dans la ration, l’éleveur broie le soja pour le rendre encore plus digestible. « On ne peut pas tout broyer d’un coup, on doit le faire au fur et à mesure car ça ne se conserve pas bien sous cette forme » explique Pierre Couillet.
Un élément clé de la ration
L’éleveur produit lui-même le foin, les regains, l’enrubanné, le maïs et le soja qui composent la ration des brebis laitières et complète avec des achats de titaro (une sorte de vesce), de luzerne et de pulpe de betterave. Il est 100 % autonome en fourrage et 50 % autonome en concentré. Les 15 tonnes de soja n’étant pas suffisantes, il achète 15 tonnes de tourteaux de soja du commerce.
Les maïs pour la consommation sont cultivés sur 10 hectares qui donnent 110 quintaux en maïs grain pour les parcelles irriguées et 90 quintaux pour celles qui ne sont pas irriguées. Pour les prairies, sept hectares sont en prairies temporaires intégrées dans la rotation avec le maïs et le soja. Ces prairies sont semées avec un mélange enrichi en trèfle qui sera pâturé et fera de l’enrubanné. Le reste des prairies sont permanentes et sont fauchées ou pâturées.
Des brebis en sélection
Les 330 brebis manech tête rousse du Gaec Etcheberria sont en sélection. Elles font un peu moins de 300 litres de lait par brebis en 190 jours de traite. Elles commencent leur lactation début décembre et sont taries fin juillet. 145 brebis sont inséminées début juin et les autres sont en monte naturelle avec des béliers de races locales et des Berrichons. Ces races améliorent la conformation bouchère des agneaux. Pierre Couillet garde aussi un bélier manech tête rousse pour faire de la lutte contrôlée sur les brebis du lot d’insémination qui n’ont pas pris. La reproduction des agnelles est décalée d’un mois. Elles sont groupées avec un traitement hormonal et elles sont mises avec le bélier pendant trois jours par lots de 15. « Avant, je les mettais avec les béliers plus tard pour qu’elles soient plus grandes mais j’avais des problèmes de reproduction en juillet parce que c’était encore trop tôt dans leur lactation », explique l’éleveur qui souligne l’importance de faire très attention à leur alimentation. Les primipares finissent leur croissance pendant leur première lactation. Elles ont donc des besoins alimentaires élevés.
Sur les 400 agneaux nés, le Gaec garde 70 agnelles de renouvellement. Les autres sont vendus en agneau de lait. Une cinquantaine est dédiée à la vente directe et le reste est envoyé à la coopérative.
Un Gaec en phase d’adaptation
Pierre Couillet s’est installé en Gaec avec ses parents. Son père est parti à la retraite le 31 juillet dernier et sa mère prévoit de partir dans trois ans. Pour se préparer à ces changements le Gaec est en phase d’adaptation. Le nombre de blondes d’Aquitaine va être réduit. Elles passent de 50 à 30 mères. L’éleveur est également en train de monter un nouvel atelier, tout en gardant en tête de gagner plus sans avoir de charge de travail supplémentaire trop importante. Il se lance dans l’engraissement de porc lourd en intégration avec un naisseur. Les porcs seront élevés en bâtiment paillé et auront un parcours à disposition. « C’est un marché de niche, le naisseur travaille avec un boucher. L’avantage c’est que ça ne demande pas trop de temps » explique l’éleveur. L’atelier démarrera l’année prochaine.