Mareyage : les prémices d'une vague de concentration ?
L'acquisition d'Océal-liance-Furic par Mari-team représente la plus grosse opération enregistrée depuis plusieurs années dans le mareyage. L'occasion de faire le point sur une activité en évolution qui compte encore de nombreuses petites entreprises. L'arrivée de grossistes en fruits et légumes sur ce segment contribue à la restructuration du secteur.
L'évènement ne passe pas inaperçu dans la filière. La prise de contrôle exclusive du groupe Océalliance (holding de Furic Marée) par la société Perceva, qui détenait déjà Mariteam, vient de donner naissance au numéro un européen des produits de la mer frais. « Baptisé Océal-liance-Mariteam, le groupe emploie quatre cents personnes et réalise un chiffre d'affaires de 170 millions d'euros pour un tonnage de 40 000 tonnes », explique Fabrice Guyot, auparavant membre du directoire de Pomona et ex-directeur général d'Alliomer, aujourd'hui à la présidence du nouveau groupe. Océalliance-Mariteam se détache du peloton dans un secteur encore très atomisé. « Le marché des mareyeurs représente 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires, selon France Nous sommes à moins de 20 % du chiffre d'affaires », souligne toutefois le patron d'Océalliance-Mariteam. Une affirmation validée par l'Autorité de la concurrence qui a autorisé l'opération le 5 octobre, sans réserves.
Peu d'affaires supérieures à 50 millions d'euros« La nouvelle entité restera confrontée à de nombreux mareyeurs, en particulier, Demarne Frères, Mericq, le groupe Vivier Béganton, Vives-Eaux, Alliance Marée, le groupe Fipêche (filiale du groupe Le Graët, ndlr), Gallen et Top Atlantique », est-il écrit dans la décision numéro 15-DCC134. « Cette concurrence est d'autant plus vive que de nombreux opérateurs sont verticalement intégrés comme le groupe Intermarché qui détient des filiales de mareyage intégrées (Capitaine Houat et Viviers la Méloine, ndlr) », ajoute-t-elle. La France compte environ trois cents entreprises de mareyage. Seulement vingt enregistrent un chiffre d'affaires de plus de 15 millions d'euros. « Si on cherche des affaires de 50 à 60 millions d'euros, il n'y en a quasiment pas », commente Fabrice Guyot.
l'exception d'Alliomer, filiale areyage du groupe Pomona qui e souhaite pas communiquer sur ette activité. Tout juste, apprend-on sur son site Internet qu'Al-iomer expédie chaque année 6 000 tonnes de produits de la er frais des côtes françaises vers ifférents marchés pour un chif-re d'affaires de 56 millions d'eu-ros en 2014. À travers cinq implantations, le groupe emploie quelque cent cinquante salariés. Autres exceptions françaises, les filiales d'Intermarché : Capitaine Houat, qui pratique le mareyage dans ses sites de Lanester (56) et Boulogne-sur-Mer (62), et Viviers ” de la Méloine. Ou encore le groupe Vives-Eaux qui emploie deux cent vingt personnes et commercialise près de 13 000 tonnes de produits de la mer pour un chiffre d'affaires de 75 millions d'euros (selon le magazine Produits de la mer).
Il faut atteindre “une taille critique
La création d'Océalliance-Mari-team va-t-elle contribuer à accélérer la concentration dans le sec-> teur ? « Je ne sais pas si ça va l'accélérer. Il y a déjà eu de la concentration. Mais des opérations de cette taille-là, non », analyse Ivy Guillou, directeur de Top Atlantique (25 millions d'euros de chiffre d'affaires), filiale du groupe Le Saint. Le grossiste nantais en fruits et légumes s'est investi dans la marée voilà près de quatorze ans pour répondre à la demande de ses clients et se diversifier. Nombre de ses confrères (aujourd'hui regroupés au sein des réseaux Creno ou Vivalya) ont fait de même.
Damien Levallois, président de l'Union du mareyage français (UMF), estime que la vente à distance conjuguée à la modification des règles d'accès des acheteurs aux halles à marée risque d'accélérer la concentration d'un secteur dont le nombre d'entreprises a été divisé par cinq en une vingtaine d'années. « En soi, la vente à distance était une bonne chose au démarrage il y a une dizaine d'années », dit-il. Seulement, une partie de ces ventes concerne aujourd'hui du poisson qui échappe aux ateliers de mareyage. « Il y a des clients de la marée qui achètent à distance en direct ou des entreprises étrangères qui enlèvent le produit pour le transformer elles-mêmes. »
Avec l'assouplissement des conditions d'entrée des intervenants à l'achat sous les halles à marée intervenu le 1er janvier 2014 qui place les mareyeurs en concurrence avec de petites sociétés de négoce pur, des entreprises « risquent de se retrouver en difficulté. »
« Aussi les sociétés de mareyage tentent-elles de s'adapter », précise-t-il. Soit par rapprochement avec d'autres sociétés, soit en adoptant la démarche Pavillon France (marque collective de l'association à caractère interprofessionnel France Filière Pêche). Plus des deux tiers des 300 entreprises de mareyage françaises sont adhérentes.
Voir le site www.mareyeurs.org
Si le mareyage devrait rester régionalisé, proche des criées malgré le développement de la vente à distance, Ivy Guillou estime qu'un mouvement de concentration est bien en marche. « Il faut atteindre une taille critique », commente-t-il. Les contraintes liées au règlement européen Inco, avec la mise en place d'une traçabilité beaucoup plus fine, mettent en difficultés les entreprises de taille moyenne qui doivent investir dans l'informatique et les chaînes de production. Les aléas liés aux captures et à la vétusté des bateaux atteignent les plus petits, qui ont parfois du mal à faire tourner leur activité.
« Il y a plein de petites affaires, dirigées par des professionnels passionnés, mais sans successeurs. Cette situation créera des ” opportunités pour Océalliance-Mariteam qui veut continuer à consolider le secteur », affirme pour sa part Fabrice Guyot. Le groupe, présent dans vingt-neuf criées de Boulogne à Saint-Jean-de-Luz, avoue regarder du côté de la Méditerranée. « La Méditerra-née au sens large », pointe son président qui lorgne davantage l'Espagne que la France. « Il faut raisonner au niveau de l'approvisionnement des marchés. Et le premier marché des produits de la mer en Europe, c'est l'Espagne », souligne-t-il, alors qu'en France « les captures sont peu importantes ». « Si on veut devenir un acteur de référence, il faut dépasser les frontières », ajoute-t-il et de préciser qu'Océalliance-Mariteam possède déjà le spécialiste de la langoustine Angelbond en Écosse, et est très présent à l'export dans l'Europe du Sud Affaire à suivre...
“ Opportunités pour le groupe qui veut continuer à consolider le secteur