L’agriculture européenne, grande perdante des négociations UE-Mercosur
Relancées en mai 2010, les négociations entre l’Union européenne et le Mercosur en vue de la conclusion d’un accord de libre-échange se feront manifestement au détriment du secteur agricole européen. Selon deux études d’impact de la Commission européenne, l’accord aurait pour conséquence une nette hausse des exportations européennes, avec cependant un impact globalement négatif pour l’agriculture. Les dissensions entre – et au sein même – des deux blocs ralentissent considérablement les discussions. L’échéance de 2012 prévue pour la conclusion d’un accord paraît compromise.
Rédaction Réussir
En 1995, l’Union européenne et le Mercosur ont signé un accord de coopération, scellant les bases d’un dialogue régulier en vue de futures négociations vers un accord de libre-échange (ALE). Les négociations ont été lancées en 2000, pour être finalement suspendues en octobre 2004, en raison du trop grand nombre de divergences, non seulement entre l’UE et le Mercosur, mais au sein même de chacune des parties.
Consciente de la réduction constante de sa part dans le commerce Mercosur, (notamment au profit des États asiatiques ou sud-américains, plus dynamiques) et des possibilités offertes par un rapprochement commercial avec une région émergente dont le marché reste relativement protégé, l’UE a réengagé les contacts en 2009. Le processus de négociation a été formellement relancé en mai 2010, avec la volonté affirmée de conclure un accord en 2012, qui consacrerait la plus grande zone de libre-échange au monde.
Selon une étude publiée en juillet 2010, l’impact commercial général d’un tel accord Union européenne-Mercosur permettrait d’augmenter nettement les exportations européennes, qui pourraient passer de 67,9 % à 105,4 %, selon le scénario envisagé. La hausse la plus remarquable concernerait en particulier les exportations dans les secteurs de l’industrie et des services. Mais l’étude soulignait dans le même temps les risques de répercussion négative pour certains secteurs, et en particulier pour l’agriculture européenne qui devrait faire face à la concurrence directe des produits sud-américains.
Le secteur de la viande bovine serait le plus touché
Une analyse d’impact datant de cet été confirme ces prévisions inquiétantes et évalue entre 0,2 % à 4,8 % la baisse du revenu agricole européen. Face aux leaders sud-américains, c’est le secteur de la viande bovine qui serait le plus touché, avec une baisse comprise entre 5 000 et 525 000 tonnes dans le pire des cas. D’autres produits tels que les céréales, les fruits et le sucre pourraient aussi pâtir directement de cet accord. Les parties restent néanmoins déterminées à conclure l’accord courant 2012.
Ce calendrier semble ambitieux compte tenu des divergences au sein même des deux blocs, et des récentes mesures protectionnistes prises par l’Argentine et le Brésil, largement contraires à l’esprit des négociations. À cet égard, le commissaire européen au Commerce Karel de Gucht s’est s’inquiété début octobre de cette tendance au repli, particulièrement vraie pour l’Argentine, qui pourrait affecter fortement l’issue des négociations. Si, lors du dernier sommet du comité de négociateurs à Bruxelles en juillet 2011, un certain nombre de progrès semblait avoir été faits quant aux questions relatives aux services et investissements, les difficultés actuelles d’accès au marché laissent présager des discussions animées lors du prochain sommet, qui aura lieu à Montevideo, en Uruguay, du 7 au 11 novembre 2011.