Veaux de boucherie : le marché tourne au ralenti
La consommation de viande de veau pâtit de la crise économique et du manque d’intérêt des jeunes générations, malgré les efforts de communication de la filière. Le marché français s’alourdit, sans trop peser encore sur le commerce des petits veaux.
La Pentecôte ne s’est pas annoncée sous les meilleurs auspices pour la filière vitellière française. Déjà en 2011, les achats de viande de veau par les ménages en grandes et moyennes surfaces (GMS) avaient reculé de 4,7 % par rapport à 2010, selon le panel Kantar. Et la tendance ne s’est pas inversée cette année. Les ventes de veau des GMS ont reculé de 8 % sur les seize premières semaines de 2012 par rapport à la même période de 2011. Une des raisons de cette désaffection des consommateurs est bien sûr économique, d’autant plus en cette période de crise. À 15,16 euros le kilo en avril, la viande de veau est la plus onéreuse du rayon boucherie, même si son prix a moins progressé depuis janvier (+2,6 %) que celui de l’ensemble du rayon (+2,9 %).
Les jeunes Français délaissent particulièrement la viande de veau, en achètant trois fois moins que les plus de 65 ans. Ils se montrent réticents à l’achat, jugeant que cette viande nécessite un certain talent culinaire. La campagne de promotion lancée par Interbev depuis le 17 mai pour préparer la Pentecôte visait ainsi à contrer ces idées reçues en expliquant que « le veau, c’est bon avec trois fois rien ». Un message qu’un opérateur estime « sensé, loin des recettes compliquées que l’on distribue d’habitude et qui ne sont jamais réalisées faute d’avoir les ingrédients dans les placards ! ». Le défi à relever cette année était d’importance. En 2011, ni le festival du veau ni la campagne promotionnelle de la Pentecôte n’avaient en effet permis aux ventes de se redresser, d’après FranceAgriMer. Quant au dernier festival du veau de février-mars, il a juste limité la baisse de la consommation, avec un recul des achats des ménages de l’ordre de 5 % sur cette période.
La baisse de la consommation se répercute sur l’import
Si la consommation française est à la traîne, notre production est plutôt stable. Au premier trimestre, les abattages ont progressé de 0,3 % en volume d’après l’Institut de l’élevage. Les prix à la production ont entamé leur baisse saisonnière plus tôt que d’habitude. Et cette baisse a été plus marquée que les années précédentes : -2,2 % cette année contre -1,6 % en 2011. Néanmoins, à 7,28 euros le kilo, le veau rosé clair U dépassait encore mi-mai de 13 centimes son niveau de l’an dernier.
La morosité de la demande s’est traduite par une forte baisse de nos achats auprès des Pays-Bas depuis le début de l’année. En avril, leurs envois vers l’Hexagone étaient ainsi 19 % inférieurs à leur niveau de l’an dernier. Tous les pays importateurs en Europe semblent d’ailleurs touchés par ce repli de la demande, les exportations de veau des Pays-Bas ayant reculé de 4 % au mois d’avril toutes destinations confondues, selon l’Institut de l’élevage. Les opérateurs européens se tournent vers la congélation, et les stocks s’étoffent. Si les abattages néerlandais baissent depuis 2011, FranceAgriMer annonce que les Pays-Bas pourraient développer leur production de veaux blancs aux dépens des veaux rosés. Vu la compétitivité de la viande hollandaise, nos importations pourraient légèrement progresser, de l’ordre de 1 % par rapport à 2011, d’autant plus que la production française pourrait reculer de 1,5 % sur l’année.
Des mises en place plus prudentes
Devant un commerce atone, les engraisseurs sont méfiants et limitent leurs mises en place. De surcroît, les ateliers sont encombrés : les sorties des veaux sont retardées faute de besoins, comme l’indique la hausse de 2 kg des poids de carcasses entre février et mars. Le marché des petits veaux – en particulier laitiers, puisqu’ils comptent pour les trois quarts des approvisionnements de la filière – s’en ressent. Les cours ne sont pas malmenés pour autant. Ces dernières semaines, ils sont sensiblement au même niveau que l’an dernier. La baisse des besoins a en effet été suivie d’une baisse de nos importations, qui ont reculé de 30 % sur les deux premiers mois de l’année par rapport à 2011 et de 60 % par rapport à 2010, selon l’Institut de l’élevage. L’offre française suffit à satisfaire la demande et le surplus est orienté vers l’export. Ainsi nos envois vers l’Italie et l’Espagne ont progressé respectivement de 20 % et 33 % en janvier et février 2012.
Les naissances de petits veaux croisés et de races à viande ont reculé respectivement de 8 % et 5,7 % en mars par rapport à l’an dernier, d’après la base de données nationale d’identification (BDNI). Celles de petits veaux laitiers ont progressé de 1 % mais pourraient diminuer dans les mois à venir, du fait de l’érosion du cheptel laitier. Les effectifs de femelles laitières de plus de deux ans enregistrées dans la BDNI au 1er mars sont inférieurs de 2 % à ceux de mars 2011. De quoi suivre l’évolution de la demande en veau de boucherie. Notre consommation par bilan devrait reculer de 1 % selon FranceAgriMer.