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Reuse, ou la réutilisation des eaux usées, bientôt une réalité

Pour les industriels agroalimentaires, la réutilisation « des eaux non conventionnelles » va devenir réalité. Exemple en Bretagne.

Les représentants du collectif « eau propre » réunis autour de l’ABEA, l’Atla et en présence des représentants de la Région Bretagne, le 5 avril sur le site de la Cooperl à Lamballe.
© Franck Jourdain

Réunis dans les bureaux de l’unité de traitement de l’eau du groupe coopératif porcin Cooperl à Lamballe (Côtes d’Armor), mercredi 4 avril, les représentants d’une dizaine d’industriels participant au collectif « Eau propre » de l’association bretonne des entreprises alimentaires (ABEA) avaient le sourire. Ils ont le sentiment d’avoir réussi à convaincre les pouvoirs publics de déverrouiller la réglementation en faveur de la REUSE -Réutilisation des eaux usées traitées et des eaux extraites des matières premières alimentaires. Quelques jours auparavant, le 30 mars, le président de la République Emmanuel Macron dévoilait le plan Eau pour la France.

53 mesures pour inciter à la sobriété pour abaisser la consommation de 10 % d’ici 2030 en France. La mesure 15 concerne directement les IAA. Elle prévoit la levée des freins réglementaires à la valorisation des eaux non conventionnelles. Les industriels prévoient de réduire leurs prélèvements sur le réseau d’eau potable de 15 à 20 % après recyclage. Au lendemain de l’annonce présidentielle, l’Ania a salué le travail réalisé par l’ABEA en association avec l’Atla (Association de la transformation laitière française) dans un communiqué où elle se félicite de cette avancée. Mais qu’on fait les Bretons pour se voir ainsi remerciés ?

Une dizaine d'industriels dans le collectif "eau propre"

Dans une Bretagne qui n’est plus épargnée par les épisodes caniculaires, sa puissante industrie agroalimentaire (1 800 sites employant 70 000 salariés) craint à l’avenir devoir adapter sa production à la disponibilité en eau. Dès 2019, l’ABEA constitue avec l’Atla le collectif « eau propre ». Une dizaine d’entreprises de secteurs sensibilisés à l’urgence climatique -lait, viande, légumes- y participent. On y trouve les laitiers Entremont (Sodiaal), Laïta, Lactalis, l’industriel belge du légume surgelé Ardo, le groupe porcin Cooperl, etc. Ils engagent des diagnostics pour identifier des économies potentielles et mettent en œuvre différentes solutions.

Entremont a progressivement réduit sa consommation d’eau de 5 % en limitant sous contrôle sanitaire certaines opération de lavage. Laïta, filiale industrielle laitière des coopératives Even, Eureden et Terrena a testé avec succès l’intelligence artificielle de la start-up Thrasos sur son site d’Yffignac et réduit ses consommations de 5 %. Elle prévoit désormais de déployer la solution sur ses cinq autres sites industriels. Lactalis a substitué, sur une de ses tours de refroidissement à Retiers (Ille-et-Vilaine), l’eau potable par de l’eau recyclée pour un gain de 10 %. Essentiel, parce que « l’été, en période de forte tension sur la ressource, on consomme le plus d’eau », précise Xavier Cleuziou, expert environnement du groupe.

Fort de son expérience en Belgique, l’industriel du légume surgelé Ardo (leader européen avec 20 sites de production) a réduit « au maximum (ses) consommations en eau par la mise en œuvre de process hydro-économes », explique-t-il. Il a en plus investi dans son usine de Gourin (Morbihan) 360 000 euros dans le recyclage de l’eau de la ligne « légumes racines ». Résultat, le ratio de consommation du site a été a été divisé par quatre en presque 30 ans. C’est par de lourds investissements que les industriels franchiront un « gap » d’économies d’eau. Cooperl en est un parfait exemple.

Une économie potentielle de 2,5 millions de m3

Le groupe coopératif basé à Lamballe a régulièrement investi dans les 3 R (réduire à la source, recycler, réutiliser) pour régénérer 850 000 mètres cubes d’effluents issus de ses activités industrielles et environnementales, notamment avec une filtration en osmose inverse. Non seulement le ratio mètre cube/tonne de viande a été réduit de 19 % en quatre ans, mais l’eau recyclée « est équivalente voire supérieure à celle de l’eau potable du réseau », précise Maëlle Fisselier (Cooperl). Les industriels disent être prêts à investir. Non pas pour créer de la valeur, mais, pour continuer de produire en période de sécheresse. Un sondage effectué par l’ABEA auprès de 28 sites industriels révèle qu’ils pourraient économiser 2,5 millions de mètres cubes.

 

 

 

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