Approvisionnement
Passer HVE pour conserver l’approvisionnement local ?
La charte de proximité sarthoise s’inquiète de l'effet de la loi Egalim sur ses adhérents qui, commercialisant vers la restauration collective, ne sont ni bios ni sous autre signe de qualité. La HVE pourrait être une nouvelle tendance, encore faut-il en maîtriser les codes.
Pour valoriser et favoriser le développement des circuits alimentaires de proximité tant en vente directe qu’en restauration collective, le Pays du Mans a réalisé en 2013 la charte « qualité proximité : nos priorités », charte d’engagement commune à cinq catégories de professionnels : agriculteurs, transformateurs, restaurateurs collectifs, restaurateurs commerciaux et associations de producteurs pour le label Porc sarthois et le label Bœuf fermier du Maine. Il a été rejoint dans cette démarche l’an dernier par deux autres établissements du département : Pays Vallée de la Sarthe et Pays Vallée du Loir. Les 115 adhérents sont donc désormais répartis sur quasiment toute la Sarthe. « Nous nous interrogeons sur l’effet que l’application de l’article 24 de la loi Egalim va avoir sur nos adhérents producteurs au 1er janvier 2022, car le caractère local d’un produit ne répond pas à une définition officielle et ne peut constituer un critère de sélection dans un marché public selon l’Ademe », explique Hélène Penven, animatrice de la charte. « En effet, dans notre charte se côtoient des producteurs en bio, en label et en conventionnel. Pour ces derniers, la question se pose donc de la mention valorisante possible pour entrer dans la part des 50 % au minimum en valeur en bio, sous signe de qualité ou mention valorisante. C’est particulièrement important pour les éleveurs, car naturellement, vu la part en valeur des viandes, les restaurations collectives visent déjà à disposer d’une part maximale de produits entrant dans ces 50 % en valeur », relate-t-elle.
Dans notre charte se côtoient des producteurs en bio, en label et en conventionnel
Une première question se pose autour de la mention « fermier » ou « produit de la ferme » ou « produit à la ferme ». « Parmi les produits qui entrent dans cette catégorie, il y a les œufs fermiers comme le mentionne l’Ademe dans sa note de décryptage du 7 juin 2019, mais aussi les fromages et les fromages blancs produit sur une exploitation à partir du lait de ses animaux», expose-t-elle. C’est un peu la même chose pour les spécialités traditionnelles garanties : le lait de foin est en effet reconnu comme STG au niveau européen, comme 54 produits, même si la moule de bouchot est la seule STG française.
Question complexe des élevages
Autre solution, se lancer dans la HVE puisque la mention « issu d’une exploitation à haute valeur environnementale » est listée dans les 50 % avec deux étapes : jusqu’au 31 décembre 2029, les produits issus d’une exploitation disposant d’une certification environnementale de niveau 2 sont acceptés, puis il faudra atteindre le niveau 3, la véritable HVE. Certains ont déjà passé le cap, comme Elabor en arboriculture. Mais, si les éléments à satisfaire sont déjà bien rodés en viticulture comme en arboriculture, voire dans les grandes cultures, la question des élevages est plus complexe : « il faut en effet tenir compte de l’alimentation des animaux comme dans leurs conditions d’élevage », explique Élodie Champelou, éleveuse de porcs et transformatrice à la ferme. « Notre exploitation n’est pas adaptée au bio ni au label Rouge. Pour la part que nous transformons, je m’interroge sur la pertinence de passer HVE, mais je ne trouve guère de réponse sur ce qu’il faudrait réellement faire dans l’élevage. Je me suis inscrite pour une formation avec la chambre d’agriculture des pays de la Loire, mais la date n’est pas encore fixée », précise-t-elle.
Une certification environnementale
Imaginée lors du grenelle de l’environnement, la certification environnementale des exploitations agricoles est inscrite par la loi du 12 juillet 2010 dans le Code rural et de la pêche maritime. Cette démarche volontaire, accessible à toutes les filières agricoles, se construit autour de quatre thèmes : la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion des engrais, la gestion de la ressource en eau. Le décret 2011-694 du 20 juin 2011 en clarifie les trois niveaux : un premier niveau qui correspond aux exigences environnementales conditionnant les aides de la Pac. Le niveau 2 correspond à la certification environnementale de l’exploitation autour de seize exigences. Et le dernier est le seul à ouvrir la qualification de « haute valeur environnementale ».