Relations commerciales
Les fabricants de MDD mis sous pression
Selon de récentes données Nielsen, les prix des MDD ont reculé depuis février et la hausse du SRP sur les marques nationales, décidée par la loi Egalim. Les PME, à l’origine de 80 % des produits sous MDD, subissent un climat difficile même si en volume ces marques repartent.
Selon de récentes données Nielsen, les prix des MDD ont reculé depuis février et la hausse du SRP sur les marques nationales, décidée par la loi Egalim. Les PME, à l’origine de 80 % des produits sous MDD, subissent un climat difficile même si en volume ces marques repartent.
L’évolution des pratiques commerciales « pose problème, notamment en déplaçant la guerre des prix des grandes marques vers les produits sous marque de distributeur (MDD, ndlr) », déclarait le 6 juin Michel Raison, rapporteur de la commission au Sénat de suivi des états généraux de l’alimentation. D’après Nielsen, depuis le début de l’année, les MDD renouent avec la croissance (33,2 % de parts de marché valeur en juin 2019 contre 33,1 % en juin 2018) alors que la France était jusqu’alors un cas isolé en Europe de l’Ouest avec des marques propres en souffrance, en recul de 2,3 points de parts de marché en cinq ans. Le dynamisme de la MDD depuis février 2019 passe par les gammes bios, mais surtout par le retour à la croissance des MDD standard (respectivement 41 % et 57 % des gains des MDD). « Une situation favorisée par la loi Egalim impliquant une baisse de la générosité promotionnelle des marques fabricants (-1,9 point à 28,3 % en moyenne, sur les six premiers mois de l’année) et une hausse de leurs prix (+0,3 % d’inflation en moyenne et jusqu’à +4,9 % sur les 100 références les plus vendues), alors que dans le même temps les MDD ont vu leurs prix baisser, ce qui, allié à davantage de visibilité (offre élargie de 1,2 %) et à des promotions plus avantageuses (+0,6 point à 19,8 % de générosité), leur redonne plus d’attractivités », remonte Nielsen.
Sur le positionnement MDD, la pression est énorme
« Sur le positionnement MDD et distribution de marques, la pression est énorme. L’ensemble de la distribution a eu l’impression que la loi Egalim était une contrainte et s’est donc rabattu sur les MDD. Soit ils l’ont fait de manière stratégique, à l’image de Carrefour souhaitant rejoindre son associé Tesco ; soit ils l’ont fait de manière plus opportuniste, afin de se dégager des marques nationales et de la pression législative », a déploré Richard Girardot, président de l’Ania, le 29 mai devant la commission d’enquête sur la grande distribution.
« On ne met pas de l’huile sur le feu, mais le climat est difficile », reconnaît Dominique Amirault, président de la Fédération des entreprises et entrepreneurs de France (Feef). S’il est trop tôt pour tirer un bilan de la loi Egalim, « avec la majoration du SRP, la distribution a repris des marges sur les grandes marques et a tendance à baisser les prix sur les MDD ce qui la rend plus demandeuse dans les appels d’offres », ajoute-t-il.
Difficile d’en faire une photographie à l’instant T
L’observatoire des négociations commerciales, animé par le médiateur des relations commerciales agricoles, n’a pas étudié les contrats concernant les MDD. « Car on n’en avait pas le mandat, et il est difficile d’en faire une photographie à l’instant T, ils ne se négocient pas dans un calendrier précis », explique-t-on à la médiation. Le médiateur a-t-il par ailleurs été saisi pour des relations commerciales portant sur des MDD ? « 20 % des saisines portent sur l’aval de la filière, émanant de fournisseurs ou plus rarement de distributeurs. Nous n’avons reçu aucune saisine portant seulement sur des MDD, mais quand un industriel nous saisit, cela peut traiter également des MDD », confie la médiation.
Il faut dire que pour l’heure, le cadre réglementaire français reste encore relativement flou autour des MDD. « Théoriquement, il y a deux types de MDD. Les MDD standard gérées par la convention annuelle (article L441-3 du Code du commerce si ce ne sont pas des PGC et article L441-4 si ce sont des PGC, non gérés par des grossistes, ndlr) et les MDD où l’action du distributeur est forte avec la mise en place d’un cahier des charges précis, là il n’y a pas d’obligation de convention de durée », développe Nicolas Genty, avocat associé d’EY Associés.
Les contrats des MDD sont censés mentionner les indicateurs des productions agricoles, selon l’article L441-7 du Code du commerce introduit par la loi Egalim.
Liberté de la distribution sur les appels d’offres
Dans les faits, les MDD recèlent une diversité de situations suivant les secteurs, avec des contrats à tacite reconduction dans bien des cas. Mais des distributeurs susceptibles de relancer des appels d’offres quand bon leur semble, notamment quand ils souhaitent faire baisser les prix. « Les appels d’offres privés ne sont pas encadrés comme les appels d’offres publics, les opérateurs sont beaucoup plus libres », explique Nicolas Genty.
Ainsi, Richard Girardot a expliqué devant l’Assemblée nationale comment la centrale d’Intermarché avait relancé un appel d’offres en 2019 qui « ne correspondait plus à une crème française, mais à une crème européenne ! » Une situation difficile à gérer pour des industriels ayant acheté des matières premières spécifiques, des emballages et misant sur des volumes pour faire tourner leurs lignes de production.