Les profils nutritionnels inquiètent les fromagers
La publication de la proposition de règlement sur les profils nutritionnels par la Commission européenne prend du retard. Selon nos confrères d’ Agra Alimentation, le texte, attendu à l’origine courant janvier, a été retardé par le « grand nombre » de réponses reçues et qu’il lui faut analyser consécutivement à la consultation publique des parties intéressées. Celui-ci serait à l’examen au Comité Permanent de la Chaîne Alimentaire et de la Santé Animale (CPCASA).
Il faut dire que ce projet de règlement a quelques raisons d’agiter les professions de l’alimentaire. La définition des «profils nutritionnels» que chaque catégorie d’aliments devra respecter va conditionner leur capacité à faire valoir des allégations nutritionnelles ou de santé. «La direction prise par Bruxelles nous inquiète», reconnaît Michel Roche, le secrétaire général du SIGF (Syndicat interprofessionnel des fromages à pâte pressée cuite). Ce dernier est allé à la rencontre des députés français à l’Assemblée nationale au début du mois pour les « sensibiliser » au préjudice potentiel pour la filière laitière d’une réglementation qui risque de désigner les fromages comme des produits « à risque ».
Selon les projets de texte en circulation, les fromages, beurres et crèmes ne pourront plus mettre en avant leur richesse en calcium ou en vitamine A au motif qu'ils contiennent trop de matière grasse (MG). « Cela aboutit à classer les fromages parmi les produits mauvais », s'insurge Olivier Picot, président de la fédération nationale des industries laitières. « Même les beurres allégés (41% MG) et très allégés (20% MG) et même les crèmes à 12,5% de matières grasses seront exclus de la liste des aliments qui peuvent mettre en avant des qualités nutritionnelles », insiste-t-il. Les yaourts et la plupart des desserts lactés ne devraient pas être concernés.
« Riche en calcium » interdit ?
Une orientation qui hérisse le poil des fabricants de fromages –et notamment d’emmental- qui communiquent sur l’aspect « riche en calcium », mais qui ne pourront pas s'en vanter parce qu'ils sont aussi trop riches en acides gras saturés. « Nous demandons au gouvernement de peser pour que les produits laitiers soient mis en dehors de cette réglementation », explique encore Olivier Picot. Les industriels fromagers se sont employés à le répéter à tous les ministres et élus, qui, de passage sur le salon de l'Agriculture, se sont arrêtés sur leur stand.
En outre, selon Olivier Picot, Bruxelles se fonde « sur des connaissances en matière de nutrition qui ont plus de 20 ans », et qui dissocient le mauvais gras (acides gras saturés, d'origine animale) et le bon gras (acides gras insaturés, d'origine végétale). Se basant sur les travaux du Pr Legrand de l'Inra, le Cniel (centre national interprofessionnel de l'économie laitière) assure qu'il existe plusieurs types d'acides gras saturés et qui ne doivent pas être tous logés à la même enseigne nutritionnelle. Or la future réglementation européenne «ne fait pas cette distinction», déplore M. Picot.